A l’époque où les journaux télévisés ne cessent d’évoquer la montée des extrémismes dans le Moyen-Orient, Marius Von Mayenburg, dramaturge allemand contemporain, s’empare de ce thème de société et Matthieu Roy le met en scène.
Sauf que cet extrémisme nous touche de près : ce n’est pas l’Islam qui est pris pour exemple, mais bien la religion chrétienne, que Benjamin, jeune adolescent, prend désormais pour unique référence. Il décide de suivre à la lettre les Saintes Ecritures et condamne sans compromis tout ce qui sort des préceptes de la Bible. Si au départ, on peut sourire de le voir s’insurger contre le fait que garçons et filles se voient en maillot de bain à la piscine pendant les cours de sport, très rapidement son discours se radicalise, et il commence à faire peur. Fort de ses certitudes, il remet en cause tout le système et provoque tous ceux qui l’entourent.
Si à notre époque, en France, on lit la Bible comme une œuvre de tolérance, composée essentiellement de paraboles, Benjamin, en citant uniquement le texte et rien de plus, en fait émerger un discours guerrier, vindicatif. Homosexuels, juifs, adultères, rien n’échappe à son jugement implacable. Il se prend pour un nouveau Croisé, missionné par Dieu pour vaincre le péché.
Lorsqu’il se retrouve face à un prêtre, le spectateur peut éprouver une forme de soulagement, on pense que l’homme de Dieu va ramener ce jeune homme vers la modération ; Benjamin balaie en quelques instants tous les arguments du prêtre, et condamne l’Eglise et ce qu’elle est devenue, encore une fois en prenant le texte biblique pour preuve. La voix du jeune homme raisonne sur la scène, épurée, quasiment vide, seul les mots et leur poids occupent l'espace. Rien ne semble arrêter Benjamin, il commence à prêcher son discours de violence et entraîne derrière lui un camarade à l’esprit malléable, qui devient rapidement son disciple. Le jeu rapide et incisif des acteurs, renforcé par des transitions très brusques pour passer d’une scène à l’autre, ne laisse aucun répit au spectateur, la tension monte dans l’espace théâtral, on voit venir une fin à la mesure de la passion de cet adolescent, on sait qu’un drame se prépare… Jusqu’où Benjamin est-il capable d’aller pour témoigner de sa foi ?
A voir à l’Idéal de Tourcoing du 8 au 12 octobre 2014.
