Mais une grande voix venue d'un mégaphone... cria ... : Il EST GRAND TEMPS DE RALLUMER LES ETOILES... En entendant ce vers d’Apollinaire, on ne peut que s'amuser de la curiosité de ce samedi 5 décembre 2015. On se retrouve au remarquable lieu culturel, le Métaphone de Oignies pour entendre HK et les Saltimbanks qui a sorti son album "Rallumeurs d'étoiles" en 2015.
Si la métaphysique, c'est transcender la physique, alors, le Métaphone ? L'expérience vécue dans le bassin minier en cette soirée fut bien au-delà du son. Imaginez-vous, avançant dans la nuit pour rejoindre le carreau de fosse 9-9 bis. Imaginez que vous voyez l'ombre d'un terril se dessiner. Les chevalements se dresse le long de l'allée qui mène à un bâtiment à l'allure très contemporaine émettant des sons étranges diffusés par haut-parleurs. Il n'est pas anodin de se rendre sur un site inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO. Dans le hall de la salle de spectacle, c'est Amnesty International qui accueille et recueille nos signatures pour le respect des droits de l'homme à travers le monde. Le ton est donné ! Et il sera entre autres question du rapport à l'autre, au monde, du rapport à "tout le monde", refrain qui sera entonné à tue-tête par HK et les Saltimbanks avec l'ensemble du public
Nous nous sommes amusés du contraste de vocabulaire entre la première partie du concert, assurée par Mascarade, et la seconde de nos Saltimbanks. Si ces derniers citent Apollinaire, et que les seules audaces de langage que nous aurions pu entendre sont de l'ordre de : "Nous sommes heureux de nous trouver au pays des gueules noires", nous vous laissons imaginer la nature de l'univers de Mascarade. Pas besoin de citer de grands auteurs, de s'interdire les jurons, pour écrire des chansons sincères à l'énergie communicative. Le chanteur et les deux guitaristes ont su faire fi des discours bienséants, et on se risquera à utiliser une de leur formule qui fera date : "ils n'en ont rien à foot". Ce trio avec un ancien de Marcel et son orchestre jouent la dérision sans inhibition, après tout, il n'y a pas d'enjeux, ils ne sont "qu'la première partie"... Les camarades (on appréciera l'anagramme) donnent à la scène des allures de ring par les bondissements du chanteur, les taquineries réciproques entre les membres. Les textes des chansons sur fond de rock, punk, ska, hip-hop, nous donnent l'impression de regarder l'émission Strip-tease dépeignant les travers des couches populaires. On pourrait encore citer quelques formules amusantes mais le mieux serait de vous rendre à la Gare Saint Sauveur à Lille le 22 janvier 2016 à 20 heures pour profiter des facéties de Mascarade.
Ce qui a fait le lien entre les deux prestations de cette soirée, c'est bien la notion de populaire même si nous l'avons vécue de manière différente. "Sous les pavés, la Bohème", la chanson à succès, ré-interprétée en valse fait se balancer les spectateurs d'un seul mouvement de gauche à droite. Dès cinq premières minutes, on comprend que le public est acquis. On reprendra chaque refrain, chaque onomatopée proposée par la voix au séduisant vibrato de Kadour Hadadi. On souhaiterait que ce dernier nous fasse plus profiter de son flow qui peut s'enrichir de rythmes qui évoquent le raggamuffin, d'allitérations créatives et de formules empruntées à la culture générale. "Temps de cerveau disponible", "Obsolescence programmée", vers de Jean De La Fontaine, utilisation de titres de films ( "Sans arme, ni haine, ni violence" de Jean-Paul Rouve, "Le bon, la brute et le truand" de Sergio Leone), voilà une recette qui sera efficace pour créer l'unité. Quant à la musique et aux musiciens eux-mêmes, on ressent le talent même si le spectacle si bien ficelé laisse peu de place à l'improvisation. On entendra des riffs de guitare à couleur malienne, des modes mélodiques évoquant les musiques manouches, des accélérandi à la russe, des bandes-sons électro-swing... Cet engagement facile amènera nécessairement le public a trouvé son compte à un moment ou à un autre de cette soirée .
