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Placebo + The Joy Formidable au Zénith de Lille

20 ans. Déjà. Et des souvenirs plein la tête. Qui reviennent comme des flashs incontrôlables. Comme ce premier concert lillois donné en novembre 1996 pour le Festival Inrocks dans une Aéronef très aérée. Il faut l'avouer, c'est avec une certaine nostalgie que l'on pénètre (malheureusement trop tard pour juger de la prestation de la première partie, le groupe gallois Joy Formidable) dans l'antre du Zénith pour fêter les deux décennies d'existence du groupe Placebo. Un sentiment exacerbé par l'âge du public, composé pour une grande part de jeunes quarantenaires.

Pour qui Placebo constitua la bande son idéale de la fin des années 90. Un compagnon de route avec lequel partager soirées à refaire le monde, beuveries, errances narcotiques, gueules de bois, histoires de fesses ou de coeur... La bande de Brian Molko ayant su parfaitement, à l'époque, cristalliser les attentes et les frustrations de la génération post-Grunge. A travers des albums à la fois incisifs et mélancoliques, à l'esthétisme racé, qui conféraient au groupe une place bien particulière. Car ni tout à fait Pop, ni tout à fait Rock. Malheureusement, insidieusement, Placebo commença à céder aux facilités commerciales. Particulièrement à partir de 'Meds', leur 5e album. La complicité s'éroda et les chemins se séparèrent. Il en va ainsi de certaines amitiés de jeunesse... Ne subsistent plus que les bons souvenirs. Un passé que l'on espère voir un jour raviver au détour de joyeuses retrouvailles.

Cette tournée d'anniversaire semblait être l'occasion rêvée, Brian Molko expliquant sur le site Internet du groupe qu'il y aurait dans la set-list des chansons qu'il avait juré de ne plus jamais jouer : « Si vous voulez nous voir jouer des chansons comme ‘Pure Morning’ et ‘Nancy Boy’, que nous n’avons pas interprétées depuis près de dix ans et que nous ne jouerons peut-être plus jamais, alors vous feriez mieux de venir nous voir ». Une invitation prise au sérieux par les fans de la première heure. Prêts à en découdre, à vibrer de nouveau. Dans un Zénith sold-out, suintant la nervosité et l'impatience.

C'est sous la forme d'une vidéo jouée sur écrans géants que le groupe fait d'abord son apparition. Avec le clip d''Every You Every Me'. Un des titres les plus emblématiques des débuts. Retentissent ensuite les premiers accords de 'Pure Morning' et sa longue intro binaire. Sous les ovations du public, les musiciens font leur entrée un par un : Matt Lunn, le dernier batteur en date, Fiona Brice au clavier et au violon, le bassiste et guitariste Stephan Olsdal et, finalement, Brian Molko. Le morceau, joué à cent à l'heure avec une morgue et une suffisance défiant toute imagination, pose immédiatement un climat idéalement tendu. Le son est énorme, les effets de lumière saisissants. L'excitation dans la salle est à son comble. Le Placebo fait encore son effet.

Peu de temps après avoir entamé le second morceau ('Loud Like Love'), Brian Molko interrompt soudainement le concert. Incompréhension dans la salle. Le chanteur explique que quelqu'un vient de gravement se blesser dans les premiers rangs. Des huées et des sifflets se font stupidement entendre. « La ferme » leur claque le leader du groupe qui préfère suspendre la prestation pour laisser travailler La Croix Rouge sereinement. Quelques minutes plus tard, Brian rassure sur l'état de santé de la victime, intime aux spectateurs de prendre soin d'eux et de leurs voisins et la musique reprend.

Difficile après ce coitus interruptus de retrouver les ardeurs du début. Il manque un supplément d'âme, de désir. Brian Molko et Stephan Olsdal occupent parfaitement la scène, ont une présence indéniable. Mais les gestes semblent souvent mécaniques, noyés dans les artifices. La set-list (froidement identique aux dates précédemment données en Europe) prend la forme d'un best-of bien trop réfléchi qui ne cherche jamais à sortir de sa zone de confort. Laissant une place trop importante aux trois médiocres derniers albums : 'Lazarus', 'Too Many Friends', 'Devil in The Details', 'Space Monkey', 'Exit Monkeys'... Désolé Brian, traite-nous de vieux cons si cela te soulage, mais ce n'est pas pour ces morceaux que nous avons fait le déplacement. De plus, certains choix se révèlent discutables comme cette slow version de '36 Degrees', mollassonne, et l'horripilante traduction en français de 'Protect Me From What I Want'. L'ennui prend le dessus. Surnagent néanmoins quelques très beaux moments. Tous liés aux débuts de carrière. Le magnifique 'I Know' où la voix tendrement nasale de Brian Molko fait des merveilles et nous chope comme au premier jour. Et l'émouvant 'Without You I'm Nothing' permettant de rendre hommage, par vidéos interposées, à David Bowie, leur mentor, qui interpréta souvent le morceau en duo avec le groupe lors d'une tournée commune.

Heureusement, au bout d'une heure et demie de concert, Brian et sa bande se décident enfin à vraiment écarter les cuisses. A faire plaisir aux clients. Le chanteur souligne la fin de la « section mélancolique ». Rappelle que tout anniversaire se doit d'être festif et permettre aux invités de danser. Le rythme s'accélère. 'Slave To The Wage' et 'Special K' font monter la température. 'The Bitter End', 'Teenage Angst', 'Nancy Boy', jouées avec une urgence et une nervosité que l'on croyait éteintes, donnent les coups de reins nécessaires pour enfin toucher l'orgasme. Le Placebo s'est enfin transformé en Viagra.

Mais, bon dieu, que les préliminaires furent inutilement longs !

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