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« Jackie » : Critique du Biopic sur Jackie Kennedy, avec Natalie Portman

Cette semaine, Lille La Nuit vous propose dans son actu ciné la critique du dernier long-métrage de Pablo Larrain : Jackie ! Ce film - pour lequel Natalie Portman est nominée aux prochains Oscars - retrace le destin et le parcours de Jackie Kennedy, juste après l’assassinat du Président John Fitzgerald Kennedy. Biopic nous direz-vous ? Oui, mais avec une approche originale particulière faite de qualités, faiblesses, forces et fautes de goût. Critique de Jackie par Lille La Nuit.

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Natalie Portman est Jackie Kennedy

 

Critique : Jackie est le deuxième long-métrage du réalisateur Pablo Larrain à sortir en France en deux mois. En janvier 2016, Neruda - consacré au poète, penseur et homme politique chilien - était à l’affiche. Le traitement de Neruda était particulièrement original pour un biopic : la structure y était éclatée et le regard porté sur l’écrivain, loin d’être consensuel (comme c’est le cas dans beaucoup de films du genre).

Fils d'une mère ministre et d’un père sénateur, le cinéaste s’est intéressé assez logiquement dans ses longs-métrages à des sujets connectés à la politique, leurs figures historiques et aux problèmes de société. Il signe notamment le formidable No, interprété par Gael Garcia Bernal, et se déroulant sous la dictature de Pinochet.

A 40 ans, Larrain signe avec Jackie son septième film. Il s’agit de sa première incursion aux Etats-Unis.

Quand on voit l’œuvre de Larrain, on comprend ce qui a séduit les Américains. Voilà un cinéaste qui a du style, ne cherche pas l’originalité à tout prix, mais impose un ton, un angle et une vision. Surtout, Larrain pose un vrai regard sur les figures politiques et historiques auxquelles il s’attache.

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Dans ses films, Pablo Larrain impose un ton et une vision.  Au risque, parfois, de se perdre.

 

Dès les premières secondes de Jackie, on comprend qu’on ne va pas regarder un biopic lambda. L’image est volontairement d’un gris bleuté. Jackie Bouvier Kennedy semble défaite. Le film tourné en numérique, propose une image avec du grain comme à l’époque des tournages en pellicule argentique.

Le cinéaste est au plus près de son personnage principal - interprété par Natalie Portman -. La caméra colle aux basques de l’actrice, filme son visage, ses attitudes. Les spectateurs sont au plus près de Jackie Kennedy. Larrain se tient à ce choix de mise en scène durant les 90 minutes du métrage.

Du coup, se dégage de Jackie une intimité typique du cinéma indépendant américain (aucun mépris de notre part). Le style est sec, hiératique, dépouillé. Le rythme est volontairement lent. Pour autant, on ne sent pas la durée du film.

On peut trouver courageux les choix esthétiques et de narration adoptés par Larrain. On peut aussi y voir une certaine forme de maniérisme et une volonté de réaliser un long-métrage qui porte coûte que coûte une « signature ». Du coup, Jackie ostensiblement marqué du sceau "film d'auteur" semble un « objet cinématographique » pensé, produit pour séduire festival et cérémonies prestigieuses.

Il est vrai que la sécheresse du film, son refus de l’anti-spectaculaire (à part lors de la scène très forte de l’assassinat de John F. Kennedy) et sa mise en scène à la limite du documentaire, séduisent.

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John et Jackie Kennedy, avant la tragédie.

 

Mais on ne peut s’empêcher de se questionner sur la volonté du réalisateur à imposer une telle forme de dépouillement à son film.

On comprend bien les enjeux posés par Jackie : faire découvrir cette femme qui vivait dans l’ombre de son époux de Président, qui souffrait d'une image officielle corsetée et réductrice.

Dans son film, Larrain montre une femme forte, prenant son destin en mains. A mille lieues de l’image de la Première Dame (un peu cruche) accueillant les caméras de la télévision américaine au sein de la Maison Blanche.

Hélas, Larrain fait montre d’un certain voyeurisme (pour ne pas dire d’un voyeurisme certain) lorsqu’il filme lourdement Jackie seule dans sa salle de bain, se frottant énergiquement les ongles avec une brosse pour faire disparaître le sang de son époux assassiné. A cet instant, on se sent gêné d’assister à un tel « spectacle ». Il eut été plus pudique de faire comprendre cette scène aux spectateurs en restant « hors champ » de la salle de bain. Par ailleurs, la musique de Mica Levi (omniprésente) surligne chaque émotion du film. Fâcheux !

Natalie Portman, quant à elle, séduit et en même temps - un peu à l’image du film - agace. Elle se moule avec force dans un rôle pas évident à incarner. Mais on a trop l’impression d’assister à un grand numéro d’actrice de type « Actor Studio ». On sent la performance à chaque plan, le travail, la volonté d’impressionner. A chaque apparition, le mot « Oscar » semble clignoter sur l’écran ! D’ailleurs, c'est réussi : Natalie Portman est nominée pour celui de la meilleure actrice.

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Natalie Portman et l'immense acteur britannique John Hurt, mort le 27 janvier 2017.

 

Notre impression devant Jackie est donc très mitigée. Le film est intéressant, mais on y trouve de gros défauts. Et une certaine roublardise.

Néanmoins, Lille La Nuit vous conseille de voir Jackie parce que le film a le mérite de s’intéresser à une femme assez exceptionnelle, passionnante jusque dans ses ambiguïtés. Surtout, le film fait réfléchir à l'heure où la politique semble tant dévoyée. Au moment où un milliardaire présentateur de Real TV est locataire (pour au moins quatre ans) de la Maison Blanche.

Synopsis : 22 Novembre 1963 : John F. Kennedy, 35ème président des Etats-Unis, vient d’être assassiné à Dallas. Confrontée à la violence de son deuil, sa veuve, Jacqueline Bouvier Kennedy, First Lady admirée pour son élégance et sa culture, tente d’en surmonter le traumatisme, décidée à mettre en lumière l’héritage politique du président et à célébrer l’homme qu’il fut.

JACKIE de Pablo Larraín
Avec : Natalie Portman, Peter Sarsgaard, Greta Gerwig, Billy Crudup, John Hurt
Genre : Drame
Durée : 90 minutes
Sortie le 01 février 2017

Affiche, photos et film-annonce © BAC Films

 

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