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Chassol au Louvre Lens

Le Colisée et la Scène du Louvre Lens avaient uni leurs très élégantes forces pour offrir à Christophe Chassol un cadre digne de son talent, la superbe salle qui jouxte le Louvre, ouvert très tard dans le cadre de la Nuit des Musées. Avant le concert, Chassol est parfaitement relâché, discutant extrêmement tranquillement à l’extérieur de la salle. Le public, chanceux, puisque les demandes ont afflué pour ce concert aussi prestigieux que gratuit piaffe réellement d’impatience quoiqu’il reste calme et digne des lieux.

Quand Chassol arrive sur scène, il le fait avec une extrême discrétion et annonce en toute simplicité qu’il va nous présenter Big Sun, sa dernière création, son dernier Ultrascore (Création artistique en 3D: harmonie, rythme et répétition). Il le fait avec une telle discrétion qu’il ajoute malicieusement qu’il ne parle pas fort « sans aucune raison. » Chassol reste constamment discret, y compris dans son discours sur son travail et ne cesse de rappeler qu’il ne surgit pas de nulle part mais que les trois thèmes de Big Sun sont construits à partir des techniques de composition de Maurice Ravel, par exemple. Pas de duperie, jamais. On ne triche pas.

On le sait, Chassol parcourt le monde, de La Nouvelle-Orléans à l’Inde, enregistre son et images, revient et travaille à  « harmoniser le réel ». Son rayonnement ne cesse de s’étendre, reçu ces jours derniers par Gilles Peterson, "Heavy Supporter", rien de moins, en Angleterre avant de partir au Japon.

Sa démarche est merveilleuse, toute l’humanité se croise et se répond, il n’y a pas plus humain, plus complètement humaniste que la démarche de Chassol, on y parle, en musique, de la vraie vie des vraies gens tout en ayant l’air de faire uniquement de la musique. On le voit d’abord, debout, se concentrer longuement, prendre la mesure des pépiements d’oiseaux qui commencent sur le magnifique écran, les couleurs sont extrêmement chaudes et pleines, ses doigts bougent exactement en harmonie rythmique, déjà, avec les chants de Birds, part 1 pendant que Lawrence Clais, son merveilleux batteur chauffe tranquillement ses poignets en jouant directement sur ses jambes, attendant de nous faire profiter de son talent étourdissant. A ne surtout pas oublier dans la démarche et la réussite de Chassol, ce batteur fantastique, aussi caressant que fracassant quand il le faut, frère d’armes depuis dix ans de Christophe et batteur de De La Soul, pour ne citer qu’eux. Ces cymbales ont virevolté dans tous les sens et ses peaux ont littéralement chanté.

La manière dont se construit cette harmonie entre les images et les sons, indissociables au point que ce soit perturbant (Que regarde-t-on ?) est fantastique. Si on insiste beaucoup sur l’oreille absolue de Chassol, ce qu’on a vu ce soir là fait surtout penser que c’est une oreille qui entend à merveille ce que la vie peut générer de merveilles musicales, harmoniques et rythmiques. C’est peut être ce talent qu’on oublie le plus, il faut savoir aller chercher ces sons. La beauté de ces gens simples, chanteurs de rue, flûtiste étonnant, vendeuses du marché,  leur simplicité, leur vécu, sont rehaussés par la musique. C’est Chassol qui les regarde avec une vraie tendresse, sans la moindre trace de morale, ils sont là, valent tous les autres et les autres les valent tous. C’est au cœur de l’humanité profonde de sa musique et de sa démarche qu’on a pu plonger avec délices dans les gradins de La Scène. Quand le film s'est terminé, on aurait adoré que Christophe et Lawrence viennent jammer deux heures mais Lawrence s’est éclipsé discrètement, laissant à Chassol le soin de clore la soirée. Une touche de magie supplémentaire dans cette belle nocturne lensoise. A voir absolument. 

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