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Adam Green &Jukebox The Ghost à l’Aéronef

En ces temps de grisaille et de froid hivernal, il est bon de se plonger dans la chaleur d'une salle de concert. Surtout lorsqu'il s'agit d'assister à la prestation de ce sale gosse d'Adam Green qui, à seulement 28 ans, a eu le temps de devenir le chantre de l'antifolk new-yorkais avec les Moldy Peaches et d'écrire cinq albums solo de qualité inégale mais néanmoins indispensables au paysage musical américain par leur sens inné des mélodies, leur approche déglinguée du folk et leurs textes à l'humour dévastateur (comme par exemple No Legs, cette chanson aux paroles inoubliables: « There's no wrong way to fuck a girl with no legs »). C'est donc devant un public relativement compact qu'Adam Green est venu présenter au Club, à l'Aéronef, son sixième album baptisé Minor Love, produit par le producteur de Devendra Banhart, Noah Georgeson, un album plus lo-fi qu'à l'accoutumée, à la fois sinistre et drôle (car faisant suite à son divorce), relevée par sa voix rocailleuse et chaude si particulière.

Cette soirée, fut, dans un premier temps, l'occasion d'une belle rencontre musicale. En effet, elle permit de découvrir, en première partie, le groupe américain originaire de Washington mais aujourd'hui basé à Philadelphie, Jukebox The Ghost (ne cherchez pas de sens réel à ce joli nom, le chanteur révéla que, même en anglais, cela ne signifiait rien). Ce groupe, composé de trois membres (Ben Thornewill au chant et au clavier, Tommy Siegel au chant et à la guitare et Jesse Kristin à la batterie) jouait, ce soir, pour la première fois de leur carrière en France. Et pour une première fois, ce fut un beau coup d'essai. Car ce piano-pop-trio, avec ses mélodies finement travaillées, ses chansons gentiment optimistes et son énergie communicative, a facilement conquis le coeur et les oreilles du public lillois qui a su lui réservé l'accueil qu'il méritait. Sans nul doute, un groupe à suivre, particulièrement par les fans de Ben Folds. Et peut-être l'occasion, un jour, de dire, en cas de succès, « j'étais à leur toute première date française ».

 

Le temps de se boire une petite mousse et de s'en griller une et voilà que débarquent sur scène le phénomène de la Grande Pomme et ses fidèles accompagnateurs – Steven Mertens à la basse, Nathan Brown au clavier, Chris Egan à la batterie, John Wiley à la guitare. Et très vite, on se dit que ce mec est vraiment énervant. Non seulement, il habite une des villes les plus cool du monde, a pour amis Ben Kweller, Julian Casablancas, Carl Barat ou encore les membres de Vampire Weekend, mais, en plus, il est séduisant et met des étoiles dans les yeux des nombreuses filles présentes ce soir-là. Même son look que renieraient désormais les hardos les plus endurcis, c'est à dire torse nu sous un perfecto, n'enlèvent rien à sa tchatche...

Adam Green est donc un artiste bourré de charme mais également un artiste bourré tout court. Comme à son habitude, c'est visiblement imbibé et enquillant encore par-dessus de nombreuses bières qu'il nous fait son show. Et là où certains artistes pourraient paraître pathétiques, lui est génialement magistral. Un véritable clochard céleste qui n'arrête pas de bouger, de danser, de maltraiter son pied de micro, exécutant tous ses habituels petits délires scéniques tels la danse du pharaon ou slamant dans un public trop heureux de pouvoir le porter. Une question taraude alors les esprits: comment peut-on boire autant et tenir encore debout? Et surtout: comment peut-on chanter aussi bien?

Pas un seul instant, sa voix grave de crooner ne sera entachée par tant d'alcool. Car oui, Adam Green est un crooner. Un crooner déglingué mais un crooner, avec une voix et une manière de chanter rappelant celle de Frank Sinatra (le premier gangsta de la musique américaine) ou encore Jim Morrison, Lou Reed ou Joey Ramone qui, eux aussi, étaient maîtres dans l'art subtil de la déglingue. Et il nous le prouvera tout au long d'une set-list proche de la perfection alternant morceaux récents du dernier album (le formidable Buddy Bradley, Breaking Locks, Lockout...) et chansons plus anciennes devenues désormais des classiques de son répertoire (Jessica où il déclare sa flamme à cette gourde de Jessica Simpson, Tropical Island, Friends Of Mine, Bluebirds...) et, bien évidemment, Drugs, ce titre qui lui sied si bien (« I like to do drugs / I like to have drugs / I like to hold a cigarette full of grass in my hand »).

Un concert dont on ne pouvait ressortir qu'avec un sourire béat tant ce garnement virevoltant nous aura émerveillé et amusé. Et si son dernier album se nomme Minor Love, l'amour que l'on peut lui porter, lui, est majeur.

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