Aujourd’hui13 événements

FFF + Bodybeat à l’Aéronef

Des souvenirs plein la tête.

15 octobre 1996. Aéronef. Un concert mémorable. Inoubliable. Ceux qui y étaient en parlent encore. Comme un glorieux souvenir de guerre.

12 mai 2000. Cave Aux Poètes. Une prestation intimiste. En comité restreint. Ceux qui y étaient en parlent encore. Comme un instant privilégié.

07 novembre 2000. Aéronef. Le dernier concert lillois. En demi-teinte. Ceux qui y étaient en parlent encore. Comme un au-revoir raté.

Résurgences d'un passé pas si lointain. Où l'on pouvait s'en griller une sans s'attirer les foudres des agents de sécurité des salles de concert. Où celles-ci sentaient comme un coffee-shop Hollandais. Où aller prendre un verre au bar ne signifiait pas faire la queue deux fois : une fois pour passer commande, une fois pour récupérer la consigne de son gobelet. Où l'on n'était pas gênés par de sinistres péquins ayant la triste manie de tout vouloir filmer avec leur téléphone portable dernier cri pour poster d'irregardables vidéos sur le Net.

Le retour de la Fédération Française de Fonck, un des meilleurs groupes français des années 90, après plus de dix ans de silence, immanquablement fait replonger les anciens fans dans cette époque révolue. D'où une certaine appréhension. L'énergie folle dont faisait preuve le groupe sur scène sera-t-elle intacte ? Le plaisir ressenti sera-t-il le même qu'à l'époque ? Marco et sa bande se reforment-ils pour de bonnes raisons ? Ou juste pour profiter de la nostalgie de son public ? Et engranger quelques pépètes au passage ? C'est donc dans un état d'esprit quelque peu particulier que l'on pénètre dans le ventre de l'Aéronef en ce soir du 19 mars 2014. A la fois joyeux de retrouver de vieux potes perdus de vue mais aussi  quelque peu craintifs.

Un sentiment qui semble défavorable au groupe. Ce n'est pas l'Aéronef des grands soirs d'antan. On est loin d'afficher Sold-Out. Seule la fosse est ouverte. On se prend un coup de vieux. Accentué par le fait que le public est unanimement générationnel. 40 ans de moyenne d'âge. F.F.F. n'a pas réussi à toucher la génération suivante. La soirée prend des allures de réunion d'ancien élèves. 

Pour patienter, les Lillois de Bodybeat. Qui eux aussi jouent la carte du passé. En s'inscrivant dans la pénible liste des artistes oeuvrant on-ne-sait-pas-pourquoi pour un revival 80's. Chant agaçant, refrains poussifs, textures de clavier moches, lignes de basse dignes d'un cours d'Aérobic... Tout y est, malheureusement. De l'électro-pop de taxidermiste. N'ayant pas compris qu'un animal qui était hideux de son vivant ne sera pas beaucoup plus beau une fois empaillé.

21h50. Marco Prince, Yarol Poupaud, Nicolas Baby et Krishoo Monthieux montent enfin sur scène. Accompagnés de deux cuivres et d'un claviériste. La chanson 'Le Pire Et Le Meilleur' met fin au suspens. Plutôt osé de démarrer avec un refrain tel que « Capable du meilleur comme du pire / Mais pour le pire je suis le meilleur ». Mais la Fédération Française de Fonck rassure vite sur son état de santé. Et ses motivations. Les années n'ont eu aucune prise sur les musiciens. La marmite Funk-Rock est toujours aussi bouillante. On décèle bien quelques imperfections dans l'exécution de certains morceaux, le son n'est pas toujours au top... Néanmoins, leur fusion reste toujours aussi musclée et jouissive. Les classiques ('Silver Groover', 'Barbes', 'Mauvais Garçon', 'Niggalize It'..) n'ont pas pris une ride. Marco est toujours une pile électrique, bondissant aux quatre coins de la scène. Yarol démontre une nouvelle fois qu'il est un grand guitariste sous-estimé. Et le groove rythmique de Niktus et Krishoo est aussi imparable que dans le passé. On sent une réelle complicité retrouvée. Une véritable envie d'être là. La reformation n'a rien de malhonnête.

Seulement l'ambiance dans la salle n'est plus aussi incendiaire qu'auparavant. Les guiboles ne sont plus les mêmes. Les comportements sont moins fous-fous. Beaucoup plus sages. Les jumps autrefois continus ne se limitent maintenant qu'aux introductions des chansons. Le besoin de sang neuf se fait ressentir. Les dates prévues cet été dans de multiples festivals permettront sûrement au groupe de rallier une jeunesse pour l'instant cruellement absente.

Nul doute que le poids écrasant de la nostalgie pèse également sur l'atmosphère générale. Se replonger dans ses années lycées ou fac rend forcément pensif. On pense aux années écoulées.  Aux réussites et aux échecs vécus. Aux amis que l'on a perdus. Qui ont disparu. A tout ce qui a fait notre vie depuis. Que ce soit les bonheurs ou les malheurs, petits et grands. La mélancolie empêche de s'immerger pleinement dans le concert. Car on le vit à travers le prisme du passé.

Les retrouvailles avec F.F.F. se vivent en fait comme une relation intime qui reprend après plusieurs années de rupture, de séparation.  On ne peut pas se contenter des anciens automatismes, même s'ils étaient plaisants. On ne peut pas reprendre comme si de rien n'était. Oublier ce que l'on a vécu chacun de son côté. Il faut forcer le naturel. Partir sur de nouvelles bases. Se séduire de nouveau. Se construire de nouveaux souvenirs pour ne pas vivre que sur les précédents.

L'annonce faite au bout de deux heures de concert par Marco Prince que « F.F.F avait bel et bien repris », marquée par l'interprétation d'un très efficace nouveau morceau a heureusement permis de se projeter avec optimisme dans l'avenir. D'imaginer un futur concert qui ne serait pas uniquement placé sous le signe de la nostalgie. Mais sous celui de la nouveauté.

En tout cas, la bande aura réussi le pari de donner envie de refaire un bout de chemin avec elle. Plutôt bon signe.

(A David. J'aurais tant aimé que tu sois là)

 

Revenir aux Live report Concerts
A lire et à voir aussi
181 queries in 0,434 seconds.