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Get Well Soon + David Lemaitre au Grand Mix

Le nom à la sonorité très française de David Lemaître cache un chanteur tout à fait bolivien de sang et tout à fait berlinois de cœur. Jolie surprise liminaire de la soirée, choix idéal de première partie en adéquation avec le son de Get Well Soon. Intimiste, la composition de ce jeune chanteur oscille timidement entre le folk acoustique historique et le folk lo-fi presqu’électro. Vraiment attrayant d’entamer la soirée avec ces envolées parfois lyriques du trio guitare, violon, batterie. Les instruments défileront tout au long de la soirée : violons, claviers, xylophones, la dextérité instrumentale des groupes emportent toujours le cœur du public. C’est qu’on est sûr que les instruments servent les compositions et qu’on ne s’est pas seulement débrouillé avec ce qu’on avait. Le batteur joue de la sonorité mate des mailloches, David aligne les textes subtils et il semble réellement sur la bonne voie pour abandonner peut-être un peu plus franchement ses maîtres tels José Gonsalves ou même une inspiration proche du groupe Beirut. Oui, une voie, et même une voix, bien à lui s’ouvrent sur la route d’un folk minimaliste nourri de loops mais en aucun cas pauvre. Paradoxalement tour à tour timide et à l’aise sur scène, David s’excuse et plaisante de ne pas parler Français. Il souhaite pourtant nous rendre hommage en chantant un titre phare de son E.P, le nostalgique Jacques Cousteau, qui nous console gaîment de son départ de scène et nous laisse penser qu’on reverra un jour ce jeune chanteur, sans doute plus en première partie…

Un bref interlude au bar artistiquement lumineux du Grand Mix, une conversation passionnée avec des fans purs et doux de Get Well Soon et nous embarquons pour la deuxième étape du voyage sonique avec le spleen enchanteur et onirique, cristallin et ciselé, de Konstantin Gropper, musicien allemand de formation classique, leader crooner du groupe pop délicat. Nourri d’influences qui vont manifestement de la musique de film au grand orfèvre de la ballade pop qu’est Scott Walker, il les absorbe pour les dompter et les faire siennes.

Six sur scène, entourés de multiples instruments d’essence parfois étranges, les musiciens ont magnifiquement orchestré l’ensemble, le terme prenant ici tout son sens. Le chanteur sombre et ostensiblement perfectionniste, aux postures intrigantes, laisse une jolie place à sa sœur pour des chœurs sublimes et lyriques qu’elle accompagne volontiers d’un jeu personnel de tambourin, violon ou même de mandoline. Si Konstantin cherche, gentiment agacé, à accorder correctement sa guitare à plusieurs reprises, c’est pour dialoguer en toute justesse avec son homme orchestre qui agrémente parfaitement la sonorité riche du groupe en passant de l’idiophone à la trompette sans sourciller. L’accordage, quand on songe au style arpégé et aérien du groupe, ça ne souffre pas le demi-ton d’écart. Le batteur enchante réellement par un jeu d’une étonnante complexité polyrythmique, aux balais comme à la baguette, et offre à l’envi martèlement musical ou douceur singulière au service de la musique du groupe. Comme souvent lorsqu’on décèle un vrai projet d’ensemble, quand chacun baisse la garde son ego pour servir la musique seule, le groupe est extrêmement cohérent.
La salle étrangement voire injustement à demi remplie s’envole lentement, plane, fascinée, absorbée par les visions cinématographiques proposées. On ne touche plus le sol et on n’a pour une fois pas honte d’adorer Disney… puisque c’est l’un de leurs titres phares. Leur troisième album The Scarlet Beast O' Seven Heads livre ses pépites qui passent brillamment l’épreuve de la scène: le grandiloquent 5 steps 5 words, le poétique Disney, le tubesque Listen! Those Lost At Sea Sing A Song On Christmas Day et en apothéose le surprenant et dansant You Cannot Cast Out The Demons (You Might As Well Dance). Pari risqué que l’approche scénique après une production aussi élaborée, à la densité architecturale des cathédrales sonores les plus acrobatiques. En somme, nous sortons transportés et conquis, charmés par ce groupe protéiforme. Seul le spleen distancié de Konstantin nous oblige à répéter la formule anglo-saxonne pour souhaiter un bon rétablissement : « Get Well Soon ».
 

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