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Saul Williams + Mc Luvin à l’Aéronef

Auteur/poète/comédien/musicien/chanteur, Saul Williams est un personnage insaisissable. Qui ne cesse de se réinventer. Quitte à déstabiliser son public. Intronisé par la voie du Slam (ou plus précisément du Spoken-Word), l'artiste a longtemps véhiculé une image d'intello de la scène Hip-Hop. Et un statut quelque peu élitiste d'artiste engagé. Exprimant ses revendications politiques par la poésie.

Avec 'Volcanic Sunlight', son dernier album, Saul Williams fait table rase du passé. Plus chanteur que slameur. Moins discursif. Moins révolté. Abordant des thèmes plus légers. Il brise le schéma traditionnel de sa musique. Qui devient plus lumineuse, plus chaleureuse. Et l'emmène sur des chemins qu'on ne lui voyait pas forcément emprunter: l'Afro-beat, la Soul, la Funk, la Pop. Un nouveau visage se dessine avec ce disque. Augurant, en ce soir du 18 novembre, d'une nouvelle approche de la scène.

En première partie: Mc Luvin. Formation farfelue dont le nom fait référence à un des personnages du film 'Superbad' de Greg Mottola: un adolescent boutonneux et obsédé sexuel. Trio sur scène, le groupe est en fait un duo composé de Gystère et de Drixxxé (producteur ayant collaboré avec Triptik, La Caution ou les Svinkels).

Les compositions surfent sur la vague Electro-Pop actuelle. A grands renforts de vocodeur. Cela se veut bigarré, léger, dansant et drôle. Mais tourne très vite au gag de mauvais goût qui ne semble jamais se terminer. Tellement sucré que cela en devient indigeste. Un gâteau acheté au supermarché dégoulinant de crème industrielle, bourré de conservateurs chimiques et de colorants. De quoi faire passer la musique de mademoiselle Yelle, pourtant déjà riche en mauvais cholestérol, pour une galette de riz spéciale régime!

Heureusement, le plat de résistance remet tout le monde d'aplomb. Saul Williams est tout simplement impérial. Illuminant instantanément la salle de son charisme naturel. Plein de hargne. Plus show-man que jamais. Même s'il a laissé tomber les ailes d'ange qu'il arborait autrefois ou ne se recouvre plus le corps de paillettes dorées.

Les nouvelles orientations musicales se confirment sur scène. Généralement peu entouré, jouant la carte du minimalisme, Saul Williams, ce soir, est accompagné de quatre musiciens. Un batteur, un guitariste-bassiste, un clavier et un multi-instrumentiste (trombone, percussions, programmation, loops).

En résulte une grande richesse instrumentale. L'artiste alterne des titres anciens aux sonorités underground ('Grippo', 'Convict Colony', 'Surrender') avec des titres plus légers issus du dernier album comme le bien nommé 'Dance' ou 'Explain My Heart'. Le concert navigue ainsi entre ombres et lumières. Un parcours de montagnes russes où l'on passe du punk le plus débridé (le dantesque et pogotesque 'List Of Demands') à un émouvant 'Black Stacey', interprété a cappella.

Qu'il les chante ou qu'il les scande, les mots de Saul Williams agissent à chaque fois comme des coups portés sur un instrument percussif. Il déclame, d'ailleurs, souvent ses textes en martelant un deff, tambour à la forme carrée fréquemment utilisé en Afrique du Nord. Accentuant sa dimension de griot des temps modernes. Le flow est parfait, la cadence soutenue. La voix est utilisée telle un instrument. Les syllabes deviennent des notes. Les mots, des rythmes. Et les phrases, des mélodies. Et nul besoin d'être angliciste pour entrer dans la transe.

Saul Williams vampirisera l'assistance pendant plus d'une heure et demie. Transformant le concert en véritable expérience. Un tourbillon de notes et de mots. Un séisme. Engendré par une personnalité hors du commun. Volcanique et lumineuse.

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