Sebastián Díaz Morales, né en 1975 en Argentine et vivant actuellement à Amsterdam, se définit comme un personnage de fiction. Un homme aux multiples facettes qui se dévoilent successivement en fonction du contexte, de l’heure du jour ou de la nuit. Cette fiction qui l’habite, il la retranscrit dans ses œuvres artistiques, sous formes de vidéos. Du documentaire au court-métrage en passant par le film épique, toutes ses œuvres sont retranscrites à la frontière du réel et de la fiction. C’est là le fil rouge de son exposition « Ficcionario ».
Plusieurs musées et institutions dans le monde exposent ses œuvres, comme le Tate Modern Museum de Londres, Art in General à New York ou le Centre Pompidou de Paris. Mais ayant étudié à l’école des Arts Contemporains du Fresnoy à Tourcoing, c’est tout naturellement qu’il y expose désormais son travail, du 14 février au 25 avril 2015.
La visite, ou plutôt l’invitation au voyage, se passe dans l’obscurité pour une immersion totale. Une lignée de néons bleus nous accompagne dans le couloir sombre qui mène aux œuvres. Les vidéos tournent déjà, dont nous voyons les flashes de lumière ricocher sur les murs. Le couloir se transforme en galerie, dans laquelle les œuvres ont leur espace et leur ambiance définie, même si l’obscurité est partout. Parmi elle, il y a « Lucharemos hasta anular la ley » (« nous lutterons jusqu’à l’annulation de la loi »), un petit documentaire filmé par Sebastián Díaz Morales en 2004, quand les manifestations font rage en Argentine après le vote d’une loi interdisant le travail dans la rue. L’image est filtrée par un effet négatif, qui donne l’impression d’un dessin à la craie sur un tableau noir. Et malgré leurs voix qui résonnent, les visages des manifestants semblent moins menaçants, plus lointains. Entre fiction et réalité.
Le voyage se poursuit, les images s’enchaînent. L’artiste y évoque divers sujets : la violence, le temps, l’absurde, le vétuste. On ne vous dévoile pas tout ici pour vous laisser la surprise... Au milieu de la galerie, entourée d’une construction en bois et presque séparées des autres, se trouve « Suspension », dont on peut avoir un aperçu sur la fiche de l'exposition.
c’est dans son esprit que l’homme forme sa vision du monde et le façonne.
Sebastián Díaz Morales
Sur un grand écran est projetée l’image d’un homme, dont on hésite à dire s’il est en lévitation ou en chute libre, en tout cas d’une extrême lenteur. Une métaphore visuelle où Sebastián Díaz Morales cherche à parler de la réalité à travers le songe : « comme dans un rêve, dans sa chute suspendue, l’esprit de l’homme est un réceptacle qui contient le passé, le présent et l’avenir dans une seule et même conscience. C’est dans cette construction onirique, c’est dans son esprit que l’homme forme sa vision du monde et le façonne. Et là dehors, il n’y a peut-être rien d’autre que le vide. » Entre fiction et réalité. Mais au-delà de l’œuvre en elle-même, son espace est spécialement aménagé. La construction en bois qui l’entoure est munie d’un escalier menant à un balcon, duquel on peut prendre un peu de hauteur sur ces images. Et en se retournant, c’est l’exposition tout entière que l’on peut regarder d'un autre point de vue, un point de vue éloigné du sol et peut-être moins proche du réel.
On se rend compte de l’importance de l’obscurité une fois que l’on retourne à la lumière. Elle efface tout ce qui nous entoure pour ne garder que l’image, comme si elle était de mèche avec la fiction pour nous y plonger. Le retour au grand jour n’en est que plus dur. Mais alors, cette exposition est-elle bien réelle, ou n’est-elle qu’un rêve dans notre esprit ?
"Ficcionario" de Sebastián Díaz Morales au Fresnoy, studio national des arts contemporains
Exposition à découvrir du 14 février au 25 avril 2015
Ouvert du mercredi au dimanche, de 14h à 19h (jusqu'à 20h le vendredi et le samedi)
Tarif plein : 4€ / tarif réduit : 3€ / tarif soirée : 4€
Tarif visite guidée : 40 €, groupe de 10 à 30 pers, 1h. Sur réservation : 03 20 28 38 04 / lmenard@lefresnoy.net
Gratuit pour les moins de 18 ans, les détenteurs de la C'Art et pour tous, chaque dimanche.
