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Suicidal Tendencies + The Inspector Cluzo + General Lee au Métaphone de Oignies

Tout petit Poucet qu'il est, le Métaphone a frappé un violent coup. En programmant ces ogres de Suicidal Tendencies, cette jeune salle de concert ne pouvait rêver mieux pour s'ériger comme un lieu sur lequel il va désormais falloir compter.

Car parmi les formations qui méritent réellement le statut trop galvaudé de groupe culte, la bande de Mike Muir s'impose sans mal. Et sans avoir à user de ses très gros bras. Pour tout individu ayant eu de l'acné pendant les années 80 ou 90, les Suicidal Tendencies sont en effet un symbole. Une institution qui a réussi à fédérer autour d'elle un nombre assez incroyable de fans. Des punks, des métalleux, des skaters, bien évidemment. Mais aussi, en raison de codes vestimentaires hérités des gangs de Los Angeles, des mecs issus de franges beaucoup plus Hip-Hop. Et, par son sens de la fusion musicale, les amateurs de groove qui tache, de funk qui tabasse et de basse qui slappe. A l'image de Public Enemy à la même époque, le combo a su rallier autour de lui un public beaucoup plus large et hétéroclite que celui d'origine.

Si le line-up originel n'est plus, le retour de Mike Muir et de Suicidal Tendencies aux affaires, après une quasi-absence (si on ne compte pas les compilations et quelques rares concerts)  de 13 ans ne pouvait que faire ricaner bêtement de joie toute la génération Beavis And Butthead. Force est de constater que ces deux éternels puceaux ont dû, depuis, enfin perdre leur virginité et causer quelques grossesses. Au milieu des rangs de trentenaires et de quarantenaires venant emplir le Métaphone, on retrouve un certain nombre d'ados qui ne devaient même être en âge de monter sur une planche de skate-board lors du dernier passage lillois du groupe, le 6 juin 2000. Tout cela ne nous rajeunit pas...

Pour lancer les hostilités, alors que la fosse commence seulement à se remplir, les béthunois de General Lee. Nulle velléité sudiste comme pourrait le laisser penser leur nom. Mais avec ses trois guitaristes, le général charge néanmoins comme une cavalerie sanguinaire. Qui ne veut pas laisser de survivants dans le camp adverse. Un son lourd et oppressant au service de mélodies torturées et tortueuses, n'ayant pas peur de s'aventurer sur les chemins de l'expérimentation. De quoi ravir les fans de Post-Core et de groupes comme Neurosis. Et, par le haut niveau de décibels, de  démontrer l'excellente acoustique de la salle.

Surgit ensuite une drôle de bête. Pleine de poils. S'exprimant parfois avec de curieux borborygmes. Du gascon, parait-il. Une bête à deux têtes. Connue sous le nom de The Inspector Cluzo. Un animal débonnaire. Léchouillant suavement le public avec de sensuelles mélopées Funk. Pour mieux l'amadouer. Et révéler, par la suite, sa sauvagerie. Sous ses aspects joviaux, la bestiole rappelle très vite qu'elle a du mordant. Chambrage du public, appel au viol anal de tous les bassistes de la terre, riffs de guitare assassins, punk-attitude, les Inspector Cluzo sont d'indomptables héritiers  du Funk-fusion initié par les Fishbone ou Living Colour.

Il est enfin l'heure de frétiller du bandana. De pogoter. De slammer. D'headbanguer. De faire revivre le stage-diving, le mosh, les circlepits ou autres bravehearts. Le gang de Mike Muir est sur scène. Autour du colosse, les musiciens ont changé. Mais la brutale magie d'antan opère instantanément. Nous ne sommes plus en 2013. Mais 10, 20, 30 ans en arrière. A une époque où les hipsters n'avaient pas encore envahi les salles de concert pour remuer mollement de la tête et afficher l'air grave du mec qui galère à résoudre mentalement une équation mathématique à trois inconnues.

Ce n'est pas un concert. Mais une joyeuse guerre de tranchées. Un pur moment d'adrénaline, de sueur, de rage juvénile et d'anarchie. On monte à plus de soixante sur la scène. Dans les premiers rangs, on organise le chaos. Les plus vieux retrouvent leurs jambes d'adolescents. C'est le bordel. C'est jouissif. Et c'est beau.

 Les Suicidal Tendencies privilégient les classiques (« War Inside My Head », « Institutionalized », « You Can't Bring Me Down »...). Et si les morceaux plus récents ne convainquent pas toujours, impossible de faire la fine bouche. Les nouveaux complices de Mike Muir sont tout simplement  excellents. Perpétuant avec brio tout ce qui faisait la force du groupe. Un sens exceptionnel de la fusion, réussissant à faire le grand écart entre la Trash Music et le groove  de George Clinton. Le Cyco Myko dans tout ça ? Du haut de ses 50 ans passés, juste impérial. La voix toujours aussi assurée. La même hargne. Et, ce qui compte le plus, la même honnêteté artistique et intellectuelle. Sûr que lui, on ne le retrouvera jamais à faire le zazou pour H&M ou Les Galeries Lafayette. Suivez mon regard...

Au bout du compte, « No Bullshit ». Juste du bonheur, rien que du bonheur...

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