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ZZ Top + Thin Lizzy au Zénith de Lille

Le Main Square à quelques encablures. Le Festival de Werchter de l'autre côté de la frontière. Il paraissait financièrement périlleux d'organiser une grosse date au Zénith de Lille en ce 1er juillet 2011. Mais c'était oublier l'engouement que pouvait provoquer un groupe tel que ZZ Top incarnant à lui tout seul plus de 40 ans d'histoire du Rock et du Blues. De véritables légendes vivantes entrainant dans leur sillage un public multi-générationnel. Des spectateurs d'un certain âge sachant tout, tout, tout sur le ZZ et ne se rappelant même plus précisément le nombre de fois où ils ont pu assister à un show des célèbres barbus. Et des plus jeunes, à peine nés lors du précédent passage des Texans dans cette même salle en 1996 pour son inauguration.

Thin Lizzy, groupe de Hard-Rock irlandais

Plus de 5000 personnes sont ainsi venues grossir les rangs de la plus grande salle lilloise. Provoquant une belle cohue et des embouteillages aux alentours proches. C'est donc après avoir péniblement franchi les files d'attente dans le parking et à l'entrée de la salle que l'on pénètre dans l'antre de la bête à 20h15. Mauvaise surprise pour les retardataires malgré eux : Thin Lizzy, groupe de Hard-Rock irlandais mythique ayant influencé, entre autre, Metallica, Def Leppard, Bon Jovi ou les Guns N' Roses, a déjà entamé sa première partie. Mais alors que l'on pense n'avoir raté qu'un ou deux morceaux, on apprend que le groupe a commencé son set à 19h30. Les billets stipulaient pourtant que le spectacle commençait à 20h! Irrespecteux. Et incompréhensible quand on sait que dans la majorité des salles la première partie débute au moins une demi-heure après l'heure annoncée. Faut-il désormais arriver en matinée pour pouvoir avoir une chance de voir le groupe d'ouverture ?

Difficile donc dans ces conditions de pouvoir réellement se faire un avis sur la prestation de Thin Lizzy. D'autant plus que la formation actuelle n'a plus grand chose à voir avec celle des débuts, même si on retrouve le batteur Brian Downey présent depuis la création du groupe (1969) ou le guitariste Scott Gorham et le clavier Darren Wharton, membres depuis le milieu des Seventies. La présence de musiciens additionnels (Ricky Warwick au chant et à la guitare, Richard Fortus à la guitare et Marco Mendoza à la basse) donne en effet la sensation d'être en quelque sorte face à une contre-façon. Impression renforcée par la cruelle absence du membre fondateur et leader du groupe, le charismatique chanteur-bassiste Phil Lynott décédé en 1986. Et si on prend un certain plaisir à entendre en live des classiques tels « The Boys Are Back In Town » ou « Rosalie », le Thin Lizzy actuel n'est ni plus ni moins qu'un simple Cover-Band. Professionnel mais sans âme.

les membres de ZZ Top continuent de s'amuser comme des gamins

Ce qui, évidemment, ne sera pas le cas avec ZZ Top. Le line-up est le même depuis les débuts du trio en 1969 : Billy Gibbons à la guitare et au chant, Dusty Hill à la basse et au chant et Frank Beard à la batterie. Et le groupe sait en quelques instants imposer son univers. Billy et Dusty montent sur scène vêtus de ponchos multicolores rappelant la proximité qu'entretient leur état d'origine, le Texas, avec le Mexique. Un écran géant au-dessus de la scène installe une atmosphère typiquement américaine et virile en diffusant des extraits de vieux westerns, des films d'archives des années 50, des vidéos montrant des courses automobiles ou de camions, des paysages désertiques, de longues routes désolées, de belles auto-stoppeuses et des Pin-Ups. Caricatural ? Aucunement. Car cette imagerie correspond parfaitement à la musique de ZZ Top. Leurs morceaux ont en effet cette force de plonger l'auditeur dans cette Amérique idéalisée, cet ailleurs fantasmé.

Le trio joue d'ailleurs énormément avec ces codes. Et n'hésite pas à en rajouter. Il fait intervenir sur scène des Bunnies Girls, portant de manière très seyante leurs corsets rouges. Elles viennent retirer les ponchos de Dusty et de Billy, apportent à celui-ci son « Blues chapeau » et assument le rôle de Roadies en apportant aux deux barbus leurs instruments. Dont une basse et une guitare entièrement recouvertes de moumoute blanche. A plus de soixante ans, les membres de ZZ Top continuent de s'amuser comme des gamins. Ils esquissent quelques pas de danse chorégraphiés. Et ils ont beau cacher leurs yeux avec des lunettes de soleil, on ne peut s'empêcher de deviner derrière celles-ci un regard profondément malicieux.

Avec leurs gueules de vieux motards, les Texans tiennent encore parfaitement la route sur scène. Aucun dérapage incontrôlé. Aucune sortie de route. Les ZZ Top magnent leurs engins avec dextérité. Au rythme de course. Les morceaux s'enchainent sans que Dusty, Billy et Frank ne posent le pied à terre. La setlist est tout simplement parfaite. Couvrant l'intégralité de la carrière du groupe (« Cheap Sunglasses », « Brown Sugar », « Waiting for the Bus », « La Grange », « Jesus Left chicago », « Gimme Me All Your Lovin' »...). Que des classiques ! Par chance, ils nous épargnent leur « Rough Boy » qui, au plus grand dam de certains fans, reste leur chanson un peu honteuse. A l'image du « In The Army Now » des Status Quo qui ont récemment foulé les mêmes planches.

Les plus jeunes spectateurs découvrent pourquoi Billy Gibbons est considéré comme l'un des plus grands guitaristes de l'histoire du Rock. Jimi Hendrix (à qui un hommage sera rendu avec la reprise de « Hey Joe ») ne cachait pas son admiration pour lui. Et lui avait même offert une Stratocaster ! Fluide, inventif, hargneux tout en restant sensible, privilégiant la mélodie à la technique, son jeu de guitare est unique. Est un langage à lui tout seul. D'ailleurs, en tendant l'oreille, on se rend compte que les trois membres de ZZ Top ne se contentent pas de jouer ensemble. Ils font littéralement dialoguer leurs instruments. Chacun se nourrissant du jeu de l'autre pour mieux lui répondre. L'harmonie est totale. Et le plaisir de jouer intact. Un concert à l'ancienne. D'une redoutable efficacité. Décrassant les oreilles et coulant comme un bon vieux Bourbon.

Encore une fois, la Musique de Papa a donné une leçon magistrale aux jeunes musiciens pensant que le Rock est né avec The Strokes ou Radiohead. Il serait peut-être donc temps que la jeune génération prenne enfin la relève et perpétue ce glorieux héritage...

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