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« Les Deux Amis » : « Plus Belle La Vie » façon Rive Gauche !

Synopsis : Clément, figurant de cinéma, est fou amoureux de Mona, vendeuse dans une sandwicherie de la gare du Nord. Mais Mona a un secret, qui la rend insaisissable. Quand Clément désespère d’obtenir ses faveurs, son seul et meilleur ami, Abel, vient l’aider. Ensemble, les deux amis se lancent dans la conquête de Mona.

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Les Deux Amis © AD Vitam

 

Critique : Il est très rare que nous évoquions un film qui ne nous plaise pas dans la rubrique actu ciné de Lille La Nuit. La plupart du temps, nous préférons écrire sur un long-métrage que nous avons aimé. Mais l’actualité cinématographique étant assez pauvre cette semaine, nous nous rabattons sur le premier long-métrage de l’acteur Louis Garrel, Les Deux Amis. Et on vous prévient, nous n’allons pas être tendres.

Avant de passer à la mise en scène avec deux courts-métrages (Mes Copains, La Règle de Trois) et un moyen-métrage (Petit Tailleur), Louis Garrel a fait l’acteur. Depuis l’âge de six ans dans le cinéma de son père, Philippe Garrel, en passant par des films de son réalisateur fétiche Christophe Honoré et ceux de Valeria Bruni-Tedeschi (Un Château en Italie).

Si nous lui trouvions une présence, un mystère, il aura fallu le sublime Saint Laurent de Bertrand Bonello (plus beau film français de 2014) pour se dire, qu’enfin, Louis Garrel venait de gagner ses galons d’acteur avec sa brûlante incarnation de Jacques de Bascher.

Seulement voilà, si certains comédiens creusent toute la vie le sillon de leur art afin d’atteindre une épure, une vérité, une légèreté, pour d’autres ce n’est pas suffisant. Il leur faut également passer derrière la caméra (c'est assez rarement une franche réussite) ou, plus pompeusement à la mise en scène, comme le précise Louis Garrel au générique final de son film.

Est-ce parce qu’il a réellement des choses à dire, des histoires à raconter et filmer, se sent investi d’une mission quasi divine, que Louis Garrel s'est mis en tête de « faire » du cinéma ?

On a beau se repasser Les Deux Amis en tête, on a beau faire défiler les images de ce très - et trop - long-métrage, on n’est hélas pas certain de pouvoir vous donner une réponse satisfaisante.

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Les Deux Amis © AD Vitam

 

Comme son père, Philippe, Louis Garrel se penche dans Les Deux Amis sur les rapports hommes-femmes - même s'il s'agit avant tout comme son titre l'indique, d'une histoire d'amitié -. Autant dire qu’avec un sujet si vaste, il y a, effectivement, de quoi réaliser des films toute sa vie, une œuvre solide et pertinente.

Mais vraisemblablement, le talent de cinéaste n’est pas génétique. Sinon Danny Huston et Nick Cassavetes auraient signé des chefs-d’œuvre impérissables de l’histoire du 7ème Art, à la hauteur de ceux réalisés par leurs illustres papas.

Avec Louis Garrel, nous sommes encore un cran en dessous. Partant du postulat éculé de deux hommes aimant la même femme (mais pourquoi pas, après tout), le jeune réalisateur nous inflige un film d’un nombrilisme exacerbé et éreintant.

Signé avec Christophe Honoré, le scénario traine sur la longueur (on a l'impression de voir le script d'un court-métrage étiré sur 1h40) et fait preuve d’une telle immaturité qu’il en devient gênant pour le spectateur. Toutes les situations sont lourdes et surlignées au stabilo, alors qu’une telle histoire d’amour et d’amitié réclamait de la légèreté, de la fantaisie, une pincée de drame et de cruauté. Mais n’est pas Truffaut qui veut. Avec Les Deux Amis, nous sommes à des années-lumières de Jules et Jim.

On pourra nous dire que comparaison n'est pas raison et que, décidément, nous ne sommes pas tendres. Nous argumenterons qu’après avoir supporté un film à la mise en scène si pauvre, à l'écriture si relâchée, on a tout de même bien le droit d'écrire sincèrement ce qu’on en pense. En voyant Les Deux Amis, on se dit que Louis Garrel confond décidément un peu trop légèreté et désinvolture. On cherche en vain un point de vue de cinéaste et quelques enjeux dans ce film aux personnages fantoches.

Vincent Macaigne, insupportable, surjoue comme à l’accoutumée son emploie de gentil garçon totalement à côté de la plaque - on aimerait bien qu’un jour il interprète autre chose au cinéma, ça commence à lasser -, Louis Garrel ne se fait certes pas de cadeau avec un personnage désigné comme égoïste. Mais d’une certaine façon, ou d’une façon certaine, voilà bien une astuce pour se mettre au centre de l’échiquier et tirer la couverture à soi.

La seule qui sauve un tant soit peu Les Deux Amis de la débâcle, c’est Golshifteh Farahani. Belle et rebelle, elle impose une jolie présence têtue. Et ce, malgré un personnage d’une lourdeur symbolique assez impressionnante.

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Les Deux Amis © AD Vitam

 

Mais le pompon revient aux dialogues, qui semblent tout droit sortis d’une version Rive Gauche de Plus Belle La Vie. C’est creux. C’est niais. C'est pachydermique. C’est bête à manger du foin. A un tel point qu’on se demande si cela est volontaire ou pas. Quelques jours après la vision du film, on dira pour être gentil que nous n’avons pas encore réussi à trancher.

On peut bien critiquer un certain cinéma américain et sa supposée bêtise, en France quand on décide de s’y mettre, nous sommes les champions du monde ! Certains films comme Babysitting (au secours : le deuxième volet arrive) nivellent par le bas pour faire rire grassement la France entière. D’autres, comme Les Deux Amis qui se placent dans la catégorie "auteurisante" (mais n'en portent que l'étiquette) sont tout autant des produits dénués de chair et d’âme. Du fait, on se demande bien à Lille La Nuit ce qu’il y a de pire : la comédie mercantile, démagogique, stupide et vulgaire ?  Ou le film franco-français aux obsessions prépubères ? Entre les deux, notre cœur balance.

Ce qui est sûr, c'est que ces films font artistiquement beaucoup de mal au cinéma français. Au cinéma tout court ! On n’ira pas jusqu’à souhaiter à Louis Garrel d'arrêter de faire le metteur en scène (puisque, encore une fois, il se considère ainsi). Mais on souhaite franchement que ses films futurs gagnent en maturité, intelligence et élégance. Après tout, avec le cinéma, tous les espoirs sont permis…

Les Deux Amis Réalisateur : Louis Garrel Auteur – Scénariste : Louis Garrel, Christophe Honoré Avec Mona: Golshifteh Farahani Clément: Vincent Macaigne Abel: Louis Garrel Musique: Philippe Sarde (compositeur de génie, qu'on est heureux de retrouver au générique d'un film) Sortie le 23 septembre - Durée: 1h40.

Film-Annonce et Affiche © ADVitam

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