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« Frères Ennemis » : En vidéo, un grand polar de David Oelhoffen avec Reda Kateb, Matthias Schoenaerts et Fianso

Une fois n’est pas coutume l’Actu Ciné de Lille La Nuit vous propose d’aborder une sortie vidéo avec Frères Ennemis, le film de David Oelhoffen. Resté trop peu de temps à l’affiche, ce polar réaliste, remarquablement écrit et réalisé n’a pas connu le succès qu’il méritait. Il est temps de réparer cette injustice en découvrant ce film interprété par Matthias Schoenaerts, Reda Kateb et un convaincant Sofiane « Fianso » Zermani.

Frères Ennemis de David Oelhoffen : Flic (Reda Kateb) et voyou (Matthias Schoenaerts).

Le réalisateur David Oelhoffen

David Oelhoffen est l’un des nouveaux cinéastes français les plus intéressants du moment. Il avait surpris avec son premier long-métrage, Loin des Hommes, interprété par Viggo Mortensen et Reda Kateb. Loin des Hommes, adapté d’une nouvelle d’Albert Camus, est un film d’aventures profond, parfois contemplatif, impressionnant de maîtrise technique et remarquablement écrit.

Il faut dire que David Oelhoffen est un excellent scénariste. On lui doit les scripts de L’Affaire SK1, sur la traque de Guy Georges, le tueur de l’Est parisien, et plus récemment Sauver ou Périr. Deux films réalisés par son complice Frédéric Tellier.

On saisit en voyant ses films que David Oelhoffen aime traiter d'univers complexes, durs. Aborde des « mondes d’hommes ». Sans pour autant sacrifier les personnages féminins.

Frères Ennemis de David Oelhoffen : Le réalisateur et Matthias Schoenaerts sur le tournage.

Sujet classique mais regard de cinéaste

Pour Frères Ennemis, Oelhoffen raconte une histoire qui, sur le papier, peu sembler classique, pour ne pas dire banale. C’est mal connaître le bonhomme. Il est vrai que le cinéaste filme des univers maintes fois traités au cinéma, dans les séries et le roman noir. Nous retrouvons des voyous et des flics qui s’opposent. Nous découvrons Manuel (Matthias Schoenaerts) et Driss (Reda Kateb), anciens copains d’enfance, devenus, pour l’un trafiquant de drogue, pour l’autre flic. L’argument et les figures sont connus. Mais David Oelhoffen étonne, impressionne, par le traitement cinématographique, sa mise en scène, son regard, sa capacité à jouer avec les codes du polar.

direction d'acteurs

Il n’y a pas à tortiller, Oelhoffen est un vrai directeur d’acteurs. Matthias Schoenaerts autant que Reda Kateb se mettent au niveau des meilleurs acteurs américains du genre. Ou de comédiens français de légende. Schoenaerts et Kateb rivalisent d’intensité, permettent à leurs personnages de se déployer et font monter une tension qui va crescendo. Les personnages secondaires ne sont pas sacrifiés : le rappeur Sofiane est très convaincant pour son premier rôle à l’écran, tandis que Sabrina Ouazani, impose une présence féminine entêtante. Marc Barbé est tout aussi remarquable. Quand on caste ce grand acteur, trop méconnu, c'est qu'on connaît les comédiens.

Frères Ennemis de David Oelhoffen : Sofiane Zermani étonne dans le rôle de Fouad.

le Décor comme personnage

Ce qui impressionne le plus dans Frères Ennemis, c’est la façon dont Oelhoffen « gère », met en place la géographie de son film. Oui, l'action se passe en banlieue. Oui, elle se passe dans les quartiers. Mais on parie que vous n'avez jamais vu les barres d’immeubles, parkings, filmés de cette façon. Il faut remonter à La Haine de Kassovitz, et plus loin encore au génial Le Choix des Armes d’Alain Corneau, pour retrouver un tel souci du détail, un refus du schématisme et des clichés attendus.

Les ciels sont bas, lourds, et menaçants. Le décor est un personnage à part entière de Frères Ennemis. Ce polar prend la dimension mythologique d’un western (déjà présente dans Loin des Hommes). Pour autant, le film ne s’affranchit pas du réalisme. Oelhoffen ne cherche pas l’action coûte que coûte. Ce qui l’intéresse est de faire vivre des personnages qui, quelque soit le bord auquel ils appartiennent, ne sont pas motivés par un psychologisme de bazar. Le déterminisme social existe forcément (le renier serait une aberration), mais il n’est jamais une excuse.

Frères Ennemis de David Oelhoffen : Axes de caméras, lumière, découpage des plans, sont méticuleusement agencés.

Réinventer le genre

Frères Ennemis emporte par sa mise en scène tendue comme un arc. Oelhoffen filme des visages, des regards, des voyous et des flics qui se jaugent. Quand la violence graphique éclate, et de manière parcimonieuse, elle est une libération pour le spectateur. Axes de caméras, lumière, découpage des plans, montage, sont méticuleusement agencés. Il y a chez Oelhoffen une volonté de réinventer les genres auxquels il s’attache. Surtout, il respecte, aime chacun de ses personnages. Le regard porté sur la communauté maghrébine, d'une grande justesse, est débarrassé de ce pseudo paternalisme post-colonial qu'on ne souffre plus de voir dans le cinéma français.

Frères Ennemis redonne foi en un cinéma de genre hexagonal. Adulte, intelligent, racé, jamais complaisant dans sa noirceur, Frères Ennemis est un superbe polar. Le film est sorti en vidéo. Il vous appartient désormais de lui offrir la chance qu'il mérite.

Les infos sur Frères Ennemis

Synopsis : Manuel et Driss ont grandi comme deux frères inséparables dans la même cité. Mais aujourd’hui tout les oppose. Manuel est à la tête d’un trafic de drogue, alors que Driss est devenu flic. Quand celui-ci est promu aux Stups, son retour bouleverse les équilibres et met Manuel en danger.

Frères ennemis de David Oelhoffen
Scénario : David Oelhoffen, Jeanne Aptekman
Avec : Matthias Schoenaerts, Reda Kateb

Durée : 111 minutes
Actuellement en DVD et Blu-ray chez M6 Vidéo

Affiche, photos et film-annonce © Bac Films

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