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Keeper : Coup de cœur pour un film sur ces ados qui deviennent parents

Synopsis : Maxime et Mélanie, 15 ans, à peine sortis de l'enfance, sont amoureux. Un jour, Mélanie découvre qu'elle est enceinte. Maxime veut garder l'enfant à tout prix.

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Kacey Mottet Klein et Galatéa Bellugi : les jeunes acteurs merveilleux de Keeper

Critique : Décidément, le cinéma belge est l’un des plus vivaces actuellement. Nous avons parlé il y a quelques semaines des excellents Préjudice et Belgica. Avec un peu de chance, vous pouvez encore les trouver à l’affiche de quelques salles de la région. Cette semaine déboule un autre film belge coproduit avec la France et la Suisse. Keeper - auréolé de nombreux prix dans plusieurs Festivals* -  est le premier long-métrage d’un jeune cinéaste :  Guillaume Senez.

Avant de s’attaquer à ce premier film en format long, Senez a réalisé trois courts-métrages. Nous avons eu le plaisir de le rencontrer à Lille. La première question qui nous taraudait était de savoir si, en terme d’énergie, Guillaume Senez avait senti une grosse différence entre la réalisation de ses courts et de son premier long, Keeper.

Guillaume Senez : « Moi je fais toujours un film en me disant « Il va me servir à en faire un autre derrière ». C’est ma seule ambition : continuer à pouvoir faire mon métier. J’ai toujours fonctionné comme ça. Et donc j’ai toujours donné mon maximum. Et à chaque fois, énormément d’énergie. Il n’y a pas tellement de différences d’un passage du court au long. A part le fait ce que ce soit plus long. Et encore, le montage prend beaucoup de temps. Tout prend beaucoup de temps même en court-métrage. Mais ça ne demande pas beaucoup plus d’implication parce que j’étais à fond dans tous les autres projets. La grosse différence, ce sont les enjeux financiers (…). Et c’est là que ça a été particulièrement difficile. Particulièrement en France. (…). Là, ça a été très compliqué. C’est pour cela qu’on a dû aller en Suisse pour aller chercher l’argent qu’on n’avait pas eu en France ».

Le sujet de Keeper faisait-il peur ? Y-a-t-il un « tabou » à aborder au cinéma l’histoire de jeunes gens âgés de quinze ans qui vont avoir un enfant ? La question mérite d’être posée. Alors que ce sujet est de plus en plus traité dans les médias - reportages, articles, témoignages - on peut se demander si l’histoire que voulait raconter Guillaume Senez faisait peur. Il est vrai aussi que Keeper a un sujet certainement moins « bankable » que le dernier Kev Adams.

Heureusement, le film existe. Heureusement car il est beau. Keeper aborde avec pudeur l’amour, la sexualité (pas de scènes « déplacées », le film est soft), le fait de garder ou non un enfant lorsque l’on est encore enfant soi-même. La réaction des parents lorsqu’ils apprennent cette nouvelle.

Keeper pourrait être tire-larmes, socialisant, impudique. Il n’en est rien. Le réalisateur est toujours à la bonne distance, fait vivre ses personnages, leur laisse des respirations, prend le temps de développer son histoire, sans jamais que le film ne soit ennuyeux.

Surtout, Senez n’est jamais dans le jugement. Il raconte une histoire plus banale qu’on ne le pense. Mais son film, banal, ne l’est jamais.

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Guillaume Senez à la barre de son premier long-métrage : Keeper


Et ce, en grande partie grâce aux deux acteurs de Keeper : Kacey Mottet Klein - qui interprète Maxime - et Galatéa Bellugi - qui interprète Mélanie -.
Ils sont d’un naturel confondant et font beaucoup pour le film. Leurs regards, leurs gestes d’amour, leurs mots : tout sonne juste. A tel point que Keeper, qui ose un cinéma « naturaliste », bouleverse à plusieurs reprises.

Il est étonnant de voir à quel point ces jeunes acteurs - qui n’en sont pas à leur premier rôle - jouent leurs personnages comme si leur vie en dépendait. C’est du moins l’impression que l’on ressent en regardant Keeper. Ils donnent tout. Ils incarnent. Et c’est magnifique.

Mais pourquoi les avoir choisis ? Comment Guillaume Senez a-t-il eu l’intuition que les deux acteurs de son film, c’était eux ?

Guillaume Senez : « J’ai vu Kacey et en terme de jeu, il était vraiment hallucinant. Mais au-delà d’un comédien, il fallait vraiment que je trouve un couple ! C’était la difficulté ! Et en fait, Galatéa - je ne savais pas qu’elle avait déjà fait des films avant - est arrivée avec toute sa timidité, sa fragilité. Elle proposait un peu l’inverse de ce que Kacey amenait avec son charisme qui lui est propre. Bien dans son corps, bien dans ses pompes. Et voilà : on dit que les contraires s’attirent et c’est un peu cela qui s’est passé ».

Mais si Keeper fonctionne grâce aux acteurs, à leur liberté de jeu, à la mise en scène toute en nuance de Guillaume Senez, il ne faut pas oublier qu’il « tient » également grâce à un script bien charpenté.

La force du film est de ne pas se « focaliser » uniquement sur l’événement que représente cette future naissance. Senez fait exister les parents, donne corps aux évènements périphériques de la vie de ses jeunes personnages. A titre d’exemple : il montre aussi le rêve que représente la possibilité pour Maxime d’être sélectionné par un club de foot, d’y faire un stage d’une semaine qui décidera, peut-être, de son avenir de sportif professionnel.

Ainsi, il développe son histoire de la plus belle des façons, la rend vivante, crédible. Cette future naissance va-t-elle avoir des répercussions sur le projet professionnel du jeune homme ? Quel regard porte Mélanie sur cet éventuel engagement de Maxime ? Risque-t-il de l’éloigner d’elle à un moment crucial de leur jeune existence de couple ? Tous ces détails, émotions, questionnements - retranscrits parfois par un simple regard ou un court dialogue - font que le film « existe ».

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Keeper : Comment affronter la naissance d'un enfant quand on est un ado qui doit construire son avenir pro ?


Bien que nourri des recherches personnelles du réalisateur, Keeper n’en oublie pas pour autant d’être du CINÉMA.
Oui, encore une fois, le film s’inscrit dans une veine "naturaliste". Cela ne veut absolument pas dire que l’on regarde un reportage sur la grossesse précoce d’une jeune femme. On peut dire que Keeper, plus qu’un film social est un beau mélodrame. L’emploi du format Scope joue un rôle important car il permet de déployer sur l’écran toute l’énergie des personnages et la palette de leurs sentiments.

La musique  - assez discrète dans le film - joue pourtant un rôle essentiel. Nous ne sommes pas prêts d’oublier cette belle reprise de Wonderful Life du chanteur Black - disparu récemment - par Smith & Burrows. Elle apporte presque un ton ironique par rapport au sujet du film. Evidemment, la musique est importante pour Lille La nuit. Quand un réalisateur l’utilise aussi bien dans un film, nous avons forcément envie de lui demander quel rôle cette dernière incarne dans son cinéma.

Guillaume Senez : « Les musiques, je les vois plus comme des respirations. Ce sont des moments charnières du passage d’un acte à un autre. Moi, j’adore la musique dans les films mais je n’avais jamais vraiment réussi à en mettre (…). Je me suis toujours posé la question : « Quand cela devient une facilité ? Quand cela sublime ce que l’on montre ? Est-ce que c’est fausser l’émotion ? » J’ai jamais été à l’aise avec ça. (…) Mais là, on s’est vite rendu compte au montage que c’était trop brut. On n’avait plus de matière pour faire ces petits moments de respirations, petits moments de flottements dont on a besoin. Et là, on s’est dit « Essayons ! Essayons ! ». Là, j’ai pris mon téléphone. On a branché dans la machine. « Alors ? Qu’est-ce que j’ai ? Tiens, on essaie ça, on essaie ça ! » Et en fait, ça a marché ! Ca a marché. On en avait besoin. Tout simplement. »

Keeper, c’est du cinéma comme on l’aime : intéressant, émouvant, vivant ! Guillaume Senez s’adresse à toutes les générations, mais a le bon goût de filmer des ados intelligents et sensibles. Il  balaie ces clichés dans lesquels se fourvoient de nombreux films racoleurs s’adressant prétendument à la jeunesse ! Vous l’avez compris : Keeper est notre film coup de cœur de la semaine. On parie qu'il sera bientôt le vôtre !

* Festival Premiers Plans 2016 - Grand Prix du Jury, Festival du Film de Turin - Grand Prix, Festival du Festival du Premier Film d'Annonay - Prix Spécial du Jury, Festival du Film Francophone de Namur - Prix de la Critique, Festival du Film de Hambourg - Young Talent Award, Festival du Film français d'Helvétie - Prix du Jury Jeune, Festival International du Film de Marrakech 2015 - Prix du Jury et Prix d'interprétation féminine pour Galatea Bellugi

KEEPER un film de Guillaume Senez
Scénario David Lambert, Guillaume Senez
Avec Kacey Mottet Klein, Galatea Bellugi, Catherine Salée, Laetitia Dosch, Sam Louwyck
Images : Denis Jutzeler
Montage : Julie Brenta
Durée : 1h35
Sortie : le 23 mars 2016

Affiche, film-annonce et photos © Happiness Distribution

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