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« L’amour est un crime parfait » : thriller délicieusement pervers

Synopsis : Professeur de littérature a l'université de Lausanne, Marc à la réputation de collectionner les aventures amoureuses avec ses étudiantes. Quelques jours après la disparition de la plus brillante d'entre elles qui était sa dernière conquête, il rencontre Anna qui cherche à en savoir plus sur sa belle fille disparue ...

© Gaumont Distribution

Critique : Cette semaine, Lille la Nuit vous propose de découvrir L’Amour est un crime Parfait, le dernier film de Arnaud et Jean-Marie Larrieu.
Les Larrieu sont un peu à part dans le paysage cinématographique français. C’est simple, on adore ce qu’ils font ou on déteste. Mais une chose est sûre : leur cinéma ne peut laisser indifférent. C’est déjà un bon point quand on voit le nombre de films insipides, incolores, inodores qui débarquent chaque semaine sur nos écrans.
Autre bon point pour les frères Larrieu : ils maitrisent beaucoup de choses. Ils ont commencé par réaliser de nombreux courts-métrages (excellente école), qu’ils montaient. Et dont ils signaient également la photographie.
Arnaud et Jean-Marie Larrieu ont un véritable univers qu’ils déclinent dans leur filmographie (Un Homme, Un vrai, Peindre ou faire l’amour, Le Voyage aux Pyrénées, Les Derniers jours du monde, … ) Avec L’Amour est un crime parfait, ils adaptent un roman récent de Philippe Djian (auteur déjà adapté par Jean-Jacques Beinex avec 37°2 le matin), Incidences, paru chez Gallimard en 2010.

Le film est né dans la douleur. Lors de leur récent passage à Lille, les Larrieu ont avoué que leur première version du scénario avait été refusée par toutes les commissions et chaines de télévision. Pourtant, d’après eux (et on est bien tenté de les croire), ce premier scénario de l’Amour est un crime parfait était très travaillé. Faut-il y voir une nouvelle preuve de la frilosité des décideurs lorsqu’ils se trouvent confrontés à un sujet sortant des sentiers battus, à des auteurs ayant une signature singulière, à un cinéma qui refuse les facilités ? Les Larrieu ont-il failli connaître le même sort que François Dupeyron avec son film Mon âme par toi Guérie ? C’est bien possible.
Toujours est-il qu’ils ont mis un an pour faire produire leur film. Se demandant même s’ils allaient un jour pouvoir repasser derrière la caméra.

Arnaud et Jean-Marie Larrieu à Lille le 7 janvier dernier-Photo © Alexandre Marouzé.

Heureusement, la Gaumont a su leur faire confiance. Leur demandant juste de réunir un beau casting pour que le film ait les « reins » assez solides. Vœu exaucé puisqu’on retrouve dans L’Amour est un crime parfait une distribution quatre étoiles : Mathieu Amalric (acteur fétiche des cinéastes), Karin Viard, Maïwenn, Denis Podalydès et Sara Forestier.
Les réalisateurs ont surtout l’intelligence de signer leur film le plus abordable et grand public sans pour autant renier leur personnalité.

L’amour est un crime parfait est un véritable film noir. Un thriller amoureux (ou romantique, comme on veut) qui sait prendre des chemins de traverse. Voilà un film bien difficile à cataloguer. Qui ne ressemble à aucun autre. Dans une certaine mesure, on pense au cinéma de Chabrol, Hitchcock, Lynch, … Mais on n’est absolument jamais dans un film franco-français petit bourgeois. Même si les réalisateurs prennent un malin plaisir à jouer avec tous les clichés du genre. Avec eux, il faut se méfier des apparences. Et pour que les choses soient claires, ils n’hésitent pas à insérer dans leur film un extrait de L’Âge d’Or, le manifeste surréaliste de Luis Buñuel et Salvador Dali. Histoire de nous dire que non, décidément, ils ne nagent pas dans les mêmes eaux que leurs petits camarades.
Marc (Mathieu Amalric) vit avec Marianne (Karin Viard). On assiste à la déliquescence de leur couple (presque comme dans un film de Philippe Garrel). Sont-ils mari et femme ? Non ! Ils sont frères et sœurs. Et vivent une relation quasi incestueuse.

© Gaumont Distribution

Le genre de détail qui met un peu mal à l’aise et qui en même temps vous réjouit tant on se dit que si les cinéastes assument une telle situation scénaristique, ils vont aller jusqu’au bout de leur délire. Ce qu’ils font !
Avec un sens du cadre impressionnant (les Larrieu ne font pourtant jamais de découpage technique), une mise en scène au cordeau, une photo qui rend justice aux superbes paysages enneigés du film, un rythme faussement nonchalant, ils nous embarquent dans leur univers.

On passe du polar, au drame. De la comédie au thriller. De l’étude de mœurs au fantastique grâce à des ambiances très travaillées.

Le scénario est habilement tricoté. Les dialogues sont excellemment bien écrits. C'est de la dentelle. Aucun détail n’est laissé de côté pour manipuler le spectateur. Nous devenons les témoins amusés d’une histoire criminelle bien perverse. Les acteurs sont au diapason : Amalric est génial ! Il faut  le voir en intello dragueur de pacotille, s’en prendre plein la tronche du début à la fin du métrage comme le coyote des cartoons de la Warner. Il semble constamment ahuri (vu ce qui lui arrive, on ne le serait pas moins). Plus il essaie de s’extirper de situations cataclysmiques, d’avoir prise sur les choses, moins il s’en sort. Il est constamment le jouet de femmes qu’il ne comprend pas. Et c’est à mourir de rire.

On retrouve les figures classiques des femmes fatales du cinéma américain. Karin Viard semble sortir d’un film d’Otto Preminger. Anna, la brune (Maïwenn) manipule bien son monde. Annie, la blonde (Sara Forestier) frôle la nymphomanie et n’hésite pas à envoyer des hommes de main quand elle n’obtient pas ce qu’elle désire sexuellement. Ces femmes sont des anges noirs.

© Gaumont Distribution

Le seul qui paraisse à peu près normal (et encore) dans L’amour est un crime parfait, c’est Richard (Denis Podalydes). Problème : Il est d’une médiocrité et d’une banalité affligeantes. Ce qui en fait dans son genre, un exemplaire assez remarquable du genre humain.
Nous regardons ce petit monde comme un entomologiste étudie des insectes. Les Larrieu ont bien retenu la leçon d’Hitchcock et font des spectateurs de sacrés petits voyeurs (pléonasme).
Un dernier mot sur la musique du film. On a le plaisir de retrouver Christophe, accompagné du trompettiste Erik Truffaz. Le groupe Caravaggio signe une bande son à l’atmosphère trouble.
Si vous aimez les OFNI (objets filmiques non identifiés), voilà du cinéma qui devrait vous stimuler.

Affiche et film-annonce © Gaumont Distribution

Rétrospectives et horaires Plan-Séquence.

Hommage à Eric Rohmer au Majestic de Lille.

Avant-premières avec équipes de films:

FISTON En présence de Kev Adams et Franck Dubosc:

UGC Villeneuve d'Ascq-Lundi 20/01 20H15

Kinepolis Lomme- Lundi 20/01 - 20:15- 21:15

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