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« Mister Babadook »: Le grand film d’épouvante de cet été !

Synopsis : Depuis la mort brutale de son mari, Amelia lutte pour ramener à la raison son fils de 6 ans, Samuel, devenu complètement incontrôlable et qu’elle n’arrive pas à aimer. Quand un livre de contes intitulé ‘Mister Babadook’ se retrouve mystérieusement dans leur maison, Samuel est convaincu que le ‘Babadook’ est la créature qui hante ses cauchemars. Ses visions prennent alors une tournure démesurée, il devient de plus en plus imprévisible et violent. Amelia commence peu à peu à sentir une présence malveillante autour d’elle et réalise que les avertissements de Samuel ne sont peut-être pas que des hallucinations...

© Wild Bunch Distribution

© Wild Bunch Distribution

 

Critique : Il est enfin de retour le grand cinéma fantastique australien, avec la sortie de Mister Babadook. Certes, il serait exagéré de dire que ce pays de l’hémisphère sud n’a pas livré de belles réussites dans le domaine, ces dernières années -Wolf Creek pour ne citer qu’un seul exemple- mais aucun de ces films n’offrait les regards singuliers d’œuvres comme Pique-Nique à Hanging Rock, Long Weekend (1ère version), la série des Mad Max ou encore Razorback. Pour résumer, des films qui ont émerveillé tout amateur du genre, nés dans les décennies 70 et 80.

Et puis il y a quelques semaines, le critique ciné de Lille La Nuit arrive peinard à la vision-presse de Mister Babadook. Il est neuf heures du mat et l’impatience commence à se faire sentir car le film de Jennifer Kent est précédé d’une belle réputation. Il a été présenté à Sundance (festival du cinéma indépendant créé par Robert Redford) et a raflé plusieurs prix au Festival de Gérardmer. Mister Babadook sera-t-il à la hauteur des premiers échos ou ne sera-t-il qu’un pétard mouillé ? 1h34 plus tard, nous avons la réponse : le film est une bombe ! Car Mister Babadook émeut, bouleverse, stresse, crispe et surtout : fait peur !

Alors que le genre fantastique peine depuis quelques temps à se renouveler, et c’est un grand amateur du genre qui vous dit ça -qui aime bien, châtie bien-, il est réconfortant de découvrir un premier long-métrage qui vous prenne autant aux tripes. Jennifer Kent a d’abord été actrice avant de réaliser son premier court-métrage, Monster. Son premier long, Mister Babadook, révèle un véritable tempérament de cinéaste. Son film, loin d’être une simple petite sensation estivale, risque bien de s’imposer comme un futur classique.

Et s'il est vrai que les histoires de croque-mitaines sont légion dans le cinéma fantastique et d’épouvante (Les Griffes de la Nuit, Candyman...) , du moins Jennifer Kent réussi-elle l’exploit de nous donner l’impression d’en découvrir une pour la première fois. Alors, comment la réalisatrice s'y est-elle prise pour accomplir ce petit miracle ? Tout d’abord en imposant des personnages forts, interprétés par des acteurs exceptionnels. Essie Davis (une amie de longue date de Jennifer Kent) impressionne dans le rôle d’Amelia, une mère fragile qui va peu à peu basculer dans la démence. Il y a longtemps que la folie n'avait été incarnée de façon aussi crédible au cinéma. C’est simple, Amelia, glace les sangs autant qu’elle émeut.

 © Wild Bunch Distribution

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Face à elle, on découvre un jeune acteur, Noah Wiseman dans le rôle de son fils, Samuel. Noah Wiseman était âgé de six ans à l’époque du tournage et ce qu’il donne à l’écran tient de la performance. A l'opposé des pénibles petits singes-savants qu'on ne souffre plus de voir sur les écrans, Noah Wiseman apporte une vraie densité à son personnage d'enfant en souffrance. Croyez-nous, on risque bien d’entendre reparler de lui, si les grands méchants loups du cinéma ne le dévorent pas tout cru.

Ce qui étonne aussi, c'est que le politiquement correct n’a pas eu prise sur Mister Babadook : un exploit que nous tenons absolument à signaler ! Il est devenu impensable de filmer aujourd’hui une mère qui s’en prenne à son enfant. Jennifer Kent ose filmer ce tabou. Même si Amelia n'en est absolument pas responsable (nous n'en dirons pas davantage car à Lille La Nuit, nous ne délivrons pas de spoilers). Saluons le courage et l’intelligence de la productrice d’avoir respecté la vision qu’avait Jennifer Kent de son film. Voilà du cinéma d’une grande probité artistique et intellectuelle.

L’un des autres points forts de Mister Babadook, c’est bien évidemment le traitement de l’histoire. Car si le sujet n’est pas d’une folle nouveauté, Jennifer Kent a l’intelligence de traiter son récit de la manière la plus adulte qui soit, au premier degré et sans ironie mal placée. Notre lecture du film nous a été confirmée lors de notre rencontre avec l'adorable Jennifer Kent, venue à Lille défendre Mister Babadook face à la presse et au public.

 Jennifer Kent à Lille le 3 juillet dernier Photo © Alexandre Marouzé-AMview

Jennifer Kent à Lille le 3 juillet dernier-Photo © Alexandre Marouzé-AMview

 

Voilà une réalisatrice qui aime sincèrement l’épouvante, l’horreur et le fantastique. Il s’agit d’une véritable cinéphile - tous les réalisateurs ne le sont pas- qui défend amoureusement le genre au point de mettre dans son film des extraits de différents classiques issus du cinéma français (Georges Méliès), de l'expressionnisme allemand ou des grandes heures du cinéma du fantastique italien (Les Trois Visages de la Peur de Mario Bava). Ce qui confirme que nous sommes bel et bien face à une réalisatrice des plus prometteuse, c’est que toutes les influences présentes dans Mister Babadook ne demeurent pas de simples références stériles. Bien sûr, lorsqu’on est cinéphile, on repère les hommages -parfois inconscients- à Polanski (Le Locataire, notamment, que la réalisatrice vénère) ou d’autres cinéastes, présents dans le film. Mais Jennifer Kent a su digérer les classiques de ses illustres prédécesseurs pour se forger un style personnel bien à elle. C’est la marque des plus grands.

Jennifer Kent ne craint pas de développer la psychologie de ses personnages (sans pour autant tomber dans le psychologisme), s’appuie sur une mise en scène et un découpage élégants, utilise brillamment l’espace de la maison qu’elle filme -au point de réussir à en faire un protagoniste de Mister Babadook à part entière-, fait appel à un design sonore subtil pour faire naître l’effroi. Elle ne fait pas comme certains imposteurs du mauvais cinéma fantastique qui multiplient les effets de type jump scares* dans leurs films tant ils se montrent incapables de faire naître la peur. Au contraire, Jennifer Kent mise sur l’intelligence du public, livre un film profondément adulte, ne prend pas les amateurs de fantastique pour des adolescents boutonneux attardés (même si tous les adolescents boutonneux ne le sont pas, attardés).

 © Wild Bunch Distribution

© Wild Bunch Distribution

 

Dernier atout : la photographie du film, quasi monochrome, qui est pour beaucoup dans la réussite du film. On la doit à l’excellent chef opérateur polonais Radek Ladczuk. Son travail est si impressionnant qu’il aurait été criminel de ne pas le citer. Mister Babadook est dans les salles dès cette semaine. Voilà une belle occasion de s’épargner la lourde chaleur estivale durant deux petites heures avec ce film qui vous glacera délicieusement les sangs.

Mister Babadook (Babadook) : Un film de Jennifer Kent Avec Essie Davis, Noah Wiseman...  Durée : 94min Sortie : 30 juillet INTERDIT AUX - DE 12 ANS Sélection Officielle - Festival de Sundance - Festival de Gérardmer : Prix du Jury, Prix du Public, Prix de la Critique, Prix du Jury Jeune

* Procédés utilisés dans les films d’horreur, fantastiques ou d’épouvante dans le but de faire sursauter les spectateurs (bruit ou ombre passant devant la caméra, par exemple).

- Rétrospectives et horaires Plan-Séquence.

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