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Au Nom de ma fille : Quand le cinéma retrace les trente ans du combat d’un homme !

Synopsis : Un jour de juillet 1982, André Bamberski apprend la mort de sa fille Kalinka. Elle avait 14 ans et passait ses vacances en Allemagne auprès de sa mère et de son beau-père le docteur Krombach. Rapidement, les circonstances de sa mort paraissent suspectes. L'attitude de Dieter Krombach ainsi qu'une autopsie troublante laissent beaucoup de questions sans réponse. Très vite convaincu de la culpabilité de Krombach, André Bamberski se lance dans un combat pour le confondre. Un combat de 27 ans qui deviendra l'unique obsession de sa vie...

Au nom de ma fille

Au nom de ma fille : On n’avait pas vu Daniel Auteuil aussi bon au cinéma depuis des lustres.

Critique : Cette semaine, c’est un drame - pour ne pas dire une tragédie - que nous avons choisi d’aborder dans l’actu ciné de Lille La Nuit. Inspiré d’un fait divers qui a défrayé la chronique, Au Nom de ma Fille est le quatrième long-métrage de Vincent Garenq. On aime bien ce réalisateur car il fait partie des rares cinéastes français à s’emparer d’histoires récentes pour les porter à l’écran. Il a surtout le courage - il en faut quand on voit à quel point certains sujets font peur aux producteurs et chaines de TV coproductrices - de s’attaquer aux dysfonctionnements de notre société.

C’était déjà le cas dès son premier long-métrage Comme les Autres qui abordait en 2008 le désir de paternité de deux homosexuels. En 2011, avec Présumé Coupable, Garenq s’attaqua carrément  à la justice française en retraçant la sinistre affaire d’Outreau et le combat d'un homme pour faire reconnaître son innocence.

L’année dernière, avec L’Enquête, Vincent Garenq va encore plus loin en racontant au cinéma le cauchemar vécu par Denis Robert pour faire éclater le scandale de l’affaire Clearstream. Réalisé comme un thriller, L’Enquête est un film que nous vous recommandons car, en plus d’être d’une grande efficacité, on en sort en ayant tout compris d’une affaire nébuleuse, que les médias n’ont pas aidé à rendre lisible. Raconter la labyrinthique affaire Clearstream tenait de l’exploit - bravo au coscénariste Stéphane Cabel, nommé pour ce film avec Garenq au César de la meilleure adaptation -.

En traitant ces sujets brulants, Vincent Garenq rappelle d'une certaine façon ces grands réalisateurs américains des seventies comme Sidney Lumet ou Alan J. Pakula qui ne craignaient pas de se confronter à des sujets politiques chauds bouillants. Si on s’en tient à la France, Garenq prend la relève de réalisateurs comme André Cayatte - oh combien sous-estimé, pour ne pas dire méprisé, et qu'il faut redécouvrir -, le toujours révolté Yves Boisset (qui ne tourne plus beaucoup, hélas : trop grande gueule ?) ou Costa-Gavras.

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La travail d'un acteur avec son metteur en scène : Daniel Auteuil et Vincent Garenq

Dans chacun des trois derniers longs-métrages de Garenq, on retrouve un élément troublant. A chaque fois un homme se retrouve seul, face à lui-même, face au système, face aux institutions judiciaires ou autres. Lors de notre rencontre avec Vincent Garenq, nous lui avons fait part de notre observation.

Vincent Garenq : « C’est pour cela qu’il faut que j’arrête. Ce dernier, Au nom de ma Fille, j’ai vraiment hésité à le faire. Je me suis dit : "Ça y est, on va m’accuser de toujours ressasser les mêmes histoires " et donc j’avais un rapport très ambiguë avec cette histoire. Mon cerveau me disait qu’il ne fallait pas le faire mais mon cœur avait envie de le faire quand même. J’avais des réunions avec les producteurs et je leur disais : "Non, non, je veux pas le faire. J’ai pas envie." Et puis après, on en parlait pendant une heure, on repartait et je me disais : "Ouais, ouais, on va le faire !" Parce que cette histoire est incroyable ! Voilà, le danger c’était ça : la question du triptyque (…). Mais bon, ce personnage me plaisait. C’est pas souvent qu’on tombe sur une si belle histoire. Et à un moment on se dit : "Allez, on verra ce que ça donnera !" J’avais envie de le faire, quoi ! »

Ce qui impressionne dans ce dernier film, c’est la capacité qu’a le réalisateur à condenser en 1h27 de cinéma une histoire complexe qui s’étala sur presque trente ans.

Comment Vincent Garenq et son coscénariste Julien Rappeneau ont-il fait pour raconter cette histoire en un peu moins de 90 minutes ?

Vincent Garenq : « C’est du boulot. Il y avait un challenge (j’aime pas ce mot là). Mais en tout cas, cette histoire va avec les trente ans. On ne pouvait pas passer à côté de ça parce que ça fait partie de la poésie de cette histoire. Et de la folie de cette histoire ! On ne pouvait pas ne pas le traiter. Donc, du coup, on savait qu’on devait rajeunir Daniel Auteuil, le vieillir. Tout ce qui va avec : les ellipses, … Ça fait partie du vertige de cette histoire ».

Quelques mots sur les acteurs tout de même. Au Nom de ma Fille  est porté par un Daniel Auteuil qu’on n’a pas vu aussi bon au cinéma depuis bien longtemps - passant de l’incompréhension, à l'abattement, de la révolte à la folie - un acteur allemand impressionnant, Sebastian Koch, et une Marie-Josée Croze troublante.

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Daniel Auteuil, Marie-Josée Croze et Sebastian Koch : le trio d'acteurs au cœur du film

L’occasion était trop belle de questionner Marie-José Croze - grande actrice vue notamment dans Les Invasions Barbares de Denys Arcand et Munich de Spielberg, excusez du peu - sur son rôle difficile de Dany. Un personnage qu’on ne comprend pas toujours car il n’est en aucun cas manichéen.

Est-ce le personnage de Dany qui a intéressé l‘actrice ou le sujet du film ?

Marie-Josée Croze : « C’est le sujet ! D’abord comment ça s’est passé : J’étais sur un tournage et Vincent et moi on a fait un « FaceTime ». On s’est parlés par écrans interposés. J’ai lu le scénario qui m’a tout de suite emballé parce qu’il est très bien écrit et que c’est une histoire passionnante. Moi d’abord, c’est l’histoire générale qui m’intéresse. Ensuite et en même temps, je dirai : "Est-ce que j’ai envie de défendre ce rôle ? Est-ce que j’ai ce qu’il faut en moi ? Est-ce que j’ai connu suffisamment de choses dans ma vie qui me permettent de jouer ce rôle ? Ou pas (ndr : avec une petite voix) ?" Sinon, je laisse la place à quelqu’un d’autre. Moi, je m’identifie vachement à Bamberski. Quelqu’un qui a des convictions intimes et profondes qui naissent d’un ressenti très très fort d’une chose dans un premier temps. Et qui va au-delà de toutes les apparences. Tout le monde lui dit qu’il est fou. La justice lui dit. Tout le monde ! Mais lui est persuadé et va jusqu’au bout de son intime conviction. Et ça, ça m’intéresse ! Faire partie d’un projet qui raconte cette histoire-là, c’est ça qui est intéressant par dessus tout ! Et aussi l’idée qu’on pourra apporter quelque chose à cette femme. Il faut vraiment montrer toutes les palettes et réactions humaines possibles».

Si on excepte quelques faiblesses - certaines ellipses temporelles sont maladroites -, on ne peut que vous conseiller ce film pour la force de conviction de ses interprètes, l’intérêt de son sujet, sa tension dramatique. Décidément, on n’a plus que jamais besoin de réalisateurs comme Garenq. De cinéastes qui n’ont pas leur caméra dans leur poche !

Au Nom de ma Fille
Un film de Vincent Garenq
Scénario Vincent Garenq et Julien Rappeneau
Distribution Daniel Auteuil, Marie-josée Croze, Sebastian Koch, Fred Personne (une pensée pour ce grand acteur originaire du Pas-de-Calais dont ce fut le dernier film)
Image Renaud Chassaing
Montage Valérie Deseine
Musique Nicolas Errèra
Durée : 1h27

Sortie en salles le 16 Mars 2016

Affiche, photos et film-annonce © Studio Canal

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