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« Orpheline » : Critique du film – Rencontre avec Adèle Haenel, Solène Rigot, le cinéaste Arnaud des Pallières

Cette semaine Lille La Nuit consacre son Actu Ciné à Orpheline, le dernier film de Arnaud des Pallières. Très remarqué avec Michael Kohlhaas - incarné par Mads Mikkelsen - le cinéaste change radicalement d’univers en abordant le parcours d’une femme incarnée par quatre actrices : Adèle Haenel, Adèle Exarchopoulos, Solène Rigot et la petite Véga Cuzytek. Critique de Orpheline, rencontre avec  Arnaud des Pallières, Adèle Haenel et Solène Rigot par Lille La Nuit.

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Orpheline de Arnaud des Pallières : la petite Véga Cuzytek et Nicolas Duvauchelle qui incarne son père.

Critique :  Avec Orpheline, Arnaud des Pallières signe son cinquième long-métrage après Drancy Avenir, Adieu, Parc, Michael Kohlhaas. Et il n’est jamais là où on l’attend.

Alors que Arnaud des Pallières s’est essentiellement frotté jusqu’à présent à des univers masculins, il propose avec Orpheline son premier film où les femmes se trouvent au cœur du récit et de l’action. Nous avons demandé au cinéaste si cela lui avait fait envisager différemment la mise en scène de cinéma.

Arnaud des Pallières : « Evidemment ! Toute la singularité du film est que j’ai essayé de proposer aux spectateurs de voir cette histoire à travers les yeux du personnage. Il y a une mise en scène, des choix techniques, de positions de caméras. Il y a des choix très simples mais très contraignants qui ont été pris en amont. J’ai ressenti une certaine émotion quand on m’a raconté cette histoire. Christelle Berthevas (NDR : coscénariste du film), dans un cadre privé, m’a raconté son histoire par morceaux. Et cette émotion, je n’avais qu’une idée, c’était de la partager. Moi, j’ai une manière de partager les émotions : c’est le cinéma ! Donc, j’ai réfléchi à comment je pouvais partager cette émotion. L’entreprise que je propose c’est d’essayer d’enfiler un petit peu la peau d’une femme de cette condition sociale. Et qui est en but à cette violence, à ces difficultés, à cette lutte pour être ce qu’elle est ! Donc, j’essaie de tout faire pour que le spectateur voit à travers ses yeux. Et ça : je ne l’avais jamais fait ! »

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Orpheline de Arnaud des Pallières : Adèle Exarchopulos face à Gemma Arterton

 

La force de Orpheline est de faire accepter dès les premières minutes qu’un même personnage puisse être incarné par quatre actrices. S’il n’y avait aucun risque pour que l’identification ne fonctionne pas avec la petite Véga Cuzytek, il était plus difficile de faire admettre au public que ce même personnage soit interprété par Solène Rigot, Adèle Exarchopoulos et Adèle Haenel dont les âges sont plus proches.

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Orpheline de Arnaud des Pallières : Adèle Haenel  est une nouvelle fois surprenante.


Lille La Nuit a demandé à Adèle Haenel et Solène Rigot comment elles avaient travaillé ensemble pour jouer la même héroïne, être « raccord ».

Adèle Haenel : « Moi, c’est un peu con mais je crois très fort aux idées ! L’idée du scénario  - et l’envie d’Arnaud - étaient justement de ne pas jouer classiquement la carte qu’on joue dans un  « biopic ». Où l’on cherche la vraisemblance, une vraisemblance qui est très codifiée qui consiste à vieillir les gens, à les grimer d’une certaine façon pour qu’on accepte de croire, nous spectateurs, de croire que c’est la même personne. Et lui, a décidé de ne pas suivre cette logique-là mais d’en suivre une autre. Pour moi, ce simple fait de faire jouer un personnage par quatre actrices, il y avait déjà quelque chose d’exaltant ! On n’a pas « domestiqué » le désir au profit de la vraisemblance. On a dit : « Ce qu’on veut, c’est du cinéma ! Un objet de cinéma ! » Un objet de fantasme. Un objet où il manque la plus grande partie : le regard du spectateur ! (…) Et c’est l’envie de travailler avec chacune d’entre nous qui a primé. Comment on a fait pour jouer le même personnage ? En considérant qu’on est plein de personnes au sein de sa propre vie ! Du coup, il n’y a pas à assurer forcément nos cohérences. Et si vous avez vu ça, c’est peut-être parce que c’était l’enjeu du film : que vous y perceviez une cohérence ! Que, nous en tout cas, n’avons pas forcément cherché à faire. »

Solène Rigot : « La cohérence est dans le scénario ! Pour nous, c’était à chacune de trouver une tranche de vie. Comme chaque personne a, à tout âge, cette vie qui est différente de cinq ans plus tard, et cinq ans plus tard... Car, comme disait Adèle, on est une personne différente à chaque fois. Chacun devait s’y mettre à fond. Que chacune de nous s’y mette à fond, sans forcément avoir de contact avec l’une et l’autre. A part le fait de participer à un même projet qui nous relie. D’avoir mis tout son cœur là-dedans sans avoir forcément pensé à l’après. Ou à l’avant du film ! C’est ce qui fait que chaque moment est fort, je pense. Après, c’est Arnaud, le maitre d’œuvre. Le chef d’orchestre. »

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Orpheline de Arnaud des Pallières : Solène Rigot impose un regard, une aura, un jeu troublants.

Orpheline est un film exigeant. Il est comme on dit rapidement, et de façon souvent caricaturale, un «  film d’auteur » (la notion est tellement galvaudée).

Arnaud des Pallières filme toutes les étapes de la vie d’une femme, avec ses instants de bonheur et de tragédie. Il ne détourne pas le regard devant les combats que doit livrer son héroïne envers des hommes oppresseurs. Il ne se cache pas derrière une fausse pudeur, filme frontalement la sexualité féminine. Ainsi, Arnaud des Pallières revendique le droit au plaisir pour son personnage. En faisant ces choix d'écriture et de mise en scène, le cinéaste livre avec Orpheline une œuvre de cinéma féministe. C'est plutôt bienvenu par les temps qui courent.

Synopsis : Portrait d’une femme à quatre âges de sa vie. Petite fille de la campagne, prise dans une tragique partie de cache-cache. Adolescente ballottée de fugue en fugue, d’homme en homme, puisque tout vaut mieux que le triste foyer familial. Jeune provinciale qui monte à Paris et frôle la catastrophe. Femme accomplie enfin, qui se croyait à l’abri de son passé. Quatre actrices différentes (Adèle Haenel, Adèle Exarchopoulos, Solène Rigot, Vega Cuzytek) incarnent une seule et même héroïne.

Orpheline de  Arnaud des Pallières
Avec Adèle Haenel, Adèle Exarchopoulos, Solène Rigot, Véga Cuzytek, Jalil Lespert, Gemma Arterton, Nicolas Duvauchelle
Directeur de la photographie Yves Cape – AFC SBC Montage Emilie Orsini, Arnaud des Pallières, Guillaume Lauras

Avertissement : des scènes, des propos ou des images peuvent heurter la sensibilité des spectateurs.

Affiche, photos, film-annonce © Le Pacte

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