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Dear Life de Wang Chia-Ming au Phénix

Dans le cadre du Next Festival, le Théâtre du Nord et le Phénix de Valenciennes reçoivent ce mercredi 4 décembre la nouvelle création de Wang Chia-Ming, Dear Life. Fondateur et directeur du collectif Shakespeare’s Wild Sisters Group, le metteur en scène taïwanais adapte les nouvelles d'Alice Munro, Prix Nobel de littérature en 2013. Les histoires ne se passent pas dans le grand nord-américain mais à Taïwan contrairement aux nouvelles de l'écrivaine canadienne.

"Dear Life", 4 récits de vie

Dear Life que l’on peut traduire en français par « rien que la vie » raconte quatre récits de vie, celles de femmes, qui n’ont rien à voir les unes avec les autres. Il s’agit d’existences ordinaires dont le destin va soudainement basculer. La première histoire est celle d’une jeune femme qui va se recueillir sur la tombe de sa mère, morte d’un accident vasculaire cérébral. Elle va peu à peu nous raconter le parcours de vie de sa mère qui aura chaque décennie épousé un homme différent. Le deuxième récit est celui de sœurs jumelles que tout oppose. La troisième histoire est celle d’une femme atteinte d’un cancer qui cherche à se soigner grâce à des pratiques chamaniques et qui finira par tomber amoureuse d’un homme lui proposant une balade à moto. La dernière met en scène une femme de chambre travaillant  dans un hôtel et dont la vie est bien rangée alors qu’elle a vécu de nombreux excès pendant l’adolescence. Chaque récit est raconté par un proche de la protagoniste qui intervient dès lors comme un narrateur omniscient. Le spectateur est immédiatement transporté par la force des images que propose le texte, par l’atmosphère sonore amenée par des musiciens semi-cachés par le décor. Le texte et la mise en scène accordent une grande importance aux petits riens, aux choses dont on ne fait habituellement pas attention. Ainsi les détails sont mis sous une loupe ce qui procure une grande force poétique à la pièce. Dans chacun de ces récits qui se succèdent sans transition, Wang Chia-Ming maîtrise parfaitement le rythme et les nuances temporelles du spectacle. Le public goûte à une nouvelle expérience de la durée sans s’ennuyer. D’ailleurs le spectacle commence et se termine par une minute de silence.

« Le théâtre est un espace où l’on peut concrètement expérimenter la durée : les rebondissements de l’intrigue, le traitement du rythme, l’attente du climax, l’émerveillement devant les images, l’étonnement du surgissement des sons, la pensée critique, l’embellissement des émotions… »

Wang Chia-Ming. Entretien avec Marie Sorbier, avril 2019.

Une pièce poétique et très drôle

Le jeu des acteurs est incarné et très juste. Le décor coloré retranscrit un désordre savamment organisé qui peut être inspiré de certaines villes d’Asie. La pièce est à la fois poétique et surtout très drôle. Bien que l’on sente la douleur et la profonde solitude de ces femmes en quête d’un ailleurs, d’une autre vie sans doute, il y a de véritables moments cocasses, décalés et loufoques dont le spectateur ri allègrement. Il ne s’agit pas, en effet, d’une pièce mélo-dramatique sur des récits de vie. Les scènes sont amenées finement, avec une grande intelligence sans jamais perdre la folie et les travers des personnages. Le spectacle est joué en mandarin surtitré en français, la plupart des images puisent leur force dans un imaginaire propre à l’Asie qui font voyager le spectateur. Cependant Wang Chia-Ming adresse un message universel dans lequel n’importe lequel d’entre nous peut se reconnaître. Ce spectacle est un coup de cœur à ne surtout pas manquer.

Spectacle au Phénix de Valenciennes
Mercredi 4 décembre à 20h
Durée : 2h15

Vu le 29 novembre à la Maison des arts de Créteil.

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