Si la culture subit ces dernières années de plein fouet les économies budgétaires, avec de sévères coupes des subventions de collectivités (on vient de le voir avec la décision du maire de Tourcoing Gerald Darmanin de couper les vivres au théâtre du Nord), le VIA festival de Maubeuge – Mons - Jeumont parvient à surfer sur les turbulences. Adossé cette année à Mons 2015, capitale européenne de la culture, il met encore plus le cap sur les technologies numériques.
Cela ne surprendra pas ceux qui ont noté l’installation à Mons du centre de données Europe de Google – 450 millions d’euros investis. Depuis, cent entreprises planchent sur l’innovation digitale. Et 5000 personnes sont « alphabétisés » au numérique chaque année. Autant de spectateurs potentiels pour la programmation du VIA, qui intéressera bien sûr également les populations de Valenciennes ou de la métropole lilloise, où se développent aussi cette nouvelle économie. Et plus généralement tous les curieux de la région…
Comme Lille 2004 avait su le faire, Mons 2015 veut se faire mondialement connaître en ville novatrice. La « Digital Innovation Valley » aimerait réduire les frontières entre les individus et son Café Europa devrait en être le fer de lance. Sorte de réseau de cafés philosophiques interconnectés, niché dans 60 m2 à Mons, il reliera dès le 12 mars les habitants de Créteil, San Sebastian, Riga, Sarajevo ou Kaliningrad, en tout dix villes qui pourront tchatcher grâce à un mur d’écran.
Autre exemple d’innovations numériques fournissant du lien social, cette fois localement, un faux google street view créé sur 10 kilomètres de voiries avec la complicité des habitants (« Mons Street Review »).
Plusieurs créations
En cette année 2015 si particulière, le VIA se devait de multiplier les créations, ainsi que quelques « presque premières », selon la drôle de formule de Didier Fusillier (toujours grand manitou auprès de Yves Vasseur). Entendez par là que les spectacles ou œuvres repérées ici ou là dans le monde vivront leur deuxième sortie dans le nord. Ainsi de Amnesia, qui n’a eu jusqu’alors qu’une première à Santiago du Chili - sorte de roadtrip collectif réfléchissant sur la Wallonie.
Parmi les quatre créations monsoises, inspirées du nouveau cinéma (imbriqué dans le spectacle vivant), celle de la compagnie du Zerep : comme le dit le même Fusillier, on aime ou on déteste Sophie Pérez, qui occupe une place à part et grinçante dans le théâtre français. C’est le propre du VIA, surprendre, oser. Autre création plus calme, celle de Michèle Noiret, entre danse et cinéma, à partir d’une vieille interview de Conrad Detrez (écrivain belge) par Jacques Chancel dans Radioscopie.
Première mondiale aussi pour le chorégraphe et danseur japonais Hiroaki Umeda, avec Intensional particle. Les amateurs du Japon pourront aussi s’imaginer à Tokyo, grâce au collectif Ground Riddim et son écran à 360 degrés qui donnera l’impression de faire la fête à Tokyo.
Exposition Home cinéma
Chez les habitués du VIA, la Fura dels Baus, dont il s’agit de la cinquième présence, va s’amuser avec vos téléphones portables, qui pour une fois devront rester allumer après avoir téléchargé une application permettant d’entrer dans le spectacle.
Traditionnellement, le VIA propose aussi une expo emblématique. Cette fois il s’agira de Home cinéma, avec une vingtaine d’installations et cinq films « immersifs ». L’enjeu est d’explorer notre nouvelle relation quasi virale aux images, ne serait-ce qu’avec nos Smartphones toujours prêts à être dégainés. Et puisque LillelaNuit.com aime la musique, comment ne pas terminer ce balayage non exhaustif par le film « Felix et Paul Strangers » autour du chanteur canadien Patrick Watson, en studio. On ajoutera que Vincent Morriset, l’autre québécois qui présente le film « Jusqu’ici », a déjà produit des clips d’Arcade Fire…
