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Lorsque l’enfant était enfant, la nouvelle création de Sylvain Groud

Le festival Les Petits Pas (du 18/11 au 18/12/2021) propose une nouvelle création de Sylvain Groud, directeur du Ballet du Nord, Lorsque l’enfant était enfant. Le titre de la pièce fait référence au poème de Peter Handke écrit pour le film Les ailes du désir de Wim Wanders. Le projet a débuté il y a quatre ans, lorsque Sylvain fait la rencontre de David Dauchy (élève à l’école du Ballet du Nord) lors d’une improvisation dansée. Malgré les contraintes auxquels ils sont soumis (David étant mineur ne peut travailler que trois heures par jour en studio), Sylvain décide de monter un projet avec lui et la violoniste Laetitia Ringeval.

Lorsque l'enfant était enfant

Un homme, seul, assis sur une chaise semble pessimiste et désenchanté par la vie jusqu’à ce qu’il rencontre l’enfant. Un dialogue débute alors entre eux. Est-ce une conversation avec l’autre ou avec le moi profond ? L’homme retrouverait-il une partie de lui-même qu’il aurait oublié, délaissé ?

Lorsque l’enfant était enfant,

Il ne savait pas qu’il était enfant,
Tout pour lui avait une âme
Et toutes les âmes étaient une.

[…]
Comment se fait-il que moi qui suis moi, avant de le devenir je ne l’étais pas, et qu’un jour moi qui suis moi, je ne serais plus ce moi que je suis ?

Lorsque l’enfant était enfant de Peter Handke.

L’enfant dégage une sorte de nonchalance, il fait tout pour attirer l’attention de l’homme blasé. Chaque jour est une découverte, un émerveillement pour lui dont le corps est encore en construction. Ce spectacle parle de transmission entre les âges. Qui apprend le plus de l’autre ? L’enfant amène l’homme à son plus haut développement et vice-versa. On ne sait plus vraiment qui est le plus sage des deux, qui apprend le plus de l’autre. Sylvain dit d’ailleurs « Je ne sais pas qui est le plus enfant des deux. Qui est l’enfant mental de l’autre ? Et c’est là tout l’intérêt de notre collaboration. […] Je trouve que David a une vieille âme. Une forme de sagesse, une innocence mais qui sait déjà. Sa danse en est emprunte. »

Le jeu, au début de notre existence est nécessaire et absolument fondamental pour la suite de notre existence. Par son innocence, l’enfant est capable de produire quelque chose de nouveau. Il ne connaît pas le ressentiment car il n’a pas à prendre la charge des errances de l’histoire ou du passé. L’enfant édifie un présent nouveau. Il incarne une nouvelle humanité qui dépasse et transcende les vieilles figures humaines. Il est une puissance affirmative, un créateur capable de produire une manière inédite de donner du sens. L’enfant entretient un rapport ludique avec la vie. Il joue, il invente, il créer son propre monde.

L’enfant est innocence et oubli, un nouveau commencement, un jeu, une roue qui roule sur elle-même, un premier mouvement, un « oui » sacré.

Ainsi parlait Zarathoustra, Première partie « Des trois métamorphoses », Nietzsche.

Sylvain et David ont une même gestuelle, tantôt enfantine, tantôt d’une grande maturité, comme si l’homme retrouvait peu à peu l’enfant qu’il a été. La qualité de mouvement est à la fois flottante, aérienne, ces deux âmes se rencontrent de nouveau. Une complicité s’installe.

La nouvelle création de Sylvain Groud avec David Dauchy (élève à l’école du Ballet du Nord) et la violoniste Laetitia Ringeval

Le violon détermine le type de dialogue entre l’homme et l’enfant. La lumière symbolise deux espaces oniriques et la musicienne porte une grande traîne qui sépare ces deux espaces que l’enfant et l’homme apprennent à franchir. Laetitia Ringeval vient soit lier la relation, soit la perturber en rappelant à l’homme sa condition d’adulte. Tout au long de la pièce, le focal change. D’abord l’homme vu par l’enfant, l’enfant vu par l’homme, les deux âmes vues par la violoniste et enfin la violoniste vue par l’homme et l’enfant. Ce 2+1 montre ce lien fragile de la rencontre causé par le déséquilibre du nombre impair. Il faut apprivoiser ce +1 qui lie les deux âmes comme il peut les éloigner.

À la fin de la représentation, il n’y a plus que l’enfant sur la chaise, plus que l’essentiel qui subsiste. Le spectacle dégage une théâtralité sans surjeu qui laisse apparaître l’émotion pure. Le corps a un âge mais l’âme n’en a pas. La pièce encourage à écouter son cœur d’enfant car celui-ci sait ce dont on désire au plus profond de nous-même. Elle est une belle métaphore de la position de l’artiste car la créativité et la curiosité ne peuvent découler que de notre capacité à nous émerveiller comme un enfant.

Lundi 22 novembre 2021 à 19h à L’Étoile Mouvaux
Durée 45 minutes
Dès 7ans.

Photo : © Frédéric Iovino

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