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Laura Gibson « Empire Builder »

Laura Gibson « Empire Builder »

Laura Gibson Empire Builder Style : Great Lake Singer Sortie : 01/04/2016

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Tourner avec Grant Lee Phillips, dont le magnifique The Narrows mérite plus d'une écoute, travailler avec des partenaires aussi étincelants que Nate Query des Decemberists, Dave Depper de Death Cab for Cutie et même Joey Burns de Calexico, ça pose une personnalité, une réputation, une attitude, un son. On perçoit ici une élégance de tous les instants, dans la musique, les paroles et même dans cette photo de pochette, un moment d'indécision dit-elle, tout le contraire d'un selfie poseur finalement. Cette élégance se double d'une très jolie profondeur, limpide comme les eaux des lacs de l'Oregon, un film bleuté et clair autour de chaque note.

Laura Gibson a des choses à dire, rien à hurler. Elle chante avec un phrasé extrêmement net, très articulé, évoquant celui de Suzanne Vega, figure folk emblématique dont les textes subtils et littéraires trouvent ici de fins échos. Une forme de cassure vocale finale dans les vers vient également les différencier, une touche très légère de la Marianne Faitfhull de Broken English ou Dangerous acquaintances. Aucune vraie comparaison possible pour autant, Laura Gibson n'est ni l'une ni l'autre, ça permet de la situer mais il faudra se pencher sur son travail tant c'est personnel. Oser aller se promener le long de cette belle rigueur, des ces arrangements délicats et posés, toujours parfaitement pesés, plutôt retenus, sans doute par une volonté très affirmée de ne rien faire de trop.

Elle joue le long d'une ligne d'eau extrêmement claire et totalement épurée, ni pauvre ni obstinément minimaliste mais rigoureuse et précise : tout à sa place. On est au bord d'un folk de chambre, violon sublimement précis, violoncelle venant augmenter la profondeur des basses, guitares en dentelles fines, basse rebondie assurant la tenue de l'ensemble. De la belle ouvrage, comme on le dit d'une pièce fine d'orfèvrerie ou d'un travail de marqueterie, totalement à l'inverse d'une superposition abusive de couches de sons. Des eaux claires, toujours. De l'espace, beaucoup, celui qui sépare l'Oregon de New York lorsqu'on voyage en train, l'Empire builder, qui donne son titre à l'album. Trois jours de voyage qui lui ont donné tout le temps d'être contemplative et de laisser ces rêveries dessiner l'album et ses contours pensifs.

Le disque a la noblesse de l'artisanat folk à dimension humaine, on joue ensemble comme on dînerait entre amis de très bonne compagnie, loin des foules bruyantes et des sons bruitistes. Textes sous le sceau de la confidence amicale mais pas intime : un appartement qui vole en éclats lors d'une explosion de gaz dans l'immeuble new-yorkais où elle vivait et elle repart du zéro absolu, plus une note, plus un instrument, plus une démo... Un disque de renaissance. En concert le jeudi 8 septembre 2016 à La Péniche, en compagnie d'Amanda Bergman.

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