Aujourd’hui5 événements

Les 20 ans de la Malterie

Les 20 ans de la Malterie

Aurélien Delbecq Date de l’événement : 18/09/2015

Site Web

Cette rentrée 2015/2016 est bien chargée, mais on ne pouvait pas passer à côté de l’anniversaire de la Malterie ! Ce lieu emblématique de Lille fête ses 20 ans. Aurélien Delbecq, le chargé de communication de la Malterie depuis fin 2006 a échangé avec Lille la Nuit sur l’histoire, l’anniversaire et l’avenir de ce repère pour les artistes qui cherchent un tremplin en début de parcours avant de pouvoir voler de leurs propres ailes, tout en restant très liés à cet endroit.

Peux-tu rappeler le concept et le principe de la Malterie ?

La Malterie est un lieu de travail pour les artistes, qui a été créé en 1995 par un comité d’artistes, dans le but de répondre aux besoins auxquels ils étaient confrontés. Le besoin d’espaces de travail adaptés à leurs maigres revenus mais aussi un accompagnement et un suivi de la part de personnes qui peuvent les aider à avancer, à développer des compétences sur tout ce qui est « para artistique » : administratif, fiscal…

Aujourd’hui, la Malterie, c’est :
- une trentaine de plasticiens et 70 musiciens qui bossent au quotidien dans ce bâtiment
- 28 ateliers d’artistes
- 5 studios de répétition
- une salle de concert au rez-de-chaussée où se joue près de 90 concerts par an. Sa petite jauge permet de montrer des choses qui ne se font pas forcément ailleurs. Ici, les coûts sont très faibles, ça permet donc d’essayer plein de choses. C’est vraiment un lieu basé sur le travail, l’expérimentation et le partage entre les artistes, et le public est vraiment au cœur du projet.
- un centre ressource arts visuels qui accompagne les artistes plasticiens et qui dispense des journées d’informations, de formations aux professionnels et du conseil individuel sur toutes les questions d’ordre administratifs et fiscales.

C’est donc un lieu des possibles, encore géré par les artistes : les idées fusent, les projets évoluent. La structure à cette force de pouvoir évoluer plus vite qu’une structure institutionnelle qui met toujours du temps à observer les changements pour pouvoir avancer. Ici ça peut évoluer très vite.

Malterie

Comment avez-vous construit la programmation des 20 ans de la Malterie ? On peut voir qu’il y a quasiment un événement par jour du 18 septembre au 4 octobre.

L’un des objectifs était de créer un moment qui illustre les projets qui sont nés ici, qui fait revenir les artistes qui sont passés par là, et qui dévoile des premières mondiales pour les 20 ans ! On voulait en faire un événement à l’image de ce qu’est la Malterie au quotidien. On a donc sollicité des artistes qui ont été force de proposition et les formes qui en résultent sont vraiment des idées des artistes.

On a demandé aux artistes : Comment vous voyez les choses ? Qu’est-ce que vous voulez faire ? Qui veut faire des choses ? La première idée un peu simple qui est sortie, c’est : on a 20 ans, on va faire 20 jours non-stop. Finalement, ça ne fait pas 20 jours, ça en fait 17, mais il y a des jours où il y a plusieurs choses en même temps.

Quels sont les temps forts de ce programme ?

On a trois - quatre types d’événements :

- les concerts avec des groupes extérieurs, qu’on a essayé de faire cohabiter avec des groupes de la Malterie sur quelques dates. Des concerts un peu plus spéciaux qui sont des performances qui s’inscrivent plus sur la durée notamment le 26 septembre la performance 49 hours penetrationles musiciens vont jouer non-stop de 18h à minuit. Grâce à une machine, on va graver un vinyle du concert en direct de la soirée ; un petit plus assez chouette !

- les projections, à la fois celle d’un film le 30 septembre mais aussi durant les portes ouvertes ; un espace où l’on va projeter une sélection qui va mélanger des films d’artistes de la Malterie et des clips faits pour les groupes du rez-de-chaussée.

- Les soirées « un soir, une œuvre », totalement nouveau, dans cette idée d’illustrer ce qu’est la Malterie au quotidien. Les artistes vont proposer de faire des performances dans leurs ateliers, réservés à un petit groupe de personnes car il y peu d’espace. Il y a aussi une collaboration avec les musiciens qui nous ont dit : « Nous aussi on peut jouer dans ton atelier pendant que toi tu fais autre chose ». Il y aura trois soirées et chacune propose deux à trois rendez-vous successifs avec, à chaque fois, des présentations qui n’ont jamais été montrées ou des performances qui n’ont jamais été réalisées. Par exemple, il y aura un atelier avec trois auteurs de BD et le groupe Vertigo qui va jouer pendant que les artistes dessinent. Le groupe fera alors évoluer sa musique en fonction des œuvres qui sont réalisées.

Le but de la Malterie n’est pas de montrer des formes abouties, on est plus dans des formes expérimentales et dans l’idée de donner aux artistes la possibilité d’essayer des choses.

Aurélien Delbecq - La Malterie

Le faire avec le public, c’est aussi l’occasion pour eux de faire un nouveau truc et on a vraiment basé ce temps-là sur la convivialité et le partage.

-Tout cela se conclue par nos portes ouvertes les 3 et 4 octobre. Cette année, on propose en plus des événements dans la rue avec des projections vidéo sur la façade, un food truck, des transats, des performances dont un quatuor de batteurs et de saxophonistes.  Et enfin des concerts le soir, dans la Malterie, avec l’envie que ça se termine un peu comme un bal. Ça fait beaucoup de propositions mais ça été très riche car tout le monde a apporté des idées et construit ce projet.

Il y a une autre première mondiale : une bière spéciale pour les 20 ans, c’est ça ?

Ça fait très longtemps qu’on a l’idée, car ce lieu s’appelle la Malterie puisqu’on est dans les locaux d’une ancienne brasserie. C’est pour ça que les plafonds sont bas et qu’il y a peu de fenêtres. Il y a donc longtemps qu’on se dit que pour un événement il faut qu’on fasse notre bière. Il y a eu une rencontre avec Raccoon Brewery, une jeune brasserie associative qui vient de s’installer à Fives et qui fait des brassins spécifiques pour les événements. Ils ont bossé pour nous sur un mélange de céréales en lien avec ce qu’on leur disait sur les 20 ans. C’est donc vraiment une bière spéciale pour la Malterie.

Bière la malterie

© La Malterie

Pour revenir sur l’avenir de la Malterie, est-ce que le dossier a avancé ou est-ce toujours flou ?

Entre les deux… A priori, on a réussi à négocier pour un nouveau bail entre 1 et 3 ans maximum donc on devrait rester ici encore un petit peu. Ce nouveau bail implique une augmentation très conséquente du loyer, il faut donc revoir complètement le modèle économique. Il y a quand même des enjeux à court terme à surmonter et ce qui est intéressant c’est qu’on se pose de nouvelles questions : pourquoi on est là ? Qu’est-ce qu’on fait ? C’est quoi notre projet ? Voir aussi qui est prêt à faire quoi. C’est un boulot qui anime tout le monde depuis quelques mois (…) mais ça créer aussi une incertitude qui est assez anxiogène pour tout le monde.

C’était la question sur les 20 ans : est-ce qu’on fait un anniversaire ou pas ? Mais on est d’une nature plutôt optimiste. Il vaut mieux un moment célébrer les 20 ans qui sont dernière toi plutôt que de pleurnicher sur les années à venir. Donc aujourd’hui je ne peux pas en dire plus, ça avance petit à petit et ce qui avance c’est nous qui le faisons avancer. Politiquement c’est assez dur de faire avancer les dossiers en ce moment.

Vous avez des subventions notamment au niveau de la région. Les élections régionales qui arrivent ne doivent pas vous aider à avancer ?

Ça bloque beaucoup de choses aussi. On a quand même des financeurs, on est indépendant à 40% de notre budget ce qui, pour une structure culturelle, est plutôt bien mais le reste c’est de l’argent publique. Les collectivités renouvèlent leur soutien à la Malterie mais aujourd’hui et demain on va avoir besoin de beaucoup plus d’argent si on veut continuer d’exister soit ici soit ailleurs. Et ce levier là pour l’instant ne s’est pas actionné. C’est une question de contexte il n’y a plus d’argent dans les caisses, on le sait. Donc, nous on travaille aussi sur « comment on pourrait changer notre modèle économique pour être un peu plus autonome et moins dépendre de ces subventions ». Si on change notre tarification, on va aussi changer de public cible. Les jeunes artistes qui sont là aujourd’hui n’auront plus les moyens de payer donc ce sera soit des artistes qui ont plus d’argent soit des gens qui font ça en loisirs. Le but est de trouver où mettre le curseur entre améliorer son économie et ne pas travestir le projet. On est sur des pistes différentes et on développe pas mal de nouvelles choses. L’idée est de trouver ce nouvel équilibre, parce qu’on est sur un modèle qui date d’une vingtaine d’année qui n’est plus valable à l’heure actuelle. C’est aussi intéressant de se reposer ces questions-là et de se dire quel nouveau modèle on peut inventer, comment on associe les gens, le public aussi.

Pour continuer à parler de l’avenir, vous avez d’autres temps forts ce trimestre, avec notamment une soirée spéciale Halloween ?

- Oui, il y a un festival Punk Hardcore avec 8 groupes, c’est une première ! Et on a énormément d’événements après les 20 ans. On en a 37 jusqu’à fin décembre.

La malterie îles

© La Malterie


- L’accueil du projet « îles »
qui commence pendant les portes ouvertes en partenariat avec le centre national des arts plastiques, une branche du ministère de la culture qui donne des bourses à des artistes sur des projets, et qui cette année a crée un programme qui s’appelle « suite » et qui a pour vocation de proposer à plusieurs lieux de montrer le travail des artistes qui ont eu la bourse du CNAP. On a choisi d’inviter Fabrice Galice qui a monté un collectif qui s’appelle « laboratoire des hypothèses » et qui travaille sur la question de l’insularité, l’autonomie. Au sein de son collectif, il invite des gens qui sont soit artiste soit complètement autre chose, et ils mènent des expéditions sur les îles, ou pas. Le but est de voir comment chacun approche les nouveaux territoires, et il cumule les visions différentes de chaque personne avec son bagage social et professionnel. Ils vont explorer le plateau du dernier étage comme si c’était une île, monter un campement et l’explorer pendant les deux jours des portes ouvertes en invitant le public à participer. Il y aura quatre temps de rencontre avec eux. Leur but est d’essayer d’arriver au plus proche de la Malterie à la rame. Historiquement il y avait des canaux souterrains pour les livraisons de cette ancienne brasserie. Ensuite, il y a une journée ou ils vont présenter l’ensemble de leur projet (…) et le temps de conclusion ou ils présenteront une édition ou ils vont cumuler plusieurs livrets avec une approche différente de chaque territoire (…) et un pique-nique participatif dans leur campement sera proposé au public afin d’être totalement immergé dans leurs univers.

Contrairement à ce que les gens ont en tête on n’est pas du tout un lieu élitiste et fermé. C’est ouvert et on est ravi de partager des choses avec les gens sur les temps d’ouvertures au public.

Aurélien Delbecq - La Malterie

C’est un projet qui raisonne bien avec ce que les artistes peuvent proposer à la Malterie et en même temps ça répond aussi à notre situation : que peut-on déplacer ? Est-ce que la Malterie peut exister dans un bâtiment autre que celui qui participe à notre identité depuis 20 ans, qui a une situation géographique, un caractère architectural qui fait que pour les gens, en interne aussi, la Malterie est un lieu. La Malterie peut-elle exister dans des lieux qui sont éclatés ? Toutes ces questions se posent et leur travail raisonne beaucoup avec notre situation.

Comme se sont les artistes qui gèrent la structure il y a une sorte de boulimie. Il n’y a pas les frontières qu’on peut avoir dans une structure ou il y a un directeur, qui dit : on fait 5 concerts et voilà. Ici tout est possible et qui veux faire quelque chose fini toujours par le faire. C’est ça qui fait la richesse du lieu.

Et même si on montre des choses parfois difficiles d’accès et un peu pointu, c’est aussi pour ça qu’on maintient une politique tarifaire très basse parce qu’on veut que les gens viennent au hasard. On veut vraiment proposer des choses différentes de ce qui se fait ailleurs.

Retrouvez le programme complet des 20 ans dans l'agenda

 

Revenir au Mag Interviews
À lire aussi
155 queries in 0,204 seconds.