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Contre vents et marées, le documentaire de Jean-Philippe Jacquemin, un Lillois très inspiré

Contre vents et marées, le documentaire de Jean-Philippe Jacquemin, un Lillois très inspiré

Contre vents et marées Style : Documentaire

Contre vents et marées est un documentaire éclairant sur les Résistants de la Seconde Guerre Mondiale. Qui ne s’est pas demandé un jour s’il aurait été résistant en temps de guerre. Facile à dire, difficile à penser ? C’est un documentaire émouvant et subtil que nous livre Jean-Philippe Jacquemin, le réalisateur, le témoignage poignant de quatre résistants qui sillonnent encore la France aujourd’hui pour raconter aux jeunes ce qu’était la résistance, ce qu’était la lutte à cette époque.

Ce sont bien des femmes et des hommes qui ont fait la Résistance, et donc l’héritage ce ne sont pas des faits de guerre mais plutôt une multitude d’histoires individuelles comme autant de preuve qu’il y a de la ressource dans l’humain.

Jean-Philippe Jacquemin

"Contre vents et marées", un devoir de mémoire

Ce film bijou explore le passé, des images d’archives choisies avec justesse, mais ce dernier se raconte comme si c’était hier. Comment un jeune s’engage dans la résistance ? Pourquoi ? Comment se vivaient les réels dangers, les embuscades, le maquis, les sabotages ? La lutte était-elle ressentie comme un acte d’héroïsme, la peur était-elle paralysante ?

Plus que jamais d’actualité, ce documentaire inscrit en images un héritage unique de la réalité du terrain de la résistance de cette guerre mais transcende aussi l’idée de résistance en un acte pur, conscient ou inconscient où prédominent les idées d’indignation, de liberté d’expression et de transmission des valeurs humaines.

Le film est sorti deux fois à des dates malchanceuses, où le confinement nous a empêché, ou nous entrave encore d’aller tous apprécier cette page de l’histoire. Jamais deux sans trois, Lille la Nuit a un véritable coup de cœur pour Contre vents et marées, et vous invite à le découvrir à sa prochaine sortie, en famille, seul, entre amis. C’est de toutes façons un film qui vous percutera et dont vous aurez envie de reparler.

Rencontre avec Jean-Philippe Jacquemin, le réalisateur de ce documentaire

Jean-Philippe, c’est avec plaisir que nous souhaitons parler à la fois de vous et votre film. Pourriez-vous nous dire quelques mots sur le pourquoi de ce documentaire ? Comment vous est venu l’idée ?

J-P : C’est aussi un grand plaisir de parler avec Lille la Nuit. Car le film vient d’ici, je suis Lillois et il a reçu le soutien de la région Hauts-de-France. Ce film est né d’une double rencontre : la Résistance sur grand écran et les acteurs de notre Région. Je m’explique. J’avais programmé avec des amis le film « Walter, retour de Résistance » (de Gilles Perret) au cinéma coopératif L’Univers à Lille Moulins. Comme c’est souvent le cas là-bas, le film allait être suivi d’un débat et je cherchais des intervenants pour y participer. Nous avons alors contacté une association d’anciens Résistants, l’ANACR, qui a envoyé l’invitation à ses membres. C’est comme cela que Guy Béziade, Pierre Charret et Michel Defrance sont venus. La projection du film finie, s’est installée une longue discussion passionnante. Personne n’a bougé de son siège. Moi, je filmais la rencontre avec du matériel non-professionnel. La discussion a duré finalement plus longtemps que le film et tout le monde est ressorti fasciné par les récits encore plus vivants qu’à l’écran. C’est en regardant ce que j’avais filmé que j’ai remarqué qu’effectivement il s’était passé quelque chose avec le public. Je ne voulais pas que cela reste entre 4 murs, je voulais partager cela avec le plus de monde possible. Ce que j’avais filmé n’y serait pas parvenu. J’ai alors décidé de monter un projet pour porter cette parole. Après avoir été spectateur du film de Gilles Perret, je me suis moi aussi m'y à filmer « mes » Résistants, ceux habitant autour de moi, mais que je n’avais jamais soupçonnés. C’est ainsi que Guy, Pierre et Michel sont arrivés sur ce projet, avec Yvonne (Abbas) aussi, qui n’avait pas pu venir au cinéma car elle n’arrivait déjà plus à marcher. J’ai déposé un dossier de financement à la Région en 2012, j’ai été sélectionné en 2013 et j’ai tourné dans la foulée. Ensuite cela a été un long process de dérushage, montage image et son, étalonnage etc… pour finalement obtenir une version prête pour le cinéma en 2019 et une sortie dans les salles initialement prévue pour le 25 mars 2020, mais le premier confinement est arrivé à ce moment là…

Comment s’est déroulé le tournage ? Une anecdote particulière à nous partager ?

J-P : Lors du tournage, les interviewés étaient déjà très âgés, évidemment, mais avaient encore beaucoup d’énergie pour se déplacer. Alors j’avais prévu de faire un tournage à Londres devant la BBC et un peu à côté aux quartiers de la France Libre. J’avais aussi eu l’accord d’Eurostar pour filmer dans le train. Mais deux d’entre eux ont fait une phlébite quelques mois avant et ont décidé que cela serait trop risqué d’aller outre-Manche. Le documentaire se passe donc principalement assis, dans un lycée mais aussi chacun chez soi. Il a fallu alors un peu d’imagination au montage pour rendre cela vivant et pétillant. Les scènes d’évasion (racontées) sont aussi là pour ça ! Pour nous faire sauter de notre siège…

Vous avez reçu un très bel accueil pour votre film, et de très jolies critiques. Etes-vous fier de ce film ? Et évoquer ce sujet n’est-il pas en lui même un héritage de la résistance ?

J-P : J’ai mis 8 ans à réaliser ce projet alors je suis très fier d’être allé au bout et d’avoir obtenu la satisfaction du public et aussi des critiques. C’est une sacrée reconnaissance aux vues des nombreuses difficultés qu’il a fallu surmonter pour finaliser le film (sélection des archives, montages fastidieux …) car au final, il faut non seulement aller au bout mais aussi que cela plaise. J’ai pris un angle original qui est de ne pas faire un film d’Histoire mais plutôt des portraits d’être humains traversés par l’Histoire. C’est cela le véritable héritage, oui. C’est d’avoir « mis en boîte » ces témoignages en ayant conservé l’humanité plutôt que l’héroïque ou le factuel. Car ce sont bien des femmes et des hommes qui ont fait la Résistance, et donc l’héritage ce ne sont pas des faits de guerre mais plutôt une multitude d’histoires individuelles comme autant de preuve qu’il y a de la ressource dans l’humain.

Votre film est sorti deux fois à des mauvais moments, confinement oblige, étant touché de plein fouet par la crise actuelle.  N’est-ce pas trop frustrant et comment convaincre les spectateurs d’aller le voir à la prochaine sortie, la bonne cette fois ?!

J-P : Oui c’est vrai que la première sortie était prévue pour mars 2020 et a dû être annulée avec le premier confinement. J’en ai profité pour prolonger le travail sur le film en montant presque tous mes rushes, classés par thèmes, et en les accompagnant d’un dossier pédagogique pour une utilisation en classe. Ce premier confinement a été plutôt bénéfique pour faire cette pause nécessaire à l’écriture du dossier, même si j’ai été très frustré que le film ne sorte pas. La re-sortie s’est faite fin octobre et le film n’est resté à l’affiche que 2 jours car est arrivé le deuxième confinement. Ce fût un deuxième coup au moral, peu de spectateurs ont pu voir le film. Mais en y réfléchissant bien, cela a permis d’obtenir des critiques presse très positives, ce qui devrait être bénéfique pour la troisième sortie, même si tout reste à refaire. J’espère surtout cette fois-ci voir le film programmé dans le Nord, car c’est là qu’il a été tourné et la mémoire de la Résistance y est encore très vive (et pour la petite histoire mes grands-parents ont tenu un cinéma à Templeuve qui est encore en fonctionnement, ce serait boucler la boucle).

Pour mieux vous connaître, pourriez-vous nous raconter votre parcours dans la réalisation ?

J-P : On va dire que j’ai un parcours plutôt atypique puisque je suis ingénieur en électronique (ISEN – Lille) et que comme j’avais une passion pour le cinéma, je me suis orienté vers l’ingénierie de l’image et je suis maintenant chef de projet chez Barco, le leader mondial du cinéma numérique. J’ai cette année eu mon premier film en salle en même temps que professionnellement est sorti le premier projecteur de cinéma dont j’ai dirigé le design. Mais plus particulièrement sur mon parcours cinématographique : j’ai commencé par un court documentaire sur des dockers qui ont monté leur propre société sur un modèle solidaire après avoir été tous licenciés. Ce film m’a valu d’être finaliste dans un festival, ce qui m’a poussé à continuer. J’ai donc entrepris le tournage d’un documentaire long format télé (52mn) sur un poète du Nord, Lucien Suel, où le film apprenait de son sujet et adapté les techniques visuelles pour lui aussi devenir un poème visuel en réponse à ce que l’on entendait de Lucien. Ce film a aussi bien marché et a été diffusé sur Wéo. J’ai donc quitté l’auto-financement pour un tournage plus professionnel et j’ai obtenu une aide des Hauts-de-France pour le tournage de Contre Vents et Marées qui a fini par obtenir un visa CNC et être distribué dans les cinémas. Après beaucoup de travail, mais c’était déjà dans le titre ! A côté j’ai réalisé quelques courts-métrages de fiction dits « à contraintes », technique qui booste la créativité. J’ai l’habitude de dire que je fais « des fictions à contraintes et des documentaires libérés ».

Quels seraient les sujets qui vous tenteraient particulièrement dans un prochain travail ?

J-P : Dans mon travail documentaire je m’intéresse principalement aux « utopies concrètes », c’est allé donc des dockers qui montaient leur propre boîte sur des valeurs solidaires, au poète auto-édité qui finit chez Flammarion et à ces Résistants qui se battaient non pas seulement contre l’envahisseur mais pour un monde meilleur (ce qui a donné la Sécurité Sociale, l’Assurance Chômage, les Retraites…). Alors je reste attentif à ce sujet-là. N’importe quoi peut m’interpeller, c’est cela la magie du documentaire : on ne peut rien contrôler mais il faut se préparer à « attraper son sujet » !

Photo : © Les Créations du Lendemain

La projection du documentaire au Métropole samedi 20 novembre 2021

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