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Interview de Bojan Z et Julien Lourau

Interview de Bojan Z et Julien Lourau

Bojan Z et Julien Lourau Date de l’événement : 10/03/2007

A quelques heures de leur concert à l'Aéronef, le pianiste Bojan Z et le saxophoniste Julien Lourau répondent à mes questions.

Aurélie : Vous aimez ajouter des sonorités différentes au jazz. Vous, [Bojan], vous avez ajouté des sonorités un peu plus rock [dans Xenophonia] et vous, [Julien], en jouant avec le collectif Rumbabierta, vous mélangez le jazz à la musique afro-cubaine. Pourquoi avoir choisi ces mélanges si différents ?

Bojan : J’imagine que la raison pour laquelle des musiciens font çà, c’est par affinité, pas parce qu’il déteste. Personnellement, si vous dîtes que j’ai choisi un peu plus rock : on ne va pas rentrer dans la discussion, vous venez de le dire donc j’assume, c’est par affinité pour la musique rock.

Julien : Pareil, vu que c’est un interview croisé, il faut dire que depuis qu’on s’est rencontré, on a fait des trucs comme çà. On s’est rencontré et depuis les années 90, on a toujours mélangé des trucs. Déjà « rock », on ne sait pas ce que c’est, où çà commence, où çà s’arrête alors « jazz », on ne sait pas non plus.

A. : Vous avez joué ensemble soit en trio ou dans des groupes plus importants. Vous [Bojan], c’est votre deuxième album en trio. Vous [Julien], vous aimez joué avec un nombre plus important souvent une dizaine de musiciens comme là avec Rumbabierta, vous êtes beaucoup sur scène. Pourquoi vous aimez ces configurations là précisément ?

B. : Personnellement, pourquoi je joue avec un trio ? Parce que c’est mon dernier projet. Ça fait des années que je fais plein d’autres formules. Avant d’arriver dans ma famille du trio, disons que je n’assumais pas le rôle de chanteur avant. Je n’assumais pas pleinement le rôle de pianiste d’un trio et d’ailleurs, ce n’est toujours pas le cas. C’est pour çà que j’essaye d’enrichir cette idée de piano-trio avec le piano-électrique, les sons diversifiés pour que le chanteur soit autre chose que la main droite sur le piano.

J. : Moi, c’est vrai que dans mon premier groupe, on était assez nombreux mais moi, c’est justement parce qu’il n’y avait pas de piano. Du coup, çà impliquait d’avoir quand même une richesse d’harmonie et de couleur. Donc, il y avait des cuivres, et à la place du piano, c’était du vibraphone. Après, il y a eu les quartets avec du piano. Là, avec Rumbabierta, il se trouve qu’ils sont nombreux à la base ce collectif. Il y a déjà trois personnes pour faire la batterie, c’est trois percu, après il y a deux chanteurs et puis un bassiste. Moi, mon apport là-dedans, c’était aussi d’amener une guitare. Donc, tout de suite, on se retrouve nombreux. Ce n’est pas vraiment fait exprès. C’est plus cette musique : dans la tradition afro-cubaine ceux sont des familles. Il peut y avoir deux personnes qui font les chœurs mais il peut y en avoir cinq ou dix.

B. : Selon l’importance de la réunion familiale.

A. : Vous avez eu tous les deux différents prix tout au long de vos carrières. Quel est celui qui vous a le plus touché parmi ceux que vous avez eus ?

B. : Celui qui m’a le plus touché, c’est le dernier : 15 000 € en plus… soyons clairs.

J. : Ça a beaucoup touché ton banquier. Moi, c’était le permis de conduire.

B. : Le deuxième! Les prix en question, c’est bien mais c’est la dernière des choses à laquelle je pense au moment où je fais ma musique et après l’avoir reçu. Ce n’est pas une motivation en soi surtout pas quelque chose qui va m’inspirer musicalement parlant. C’est une reconnaissance d’un petit cercle ou d’un grand cercle, quelque soit le cercle de gens qui décident qu'ils vont nous donner le prix. Ça fait toujours plaisir. Je le prends et je continue à faire exactement la même chose que je faisais avant vu qu’en plus, on me donne des prix pour çà.

J. : Oui, voilà c’est çà. C’est la reconnaissance des paires. Quand çà arrive de temps en temps, çà recale.

A. : Justement, ce soir, il y a les Victoires de la musique. Avant, le jazz était inclus dans le palmarès général [jusqu’en 1993 puis 1ère édition des Victoires de la musique classique et du jazz en 1994 ] et maintenant depuis 2003, il y a les Victoires de la musique jazz. Est-ce que vous trouvez que ce changement reflète bien l’évolution de la popularité du jazz notamment dans les médias ?

B. : Personnellement, j’ai rarement regardé. J’y ai été une fois parce que j’étais nominé et voilà, personnellement, çà n’a aucune importance ce truc pour moi.

J. : Moi, je trouvais que c’était plus sympa quand c’était avec le classique. C’est des économies qui sont comparables. Le fait de séparer, çà ghettoïse encore le truc, çà enlève même un peu de la valeur au prix je trouve. Je trouvais çà sympa : au moins, il y avait un petit croisement avec les musiciens classiques. Moi, j’y suis allé quand je les ai eues en 1999 [pour l’album City Boom Boom]. Au moins, j’ai croisé des musiciens classiques de ma génération. Je leur ai serré la main. C’était sympa.

B. : Moi, quand j’y ai été, c’était exactement çà : le fait que çà permettait pour une fois sur place de comparer un peu des réalités. Je me suis rendu compte lors de cette remise qu’en fait je connaissais presque tout sur leur réalité de musicien classique mais eux restent des ovnis totaux : ils savent très peu comment on fonctionne, ce qu’on fait donc il y a un peu de travail à faire sur ce champ de rapprochement.

A. : Vous, Julien, vous avez composé la musique d’un court-métrage : l’Evangile du Cochon Créole. Est-ce qu’à tous les deux, on vous a proposé de faire des musiques de film ou de participer à des projets artistiques différents de ce que vous faîtes d’habitude ?

J. : On avait fait une musique de film co-composée il y a bien longtemps. On l’a fait une fois. Sinon, j’ai fait une musique de chorégraphie pour la danse Hip-hop. Après, ce sont des champs, des choses que potentiellement on peut faire mais je pense que des gens ont plus envie que moi de faire de la musique de danse, de théâtre ou de pub. Donc, au bout d’un moment, on choisit et puis après, çà tombe plus du ciel : les musiques de film ou de théâtre après ce sont des réseaux, soit on est dedans, soit on n’est pas dedans. Je sais que si on m’appelle pour une musique de film, ce sera pour avoir ma couleur, ma composition…Je vais pas m’inventer John Williams ou Daniel Hoffman demain. C'est quelqu’un qui aura envie d’avoir mon son sur son film ou ses images. Ce sera toujours ponctuel.

B. : C’est la même chose en fait. Au mois d’avril, j’ai eu la proposition d’improviser sur la musique d’une série de films muets à l’Auditorium du Louvre. Je vais le faire avec d’autres musiciens donc çà va être intéressant mais ce n’est pas quelque chose que je pense faire pour vivre.

A. : Vous avez déjà participé à de nombreux projets artistiques et à de grands festivals, vous avez beaucoup voyagé. Est-ce qu’il y a des endroits où vous rêvez de jouez, des pays... ?

B. : Aux Seychelles. Ou chez moi car je suis en plein milieu de la tournée si tu veux la vérité. Ce n’est pas vraiment quelque chose qui me manque.

J. : Il n’y a pas aujourd’hui un festival qui soit tellement mythique qu’il faudrait absolument y aller. Oui, si on compare au DVD de Miles Davis où il joue à l’île de Wight dans un festival pop devant 600 000 personnes. Pour un musicien de jazz, c’est le genre de truc qui arrive rarement qui n’est arrivé qu’une seule fois d’ailleurs. Ce genre d’expérience, se retrouver dans un truc comme çà, çà pourrait être drôle mais çà n’existe plus. Aujourd’hui, ce serait ultra sécurisé et hyper chiant à mon avis. A l’île de Wight, il y aurait des flics partout donc oui ce genre de truc mais bon voilà c’est une autre époque. Aujourd’hui, on a même plus le droit de fumer dans les loges d’un club de rock. Que devient le rock’n’roll ?!

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