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« Les Pires », un film tourné à Boulogne-sur-Mer – Interview avec Romane Guéret et Mallory Wanecque

« Les Pires », un film tourné à Boulogne-sur-Mer – Interview avec Romane Guéret et Mallory Wanecque

Romane Guéret et Mallory Wanecque Les Pires Style : Cinéma Date de l’événement : 07/12/2022

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A l'occasion de la sortie du film Les Pires, LillelaNuit a rencontré la réalisatrice Romane Guéret et l'actrice Mallory Wanecque. Coréalisé avec Lise Akoka, Les Pires est né d'un court-métrage tourné à Valenciennes. Voulant poursuivre l'aventure, les jeunes réalisatrices ont mis en scène leur premier long-métrage dans le boulonnais. Dans Les Pires, qui raconte le bouleversement que procure l'arrivée d'une équipe de tournage auprès d'enfants, d'adolescents et de leurs parents, Mallory Wanecque fait ses premiers pas (convaincants) devant la caméra. Moteur !

Pouvez-vous nous raconter votre parcours avant d'arriver à ce premier long métrage ?

Romane Guéret : J’ai fait une fac mais je n’étais pas très assidue. Rapidement, j'ai fait plusieurs stages sur des plateaux de tournage. J'ai rencontré Lise Akoka pendant l’un de mes stages en casting sauvage. Elle était directrice de casting et pour moi, c'était une découverte totale. J'étais assez naïve, je découvrais le casting sauvage, un peu à l'image de Judith dans le film. Le réalisateur nous a envoyé à Valenciennes et on est tombé sous le charme de deux enfants qui avaient toutes les qualités que nous recherchions. Ce n’est pas toujours facile à expliquer. Il y a quelque chose qui se passe comme ça. Ils entrent dans la pièce, on tombe amoureux, ils oublient la caméra, il y a un truc magique. On propose le petit garçon au réalisateur, qui l’adore, finit par le valider pour le film et quelques mois avant le tournage, l'annule. On se questionne sur toute cette histoire, sur notre responsabilité. C'était un petit garçon assez fragile, qui venait de foyer. On s'est dit que c'était spécial ce qu’il venait de se passer. Ils étaient tellement géniaux que ça nous a trotté dans la tête et on s'est dit, « On va écrire un film, un court-métrage pour les faire jouer », on se connaît pas bien, on va appeler des copains, on va voir si ça prend et on va les faire jouer. Comme ça, on sera allé au bout de notre idée et on réparera peut-être quelque chose de cette manière. Et ça a donné Chasse Royale, le court métrage qu'on a coréalisé ensemble. C'était la première fois qu’on travaillait ensemble avec Lise. De fil en aiguille, le film a trouvé une production, la même avec laquelle on travaille aujourd'hui sur le long métrage. Je parle de Chasse Royale parce que c'est vraiment la base de notre travail.

Les Pires, c'est un peu la prolongation de Chasse Royale. En devenant réalisatrices avec Chasse Royale, on s'est retrouvé confrontées à d'autres questionnements qui sont ceux de la mise en scène, de travailler avec des enfants, de les faire jouer, les limites qu'on y met, le rapport entre les réalisateurs, l'équipe, les comédiens, notre propre projet. Toutes ces questions nous ont passionnées, en plus de celles du casting sauvage. On s'est dit « Bon, on a peut-être la matière pour faire un long métrage cette fois ». Et on est parti dans cette aventure avec les films Velvet. On est reparti en casting pendant un an. Angélique Gernez que vous avez vu dans Chasse Royale joue la grande sœur de Ryan dans le long métrage. C'était important pour nous qu’elle continue l'aventure parce qu'elle n’avait jamais retourné depuis. Mallory tient le premier rôle dans ce film issu de castings sauvages.

Mallory, vous êtes issue d’un casting sauvage. Comment ça s'est passé ? 

Mallory Wanecque : C'est vrai que jamais de ma vie, je n’aurais un jour imaginé être actrice. J’étais dans mon collège, j’en sors avec ma petite sœur et il y a trois jeunes filles sur le trottoir d'en face qui m'interpellent en me demandant si je veux passer un casting pour tourner dans un film. Moi, j'étais dans ma petite ville, mon petit collège… actrice, tourner dans un film, pour moi c'était un film qui allait sortir sur YouTube, un film qui n’allait pas être vu par beaucoup de monde. Elles me demandent si je veux tourner dans un film, je suis un peu sceptique au début et, finalement, elles me montrent les papiers de la production. Je leur donne mon numéro. Elles m'ont rappelé une fois que j'ai passé un casting, deux castings, trois castings, quatre castings et au bout du quatrième, je suis allée chez Romane. On a pris toute la journée pour lire le scénario et à la fin de la dernière phrase, elles se sont assises à deux devant moi, m’ont regardé et m’ont demandé si je voulais jouer le rôle de Lily dans le film. C'était incroyable !

Mallory, quand on vous voit dans la vie, on se dit que vous êtes très différente du personnage que vous jouez dans le film. C’est vraiment un rôle de composition…

Mallory Wanecque : Elles ont essayé de prendre des personnes assez proches des personnages. Mais c'est vrai que je sens que dans ma façon de parler, j'ai un peu changé. J'étais quand même un peu plus street, un peu plus wesh. J'ai grandi depuis. Mais sinon par rapport à Lily, j'ai sa manière d'être un peu agressive, sa manière de me protéger, de parler aux gens. C'est ça aussi que je partage avec elle. C'est vrai que j'étais un peu plus proche du personnage, mais j'ai grandi, j'ai appris .

Romane Guéret : Chez Lily, il y avait cette espèce de tempête, qui parle vite, qui mange, qui fume… Elle est vivante cette gamine.

Mallory Wanecque : Là c’est parce que je ne parle pas vite, mais c'est vrai que je ressens que je suis quand même proche de Lily.

Vous dites que ça vous tenait à cœur de tourner dans notre région, pourquoi ? 

Romane Guéret : Pour nous, c'était impossible. Si on n'avait pas les financements de cette région, on n’aurait pas tourné ailleurs. Je ne sais pas comment on aurait fait. Pendant 5 ans, avec Lise, on a écrit en permanence en aller-retour avec le réel. On a beaucoup discuté, fait des centaines d'entretiens avec des jeunes, des moins jeunes, des encadrants. Les structures comme les foyers dans lesquels on allait caster. L’écriture était pleine de sable de la région. On a découvert la colombophilie qui nous a passionné. On en a fait un documentaire. Je crois qu'on s'est fait un peu adopter par cette région depuis Chasse Royale.Ça allait de soi que Chasse Royale était le point de départ et que Les Pires serait la fin de l'aventure. Peut-être que maintenant on arrêtera de faire des films dans le nord parce qu'effectivement, c'était très lié à ça, à notre coup de cœur du début. Et puis, pour être tout à fait honnête, les castings, l'accueil qu'on a eu dans les structures… c'était dingue. Les gens sont hyper chaleureux, ils comprennent… Pour toutes ces raisons qui sont artistiques et sentimentales, il n’y avait pas le choix.

Il y a quelque chose d'intéressant dans le film, c'est la façon dont vous montrez comment le cinéma peut intervenir et s'immiscer dans la vraie vie. Et, inversement, comment la vraie vie peut s'immiscer dans le cinéma. Jusqu'à montrer des choses parfois un petit peu ambiguës. Pourquoi teniez-vous à montrer l'autre côté du miroir, des choses qui ne sont pas forcément idylliques dans le monde du cinéma ?

Romane Guéret : Je crois qu'avec Lise, on a un goût commun pour un cinéma pas manichéen qui laisse les questions assez ouvertes. On aime bien quand ça parle de la vie avec tout ce qu'elle a, dans sa complexité, dans la complexité des rapports humains. Ce n’est jamais tout blanc, ni tout noir. Quand on s'est retrouvé à travailler avec des enfants sur ce film, on se posait ces questions-là, on se disait « Est-ce qu’on est dans les limites qu'on s'est posé ? Est-ce que, parfois, l'engouement, la passion, peuvent nous emmener trop loin ? Est-ce qu’on préserve assez ? Est-ce que c'est une expérience qui va être bénéfique pour eux ? » On avait envie de raconter tout ça, de le questionner. C'est notre univers, donc on peut avoir ce regard critique, on se sent légitime et en même temps, c'est un hommage au cinéma, donc on avait envie qu'il y ait vraiment ces deux aspects. Si on fait des films, qu'on fait du casting sauvage, c'est qu’au fond on croit à cette rencontre, on pense qu'elle est possible. Mallory a tourné depuis dans un autre long-métrage. Elle s'éclate ! Quand je la vois sourire et que je la récupère après une journée de tournage, qu'elle me dit qu’elle est hyper heureuse, évidemment c'est le truc qui me fait le plus plaisir. Je sais aussi très bien que pour d'autres enfants ça ne sera pas le cas, que pour d'autres ce sera plus difficile, que ça aura été une expérience peut-être moins facile psychologiquement. On avait envie d'en parler, en passant par plusieurs personnages qui représentent chacun une question. Il y a beaucoup de fils narratifs. On a l'impression que c’est comme ça qu'on pouvait représenter au mieux ce qu'on a vécu.

Les infos sur Les Pires

Synopsis : Un tournage va avoir lieu cité Picasso, à Boulogne-Sur-Mer, dans le nord de la France. Lors du casting, quatre ados, Lily, Ryan, Maylis et Jessy sont choisis pour jouer dans le film. Dans le quartier, tout le monde s’étonne : pourquoi n’avoir pris que « les pires » ?

Les Pires de Lise AKOKA et Romane GUERET

Avec Mallory WANECQUE, Timéo MAHAUT, Johan HELDENBERGH, Loïc PECH, Mélina VANDERPLANCKE...
Scénario : Lise AKOKA, Romane GUERET et Éléonore GURREY
Image : Eric DUMONT - AFC
Casting : Marlène SEROUR
Montage : Albertine LASTERA
Production : Marine ALARIC et Frédéric JOUVE, Les Films Velvet

Copyright photos © Eric DUMONT - Les films Velvet. Affiche et film-annonce Pyramide Distribution

Entretien : Grégory Marouzé - retranscription de l'entretien : Elise Coquille
Entretien réalisé le 21 novembre 2022 à Lille
Remerciements UGC Ciné Cité Lille

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