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Noman Hosni

Noman Hosni

Noman Hosni Style : Humoriste Date de l’événement : 29/05/2013

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S'amuser avec finesse des questions d'identité en étant moitié Tunisien, moitié Irakien, né en France et vivant en Suisse : c'est tout l'art de Noman Hosni, l'humoriste qui frôlera les planches de La Péniche ce soir à 20h. Avant sa venue dans le Nord, il nous a accordé un peu de son temps pour nous faire partager ses débuts de carrière, présenter son spectacle et sa vision de la scène.

Clémence : C'est la première fois que tu viens à La Péniche mais pas la première que tu viens jouer à Lille. Quel souvenir en as-tu ?

Noman : Oui j'ai joué quelques fois à Lille, mais c'était pas mon spectacle, je faisais la première partie de Mathieu Madénian (vous verrez, il revient souvent !). Il y a quelques jours on était à Bapaume ! Le public, vraiment super, j'ai beaucoup aimé. Je sais pas si c'était vraiment dû au fait de jouer à Lille mais j'ai eu l'impression que les gens étaient particulièrement chaleureux, accueillants...

Clémence : On a une certaine réputation dans le Nord, visiblement tu nous as bien cernés ! (rires) Du coup, tu viens nous présenter un spectacle... qui n'a pas de titre ! C'est un choix ?

Noman : Oui, c'est vrai, pas de titre, on va peut-être en trouver un pour le mois de septembre ! (rires) Nan plus sérieusement, c'est un choix, j'avais une idée et finalement, comme le spectacle évolue en permanence, ça ne correspondait plus. Puis je me suis dit qu'au fond les gens venaient me voir moi ! Il y en aura sûrement un, mais je ne me prends pas la tête : si une idée me vient, tant mieux, et si ça vient pas, je vais pas forcer le truc !

Clémence : T'as bien raison, au final, c'est le spectacle en lui-même qui reste le plus important. D'ailleurs, revenons un peu sur tes débuts : c'est ta découverte pour le stand-up aux États-Unis qui a tout déclenché ?

Noman : Pas tout à fait. En fait, j'ai toujours voulu en faire, mais j'avais simplement... le trac. C'est marrant parce qu'à la base, comme beaucoup d'humoristes seuls sur scène je pense, je suis très timide. Pour moi, monter tout seul sur scène, c'était juste impossible. Les premières fois, j'étais à deux doigts de vomir avant de monter sur scène. Maintenant ça va mieux hein, je te rassure ! C'était pas évident au début, heureusement que ça a marché parce que sinon je sais pas comment j'aurais fait...

Clémence : Donc au final, ça a plutôt été une sorte de déclic qui t'a poussé à franchir le cap ?

Noman : Exactement. En fait, un soir aux États-Unis, je me suis retrouvé dans un de ces bars de stand-up et j'ai réalisé à quel point il suffisait juste de monter sur scène. J'ai eu une sorte de révélation et je me suis dit : « Reviens et monte sur scène, peu importe où ! ». C'était en effet l'endroit qui était le plus dur à trouver. Il y avait peu de scènes où se produire en Suisse, à mes débuts, il m'est même arrivé de jouer dans un karaoké. J'y croyais et j'ai fait comme j'ai pu. Et par chance, mais aussi parce qu'on a tout fait pour faire bouger les choses, les scènes ont commencé à se développer et il y a pas mal de Comedy Club qui se sont créés et se créent toujours petit à petit en Suisse.

Clémence : Tu es donc passé par un bon nombre de petites scènes au début... Après c'est partout pareil, il faut faire les bonnes rencontres ! Toi tu n'es pas tombé sur n'importe qui puisque c'est Jamel Debbouze qui t'a repéré, n'est-ce pas ?

Noman : Oui, c'était pendant le festival de Montreux. Il y avait un gala un soir sur deux et un des soirs où il n'y avait pas de gala, j'ai joué et il y avait quelques personnes dont Pascale Reynaud de Rire & Chansons (Responsable de la Recherche et sélection de programme humoristique, ndlr) et Karim Debbouze, le frère de Jamel. A l'époque, je ne les connaissais pas, j'ai fait mon set normalement... A la fin, ils sont venus me voir tous les deux, m'ont félicité et m'ont proposé de venir sur Paris. Je les ai écoutés, je suis venu faire un enregistrement pour Rire & Chansons et les scènes libres du Comedy Club le mardi (que j'anime en ce moment, c'est marrant !). Jean-Michel Joyaux, qui s'occupe des scènes libres, m'a demandé de revenir. Une fois... Deux fois... A la quatrième fois, j'ai eu de la chance : il y avait Jamel dans la salle qui m'a parlé du Festival de Marrakech. Une semaine après, je reçois un appel : « Tu pars à Marrakech avec nous ! ». Je me souviens, j'étais comme un dingue ! En revenant du Maroc, on m'a proposé de faire partie de la troupe du Jamel Comedy Club. Ça faisait une troupe de plus vu que j'avais déjà mes troupes en Suisse et en France... J'ai accepté et ça m'a beaucoup aidé de pouvoir appréhender différentes scènes, c'était vraiment cool...

Clémence : Et à ton avis, qu'est-ce qu'il lui a particulièrement plu chez toi ?

Noman : Aucune idée ! J'imagine que ce qui plaît chez un humoriste en général c'est ce qu'il dégage... Enfin je sais pas, c'est compliqué de répondre à ça... C'est comme si tu me disais « Pourquoi ta maman t'aime ? » (enfin peut-être pas à ce point) (rires). Je considère qu'il y a un rapport hyper mystique avec l'humour : c'est un réflexe de rigoler. Par exemple, il y a beaucoup d'humoristes qui sont superstitieux, on ne sait pas quand ça marche, quand ça marche pas... Moi j'ai arrêté d'être superstitieux parce que je l'étais trop. Maintenant je peux mettre du vert sur scène !

Clémence : Tu n'es plus superstitieux et visiblement tu n'as peur de rien puisque tu as même relevé le défi de te produire en anglais ! D'où est née cette idée ?

Noman : Eh bien, comme je te l'ai dit, j'adore le cinéma, du coup, je regardais beaucoup de films en VO. Après, on ne peut pas vraiment dire que je parlais anglais mais les humoristes me faisaient rire. J'avais envie d'explorer autre chose et j'ai voulu tenter de me produire en anglais. En plus, en Suisse, il y a pas mal d'expat anglophones et j'ai découvert qu'il y avait une scène en anglais alors j'ai tenté le coup. Pour apprendre l'anglais, j'ai juste regardé des films en VO. Pendant une période je regardais cinq films par jour en anglais, histoire d'être dans le bain quoi ! Mon premier spectacle en anglais s'est bien passé et je me suis dit que j'aimais vraiment ça. Aujourd'hui, je commence à aller régulièrement à Londres, d'ailleurs j'y serai le 17 juin !

Clémence : Et par rapport à l'adaptation de ton spectacle, comme ça se passe ? Tu arrives à conserver le même type d'humour malgré la langue ?

Noman : En gros, il y a une partie que j'écris spécialement pour l'Angleterre et une autre qui correspond à la traduction de mon spectacle. Le fait d'aller en Angleterre est une vraie source d'inspiration pour les spectacles que je fais là-bas. Je ne me suis jamais dit « Tiens je vais faire des scènes exprès sur l'Angleterre ! », mais sur place, il m'est arrivé pas mal de trucs, ne serait-ce que par rapport à la compréhension de mon accent ou les conseils qu'on m'a donnés pour apprendre l'anglais, il y a pas mal d'anecdotes qui me font rire et que je raconte sur scène !

Après en terme d'humour, j'espère que j'arrive à véhiculer ma personnalité. En Angleterre, c'est particulier, il y a vraiment un public d'habitués des scènes d'humour. Par exemple, ce n'est pas étonnant de voir qu'un humoriste fait la une alors qu'en France, à part quelques noms comme Gad Elmaleh, Jamel Debbouze ou Florence Foresti, c'est beaucoup plus rare. Les humoristes moins connus ont une vraie place là-bas et j'aime beaucoup leur point de vue. Après j'ai pas envie qu'on défende ce que je dis, je ne suis pas quelqu'un qui pense qu'il y a un humour français, un humour anglais, un humour belge... Je pense qu'il y a un humour et qu'il y a des choses qui font rire partout. Après, c'est une histoire de référence. Évidemment si je parle d'Auchan en Suisse ils ne vont pas connaître.. Si je joue à Lille et que je dois parler de la presse, je vais prendre La Voix du Nord ou un truc qui parle aux gens ! C'est important pour moi de travailler mes références parce que je tiens à ce contact avec le public, quelque soit l'endroit où je me trouve.

Clémence : Après Londres en juin, tu t'apprêtes à passer ton mois de juillet au festival d'Avignon ! Un rêve qui se réalise ?

Noman : Oui, vraiment ! Tout le monde m'en parle en me disant « Avignon, c'est la guerre ! ». Il y a un truc qui me plaît beaucoup là-dedans, pas que j'aime la guerre mais tout le monde est passé par Avignon ! L'année dernière je n'ai pas pu y aller, alors cette année, j'ai sauté sur l'occasion ! Dans tous les cas, j'y serai allé un jour ou l'autre, mais cette année, toutes les conditions étaient particulièrement réunies puisque Mathieu m'a gentiment proposé de partager sa villa, avec sa piscine...

Clémence : Eh bien, elle est belle la vie d'humoriste ! Et du coup, ta passion pour le cinéma, tu la mets de côté ?

Noman : Non, je ne lâche pas l'affaire, je continue à réaliser des petits trucs dans mon coin sans forcément les publier sur internet. Que ce soit avec une caméra ou sur scène, le but c'est de raconter une histoire. Après, le cinéma c'est vraiment une grosse industrie qui demande beaucoup de budget alors que le one-man c'est un art que je trouve tellement pur. J'ai aussi vu les limites du cinéma : quand tu réalises un film, tu finis ton montage et c'est terminé, le film ne t'appartient plus, les gens vont le voir et il va vivre comme ça. Alors que dans le one-man, je peux corriger les phrases, mes lignes, refaire mon montage, déstructurer, restructurer, changer l'ordre des sketchs, je peux redynamiser tous les jours, à chaque fois que je monte sur scène. Il y a quelque chose de très jouissif là-dedans, et il y a aussi la réaction du public en direct, chose qui n'existe pas au cinéma. Par contre, le one-man c'est aussi se remettre en danger tous les jours, parce que c'est impossible de faire le même spectacle !

Clémence : A voir ta bande annonce, tu ne perds tout de même pas ton âme de réalisateur...

Noman : Oui, en une journée c'était tourné et monté ! Je me suis bien amusé, c'est typiquement mon style de réalisation avec mes influences américaines, mes plans hollywoodiens, mes cadrages, etc. Je me suis éclaté en post-prod en plus, j'avoue que sur cette bande d'annonce c'est surtout mon passé de monteur qui m'a aidé !

Clémence : Et pour toi, la préparation d'un spectacle c'est vraiment comme un entraînement sportif ?

Noman : Oui carrément, d'ailleurs je suis toujours en entraînement. Avec Mathieu, on a la même vision des choses, on ne dit jamais qu'on va répéter mais qu'on va s'entraîner. Et je ne m'entraîne jamais tout seul : le stand-up c'est pas comme du théâtre, faut imaginer qu'on fait rire les gens, et les gens pour moi c'est comme un instrument de musique. C'est comme si j'étais guitariste, que le public était ma guitare et m'entraîner tout seul ce serait comme faire du air guitar.

Clémence : En fait, tu mènes un peu une double vie entre le one-man et le cinéma non ? Parce que j'ai vu que tu avais même réalisé un trailer pour ta venue à Lille...

Noman : Ouais, j'ai repiqué un vieux film des années 70 pour le fun, c'était pas prévu du tout ! Souvent quand je regarde la télé, j'enlève le son et avec des potes on improvise des voix... On se dit « Toi tu fais lui et lui et moi je fais lui et lui » et on refait notre film. Là c'était un petit kiff avec un pote, j'ai vraiment fait ça pour les Lillois et ça m'a fait plaisir !

Clémence : On est des privilégiés alors ! Et pour continuer sur la lancée des privilèges, tu peux nous raconter l'histoire du chasseur et des lapins ?

Noman : (rires) Oula, ça c'est une très longue histoire... Je sais pas combien t'as de temps...

Clémence : Vas-y, on a tout notre temps !

Noman : Bon, en fait, j'étais en Suisse, sans le sous, recalé du MacDo, de la Fnac... Et j'ai fait un CV bidon que j'ai pompé sur une petite annonce où ils cherchaient des traders, il fallait plein de diplômes... J'ai répondu à l'annonce en leur disant « Vous allez rigoler mais votre annonce c'est un copié collé de mon CV, c'est incroyable ! » . Ça a marché et j'ai été reçu dans une des plus grandes boîtes financières mondiales pour être engager comme trader. L'entretien commence bien... Jusqu'au moment où le mec commence à parler en métaphore et m'a expliqué que les traders et les courtiers étaient des chasseurs et les clients étaient des lapins. J'ai trouvé ça ouf, mais le plus ouf c'est pas ça, c'est que j'ai été engagé et que j'ai travaillé pendant quatre mois dans la finance internationale avant de démissionner.
Plus tard, le directeur financier m'a grillé et m'a convoqué. A l'époque j'étais vraiment branché cinéma, je lui ai expliqué que j'étais pas trader mais que j'écrivais des scénarios. Il s'avère que ce mec est aujourd'hui un de mes meilleurs potes et qu'il a produit mon premier court-métrage en pellicule au Maroc !

Clémence : Waw, ça c'est de l'anecdote ! Et pour maintenant, t'as des projets particuliers ou tu te laisses vivre ?

Noman : Comme tu dis, je me laisse vivre ! Je me souviens que lorsque que mon père me demandait ce que je voulais faire plus tard, je répondais toujours que je ferai tout pour m'amuser le plus longtemps possible et c'est ouf parce que c'est ce qu'il se passe : je m'amuse, je calcule rien, je suis un instinctif (mais pas impulsif) et j'ai l'impression que je sais où je mets les pieds quand même. Je me dis que tout peut s'arrêter et je profite de la chance que j'ai de pouvoir faire ce métier !

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