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« Par Amour » : Élise Otzenberger plonge Cécile de France dans le cinéma fantastique

« Par Amour » : Élise Otzenberger plonge Cécile de France dans le cinéma fantastique

Elise Otzenberger Par Amour Style : Cinéma Date de l’événement : 15/01/2025

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Après Lune de Miel, Élise Otzenberger revient avec Par amour, sorti le 15 janvier et toujours à l'affiche. Inspirée par les jeux imaginatifs de ses enfants, la réalisatrice signe un film fantastique intimiste et anxiogène, porté par Cécile de France, Arthur Igual et deux jeunes acteurs, Darius Zarrabian et Navid Zarrabian. Dans cet entretien, Élise Otzenberger et Cécile de France dévoilent les coulisses d’un tournage ambitieux, leur passion pour le fantastique, et l’importance de croire en la parole des enfants. Rencontre avec Élise Otzenberger et Cécile de France par LillelaNuit.

On vous connaissait pour Lune de Miel, avec Par amour vous faites un virage à 360°. Comment vous est venue l'idée de faire un film fantastique ?

Elise Otzenberger : C'est une idée que j'avais en tête depuis longtemps, même avant Lune de Miel. Elle n'était pas encore complètement construite, mais je l'avais en tête. Après, j'avais bien conscience que ça aurait été un peu fou d'en faire mon premier film. Donc, j'ai gardé cette idée dans un coin de ma tête. Et puis Lune de Miel s'est imposée pour tout un tas de raisons. Après Lune de Miel, je me suis dit, qu'il fallait aller au bout de cette histoire et la construire. Depuis le début, j'ai imaginé cette histoire de cette manière. Je voulais que ce soit un film qui parle de l'imaginaire, du merveilleux, du fantastique C'était pour moi le genre parfait pour raconter cette histoire-là. C'est vrai qu'il y a pas mal de films de genre français en ce moment. On ne s'est pas donné le mot, mais je pense que ça correspond aussi à une prise de liberté. On a souvent entendu dire que c'était compliqué de faire un film de genre en France, donc, c'est chouette que les gens osent. Je pense qu'on est tous en train d'essayer de bousculer un peu les choses et de s'affranchir des idées reçues. Tant mieux. L'idée est venue en regardant mes enfants jouer. C'est vraiment ça la base du scénario : voir mes petits garçons s'inventer des histoires, avoir des amis imaginaires. Une volonté de parler de la famille et d'un moment compliqué de cette famille. C'est plutôt une suite assez logique après Lune de miel.

J'avais bien conscience que ça aurait été un peu fou d'en faire mon premier film.

Elise Otzenberger

Pourquoi avez-vous mis un tel rapport entre l'eau et les personnages dans le film ?

Elise Otzenberger : Parce que c'est une obsession chez moi. Je fais beaucoup de plongée. Et je trouvais très cinématographique de l'employer pour raconter cette histoire. Les extraterrestres, le fantastique, tout ça, c'est une autre obsession. Le premier projet que j'ai vraiment fait en tant que scénariste, auteur et metteur en scène, était une pièce de théâtre qui parlait de mon obsession pour Steven Spielberg. Après, j'ai proposé le projet à Cécile en espérant très fort qu'elle accepte. On ne se connaissait pas du tout. Elle a dit oui. Feu d'artifice. Et voilà le résultat.

Cécile, êtes-vous amatrice de cinéma fantastique ? Qu'avez-vous pu emprunter comme sentier que vous n'aviez pu explorer auparavant avec le personnage de Sarah ?

Cécile de France : J'aime bien qu'on me raconte des histoires, j'aime bien qu'on m'emmène loin, je suis toujours partante, je tends la main. Dans cette histoire, ce que j'aime, c'est peut-être plus le fait qu'elle croit son enfant, ce qui est très profond pour moi, j'envoie un message au monde : croyons nos enfants, responsabilisons-les, ne les infantilisons plus. Il y a quelque chose qui m'a aussi touchée plus que le plaisir de raconter une histoire fantastique, c'est que c'est un film où on croit les enfants, il n'y a pas beaucoup de films, finalement, où on croit les enfants, j'aimais bien cette idée-là.

J'envoie un message au monde : croyons nos enfants, responsabilisons-les, ne les infantilisons plus.

Cécile de France

Cécile, au générique, on voit que vous avez collaboré au dialogue.

Cécile de France : Comme on était avec les enfants dans quelque chose d'assez libre et dans un quotidien, on n'était pas dans une écriture apprêtée, donc oui, mais ce n'était pas nécessaire de mettre ça au générique.

Elise Otzenberger : À partir du moment où Cécile a dit oui, le film a mis un peu de temps à partir en préparation et c'est vrai qu'on a beaucoup échangé. On s'est échangé des versions du scénario. C'était un échange très précieux d'avoir mon actrice aussi impliquée aussitôt.

Il y a de nombreuses références dans le film. Je pense notamment au cinéma de Jeff Nichols. Ces références sont-elles totalement assumées, ou sont-elles plus inconscientes ?

Elise Otzenberger : Je pense qu'il y a un mélange. L'autre jour, quelqu'un m'a parlé de Coline Serreau, de La Belle Verte. C'est marrant, parce qu'alors je n'y avais pas du tout pensé, et d'un coup, ce film m'est revenu en tête. Ce n'est pas forcément des films auxquels je pense, mais je pense que ce sont des films qui m'ont marquées. Mon travail, fut d'abord d'être actrice, après, je suis devenue scénariste. Mais avant tout, je fais du cinéma, parce que j'aime aller au cinéma. Donc, je suis nourrie de tous les films que j'ai vus. Quand je réfléchis aux images que je veux faire, dans les discussions que j'ai avec les techniciens, même avec mes acteurs, parfois, je donne des références précises. L'idée n'est pas de copier ou de faire pareil, d'autant plus que je raconte des histoires assez intimes et personnelles, mais forcément, je m'en nourris de manière très sereine.

Cécile de France : Je m'étais dit, en revoyant La Guerre des Mondes de Steven Spielberg : "Je suis le personnage de Tom Cruise". Le lien qu'il a avec ses enfants. On y pense et après, on oublie. On le transpire malgré nous, peut-être inconsciemment, mais aussi consciemment, finalement. C'est un mélange.

Elise Otzenberger : Moi, je vois les références comme ça. Quand je discute, par exemple, avec mes techniciens, je fais aussi des moodboards où je mets des tableaux, des photos, des musiques. Pour moi, c'est ça créer. On s'inspire de plein de choses, on mélange. Pour moi, en tout cas, c'est comme ça.

Cécile de France : C'est quand même un film très français, je trouve. Un film d'auteur français. C'est marrant. Il y a l'identité d'Elise, qui est sincère et qui est une nécessité pour elle. Ce n'est pas une fabrication, il y a un vrai truc profond chez Élise. Seule Élise peut faire ce film nourri de tout ce qui a bercé son enfance.

Elise Otzenberger : Parfois, on est rattrapé par des choses. C'est parce que l'univers fantastique permet aussi d'avoir accès à des symboles, l'eau,... Il y a plein de choses qu'on peut raconter dans ce genre-là. Il y a plein de choses inconscientes qui apparaissent.

Seule Élise peut faire ce film nourri de tout ce qui a bercé son enfance.

Cécile de France

Tous les grands comédiens du cinéma francophone sont belges : Benoît Poelvoorde, Lubna Azabal, Olivier Gourmet, Virginie Efira, Jérémie Renier... Quelque chose se passe en Belgique ?  Avez-vous une théorie ? 

Elise Otzenberger : Surtout, on est les bienvenus en France, je me suis toujours sentie accueillie, aimée, et d'ailleurs plus aimée en France que chez moi, parce que nul n'est prophète dans son pays. Je sentais que j'amenais un peu mon identité belge, quelque chose avec laquelle les Français étaient plutôt ouverts et curieux. J'ai toujours salué l'ouverture d'esprit des Français et des Parisiens. Je ne me suis jamais sentie en compétition avec d'autres actrices. Sincèrement, ce n'est pas une posture que je prends. Tout de suite, on me donnait une place, on me montrait qu'on me validait, on m'encourageait, et j'ai vraiment toujours été très gratifiante de ça. Après, on est cousins, on parle la même langue. Ça dépend de la partie de la Belgique, bien sûr. Mais finalement, les Flamands ont aussi leur cinéma qui est très beau, très riche, et plus anglophone. Il y a plein de réalisateurs qui tournent dans des séries américaines ou anglaises, et c'est dommage parce qu'on est séparés. Les Belges francophones ont une culture française, enfin, la littérature, est française. Il y a quelques auteurs belges qu'on apprend à l'école, mais la plupart, sont quand même des artistes français.

Parlons des deux jeunes acteurs, les frères Darius Zarrabian et Navid Zarrabian. Comment se sont passées leurs sélections ? Aviez-vous une directrice de casting ?

Elise Otzenberger : Oui, on a eu une super directrice de casting, Beatriz Coutrot. On a vu pas mal d'enfants. Et on était déjà, franchement, assez avancés. Il y avait deux petits garçons qui étaient super, qui avaient déjà tourné tous les deux et qui étaient formidables. Beatriz Coutrot a casté un peu dans des agences où il y avait déjà des enfants acteurs qui avaient tourné. Et il y avait aussi un casting un peu plus sauvage dans les piscines, parce qu'évidemment, il fallait un enfant à l'aise avec l'eau. Sinon, c'était mal barré. Et on a vu arriver la photo de ces deux petits garçons qui ressemblent quand même énormément à Cécile et Arthur. Quand ils sont entrés dans le bureau, je me suis dit : "Alors ça y est, c'est bon !". Après, évidemment, on a fait des essais, on a travaillé et ils ont très bien joué, ils étaient super, ils apprenaient leur texte, ils étaient formidables techniquement. Et ils étaient aussi déjà très forts eux-mêmes, un peu comme les personnages du film. C'était la première fois qu'ils faisaient du cinéma. Ça, c'est le miracle du casting.

Ces deux jeunes acteurs sont très présents à l'écran et le travail des enfants est très réglementé. Était-ce une difficulté supplémentaire pour le tournage ?

Elise Otzenberger : C'est évidemment une difficulté supplémentaire parce qu'ils ne peuvent tourner que très peu, entre 3 à 4 heures par jour, forcément, les journées sont compliquées à organiser. On a tourné en seulement 6 semaines. Après, on a tout organisé. On était dans une sorte de studio. On avait le décor, ils avaient tout un étage pour eux. On a essayé de rendre tout ça le plus confortable possible pour que, justement, il n'y ait pas de temps de trajet, pour que tout soit optimisé. Mais évidemment, ça pose plein de questions. Après, c'était vraiment très important pour moi de faire ce film avec des enfants vu que ça parle des enfants.

Cécile de France : Ils étaient vraiment très mignons, hyper disposés, très partants. Et c'est aussi grâce à Élise qui tissait un lien vraiment incroyable avec eux. Donc, ils se sentaient très investis. Ils avaient très envie de bien faire. Ils ne perdaient pas de temps. Il faut être prêt, il ne faut pas perdre de temps. Mais il n'y avait pas de stress. Élise a tout fait pour les préserver de la fatigue. C'était comme un jeu. Vraiment, elle a réussi à ce que ce soit joyeux. Parce qu'elle connaît bien les enfants, je pense que ça a vraiment joué. Tout était disposé pour qu'on n'ait plus qu'à raconter cette histoire. Et qu'eux aient du plaisir à raconter cette histoire.

Les enfants se sentaient très investis. Ils avaient très envie de bien faire.

Cécile de France

Finalement, suite à votre spectacle qui lui était consacré, avez-vous pu contacter Spielberg ?

Elise Otzenberger : Alors, écoutez bien cette histoire. Je l'ai rencontrée. Je lui ai même parlé pendant un vrai moment. J'ai eu cette chance incroyable. Michel Denisot à Cannes a fait une grande interview de Steven Spielberg l'année où il était président du jury. Et j'étais à Cannes à ce moment-là, pour financer Lune de Miel. J'avais des rendez-vous avec les producteurs polonais. Je connais Michel Denisot, parce qu'il m'a aidé à produire le spectacle en question. Donc il connaissait mon obsession pour Steven Spielberg. Et il m'a appelé pour me dire :" Dépêche-toi ! Peux-tu être dans une demi-heure dans le hall ? Tu vas pouvoir assister à l'interview." Donc, j'ai assisté à l'heure d'interview de Steven Spielberg. J'étais à côté de l'ingé son. Et après, ça a duré très peu de temps parce qu'évidemment, il y avait l'attaché de presse qui pressait un peu. Mais j'ai pu quand même échanger quelques mots avec lui. Lui dire que je m'apprêtais à partir en Pologne pour faire un film. Il m'a dit : "Ah oui, mais moi aussi, j'ai tourné en Pologne". C'était fou. C'était un moment dingue. Et juste après, avec Marine ma productrice, nous sommes allées voir Le Bon Gros Géant de Spielberg.  Mais dans ma cinglerie, je me dis que je n'aimerais pas du tout le rencontrer de manière professionnelle. Là où je suis un peu étrange, c'est que je voudrais un jour, être invitée à dîner chez lui.

Vous n'avez jamais fait de mise en scène. Est-ce que ça vous tente ? 

Cécile de France : Non, pas du tout, parce que je suis très heureuse à ma place d'actrice. J'ai la chance de pouvoir faire seulement les projets qui me font battre le cœur. J'ai ma petite bulle où je peux créer, où je n'ai pas trop de responsabilités. J'ai l'habitude de gérer mes angoisses, mon stress, et puis surtout ma joie et mon amusement de faire ce métier qui est assez enfantin.

J'ai la chance de pouvoir faire seulement les projets qui me font battre le cœur.

Cécile de France

Vous êtes angoissée ? 

Cécile de France : Non, pas trop, mais j'ai toujours le besoin de rêver à un prochain rêve. Quand je reste trop longtemps sans avoir un rôle que je peux commencer à imaginer dans ma tête, si je reste trop longtemps comme ça, à vide, je peux commencer à être angoissée. Parce que c'est un grand luxe, en fait, d'avoir toujours un rôle passionnant à créer. C'est vraiment comme un truc quotidien de broderie, de loisirs créatifs. Ce n'est pas plus compliqué que ça. C'est d'avoir un personnage qu'on va façonner, qu'on habille, qu'on coiffe. Un personnage, c'est comme une poupée, comme dans le travail de couture. Il y a vraiment un truc de création.

J'ai toujours besoin de rêver à un prochain rôle.

Cécile de France

Et vous, Élise, vous n'avez pas totalement renoncée au métier de comédienne ?

Elise Otzenberger : J'adore jouer, ça m'amuse beaucoup. Le théâtre me manque parfois un peu, mais c'est compliqué de coordonner un agenda de développement d'un film et un agenda de théâtre. Mais si je suis très honnête, j'adore tellement réaliser que je n'abandonnerai plus ça pour recommencer à jouer. Et surtout, je crois que j'ai trop d'histoires à raconter.

Synopsis : Sarah et Antoine sont au bord de la rupture, fragilisés par un quotidien surchargé, entre le travail et leurs deux enfants. Un jour, Simon, l’aîné, confie à sa mère entendre des voix. Si Antoine peine à prendre la mesure du problème, Sarah décide de soutenir son fils. Jusqu’où sera-t-elle prête à aller par amour ?

Les infos sur par amour

Par amour d'Elise Otzenberger

Avec Cécile de France, Arthur Igual, Navid Zarrabian et Darius Zarrabian

Musique : Robin Coudert
Scénario : Elise Otzenberger et Maud Ameline
Distributeur : Tandem

Sortie : 15 janvier 2025
Durée : 90 min

Photos et film-annonce : Tandem

Entretien réalisé à Lille le 6 janvier 2025 par Grégory Marouzé.
Retranscription de l'entretien par Ambre Labbe.
Remerciements : Le Majestic UGC Lille

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