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Temples Temples au Grand Mix de Tourcoing Style : Rock Date de l’événement : 19/04/2017

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Après un premier album qui a eu l'effet d'une tornade sur le monde du rock psychédélique et largement dépassé les frontières des habitués de ce genre, Temples ont sorti récemment un deuxième album, Volcano, dont le titre était presque un présage de son effet tout aussi ravageur. Avant de les revoir sur scène au Grand Mix de Tourcoing, nous avons échangé avec Tom et Adam de Temples sur l'évolution de leur musique, les groupes et la scène.

LillelaNuit.com : Nous travaillons pour un site culturel local, LillelaNuit.com, mais en réalité on vous a vus la première fois en première partie de Kasabian en 2013. On a suivi votre évolution au fil du temps, c'était très intéressant.

Thomas Warmsley : On espère que ça vous a plu.

Énormément, mais à vous, ça vous a plu ?

TW : Oui... Depuis nos débuts en tant que groupe, on a grandi en public...

Ça peut être un peu perturbant, non ?

TW : On s'est habitués. Au départ, en 2012 – 2013, on n'avait quasiment jamais joué ensemble en tant que groupe. Il a fallu qu'on s'adapte en cours de route.

Vous donnez l'impression d'avoir gagné en confiance et de vous amuser beaucoup plus sur scène.

Adam Smith : C'est le cas.
TW : On a beaucoup travaillé là dessus.

Parce que c'était difficile pour vous auparavant, le live ?

AS : Oui.. Déjà, apprendre à jouer en live, c'est toujours difficile. Mais c'est aussi lié à nos chansons, et à la manière dont elles ont évolué. Au début, nos versions live des morceaux de Sun Structures étaient quasi identiques aux versions album. Depuis, les morceaux se sont transformés, sont devenus complètement différents. Et nous aussi. C'est beaucoup plus intéressant et plus drôle comme ça.

Est ce que le live a aussi influencé votre deuxième album ? Parce qu'il sonne vraiment différemment du premier et je me demandais si c'était lié ?

TW : Oui, le live a influencé ce qu'on a écrit par la suite. Le live a un caractère plus direct, qu'on a essayé forcément de retrouver dans nos enregistrements. On a vraiment cherché à frapper plus fort, au sens propre, pour cet album.

AS : Ça a inévitablement influencé le son de Volcano, consciemment ou inconsciemment. Ce « boom » dans la poitrine que tu ressens quand tu écoutés de la musique live, c'est ce qu'on a essayé  de provoquer avec cet album, plus qu'avec Sun Structures. Donc en ce sens, ça a influencé notre son.

Quand vous avez commencé à travailler sur ce deuxième album, est ce que vous ressentiez de la pression – de la part de votre maison de disque ou de votre public ? Parce qu'en général lorsqu'un artiste prépare un second album, le public attend de lui qu'il fasse la même chose, mais différemment...

TW : C'est paradoxal !

Tout à fait, du coup est ce que cela vous a « mis la pression » ou est ce qu'au contraire vous vous êtes dit « on va faire ce qu'on veut pour cet album » ?

AS : De la part de la maison de disques, non, on n'a eu aucune pression. Pour le reste, je ne sais pas... je pense qu'on ne s'est pas nous mêmes mis trop de pression.

TW : On sentait qu'on avait besoin de progresser significativement. Restait à savoir comment faire passer cette intention sur l'album, et c'était sans doute le plus compliqué. Quelles composantes de notre son changer, lesquelles garder ? Quand tu enregistres et que tu produis toi-même, tu es en charge de cet aspect là aussi. Ce sont des choix difficiles. Ça nous a pris du temps de définir jusqu'où on pouvait aller.

AS : Quand on a écrit Sun Structures, on n'avait pas de point de comparaison. Dans le cas de Volcano, on en avait un. Ça ne nous a pas mis de pression, mais ça a défini une perspective.

Quand on écoute « Certainty », le premier single, il est très différent de ce qu'on attendait de vous, mais en même temps, il sonne vraiment Temples.

AS : Je ne sais pas comment on a réussi à faire ça... (rires) mais c'est chouette que vous le pensiez parce que c'est exactement le résultat qu'on cherchait.

TW : On va considérer qu'arriver à garder un « son  Temples » - quelle que soit la signification de ce mot – est une réussite.

Volcano est un album surprenant. Il a un son beaucoup moins organique que Sun Structures, il y a beaucoup de synthétiseurs.

TW : Sur certaines chansons, quand nous avions l'impression que cela s'imposait. Mais d'autres chansons sont très dépouillées, ont un son très brut, juste une guitare-voix. On s'est adaptés à ce que chaque chanson demandait.

D'autant que vous avez expliqué que certains sons ressemblent à des synthés mais qu'en fait ce sont des guitares qui ont été distordues.

AS : On a beaucoup utilisé ces effets sur cet album. Sur Sun Structures aussi, pour être totalement honnête, mais pas dans les mêmes proportions. Tous les sons ne sont pas forcément ce qu'ils ont l'air d'être.

Sun Structures a été enregistré à la maison, et vous aviez raconté que, de ce fait, on entendait des bruits de l'extérieur, et notamment qu'on entendait le chien du voisin aboyer. C'était sur quel morceau ? Parce que je n'ai jamais trouvé...

TW : C'est la légende...

C'est vous qui l'avez raconté !

AS : On entend même la mère de James passer l'aspirateur. Ou le laitier siffloter.
TW : En fait, on ne fait pas de chichis quand il s'agit d'enregistrer « professionnellement ». Je veux dire, on est très pros quand on enregistre mais on ne suit pas à la lettre toutes les règles. On ne s'isole pas du monde extérieur. Et c'est très important. La sonnette de la porte d'entrée pourrait retentir en fond sonore – ou pas. Mais le fait que cette possibilité existe, c'est ça qui est chouette.

Et c'est la même chose pour Volcano  ? Vous l'avez aussi enregistré à la maison ?

AS : Oui. Mais c'était une autre maison. L'environnement était plus silencieux.

 

Vous avez de nouveau produit cet album vous-mêmes.

Tous les deux : Oui.

Est ce que vous pourriez travailler avec quelqu'un d'autre ?

AS : Ça serait très intéressant pour nous de travailler avec quelqu'un d'autre, dans le futur. Mais on ne l'a jamais fait jusqu'ici, alors c'est dur de dire si ça fonctionnerait ou pas.

TW : Pour l'instant, c'est presque une nécessité de produire nous-mêmes. Vu la façon dont nous écrivons, dont nos travaillons créativement, ce serait difficile d'enregistrer des démos, et puis de ré-enregistrer des démos avec quelqu'un d'autre... C'est une partie tellement importante de notre processus créatif, que c'est parfois difficile de la séparer de l'enregistrement lui-même. En définissant quels aspects de ton son conserver, un producteur extérieur prend une part prépondérante dans le processus créatif. Donc c'est une chose à laquelle il faudrait réfléchir sérieusement...

En parlant de collaboration extérieure, est ce que vous pourriez écrire des chansons pour quelqu'un d'autre ?

AS : Je ne pense pas que c'est quelque chose qui nous intéresserait énormément...
TW : On a besoin de garder pour nous toutes les chansons qu'on arrive à écrire ! (rires)

Est ce que vous allez sortir des b-sides ?

TW : On ne pense pas sortir des b-sides sur vinyle pour cet album. Je pense qu'on veut faire les choses différemment du premier album, qui était, lui, très orienté vinyle.
AS : Peut être qu'on pourrait sortir un EP de b-sides potentielles...
TW : Un coffret...
AS : Oui, il y aurait plus à écouter
TW : Un best-of... (rires)
AS : Oui, on pourrait faire ça

Est ce que vous prenez comme un compliment qu'on vous dise que vos chansons sont « entraînantes » ?

Tous les deux : ...Oui ?

TW : Ça peut vouloir dire énormément de choses. Mais c'est la plus belle chose que la musique puisse t'apporter, quand tu écoutes et que tu réécoutes un morceau, qu'il t'attire irrésistiblement, pour quelque raison que ce soit... En ce qui nous concerne, on essaie toujours d'insuffler une certaine profondeur à notre musique, de faire qu'il y ait plusieurs niveaux d'écoute, que la personne qui écoute puisse découvrir des choses à chaque fois. Et puis, ça rend les choses plus intéressantes pour nous aussi. Dire à certains artistes que leurs chansons sont entraînantes revient à leur dire que leurs chansons sont « simples », voire simplistes, répétitives...

AS : La simplicité n'a rien de honteux. La répétition non plus. Les plus beaux morceaux jamais écrits comportent tous une part de simplicité et de répétitivité.

Vous aviez dit que le second album serait plus collaboratif, en terme de composition. Je suppose que ça a été le cas, mais quelle forme est ce que cela a pris ? Est ce que chacun d'entre vous apporte une mélodie, ou un texte et vous travaillez tous dessus ou bien est ce que la composition part d'une improvisation ?

AS : Ça dépend de chaque chanson, ça varie beaucoup. Parfois on écrit séparément, parfois on va tous travailler ensemble, soit sur les paroles, soit sur la musique...

TW : Ça dépend aussi, si une chanson est composée sur un instrument qui n'est pas celui dont on joue sur scène... Ça dépend vraiment de chaque chanson, en fait... Mais une chose est sûre, il y a plus d'auteurs-compositeurs sur Volcano que sur l'album précédent. Et c'est vraiment comme ça qu'on voulait procéder pour cet album.

AS : Mais en tout cas on ne « jamme » pas, on n'improvise pas, ou très rarement, et ce n'est pas de là que proviennent nos idées. Pas la majorité en tout cas. Et pas consciemment. (A Tom) on devrait peut être jammer plus souvent.

TW : On est un groupe très orienté « studio ». On l'a toujours été. C'est de cette façon qu'on fonctionne.

Vous dites que vous êtes un groupe de studio mais en vous voyant sur scène, on a l'impression que vous retravaillez sans cesse vos morceaux pour la scène.

TW : En tant qu'artiste et interprète, tu dois encore et toujours peaufiner tes morceaux. Les chansons évoluent en même temps que toi. Même les morceaux de Volcano ont déjà changé depuis qu'on les a enregistrés. Et je suis sûr que ça va continuer.

Thomas, maintenant tu joues des claviers et de la basse en même temps sur scène ?

TW : Parfois en même temps, oui.

Est ce qu'il a fallu t'entraîner beaucoup ?

TW : (il rit) J'y travaille toujours ! J'ai toujours attaché beaucoup d'importance au fait de me rendre aussi utile que possible... Si tu as un bras ou une jambe de libre, autant l'occuper...

Tu comptes devenir un homme orchestre ?

AS : (rires) Il m'a copié. (NDLR : Adam joue des claviers et de la guitare sur scène depuis les débuts de Temples). C'est moi qui ai donné naissance au combo claviers-guitares au sein de Temples.

 

Votre premier album était très lumineux, très contemplatif avec beaucoup de références à la nature, par contre j'ai trouvé que ce second album était plus sombre.

AS : Il est beaucoup moins romantique que le premier, c'est certain.

Une chanson comme « How Would You Like To Go » a un son plutôt sinistre, non ?

AS : Absolument.

Avec des paroles comme « How would you like to go ? », « Would you like to know », c'est une chanson sur la mort ?

AS : C'est absolument une chanson sur la mort.
TW : On est tous plus ou moins obsédés par la mort, non ?
AS : Je pense que c'est une mantra sur laquelle il est très important de s'attarder. C'est un message très positif... Une fois que tu as pris conscience de ta propre mortalité, tu commences à t'amuser et à d'autant plus apprécier la vie.
TW : Certaines chansons sont assez sombres, mais c'est une façon de célébrer la vie... La vie est parfois sombre.

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Le visuel de Volcano est assez trompeur en ce sens parce qu'à première vue on se dit « c'est joli, c'est lumineux, il y a plein de couleurs vives, c'est joyeux » et puis on écoute les textes et ça n'est pas si joyeux que ça...

AS : Non non, il y a des moments drôles dans cet album, il a un côté humoristique que les gens ne remarquent pas. Mais vous avez raison, c'est un album plus sombre. Même si la musique elle-même est plus festive. Ce qui est intéressant, c'est ce mélange d'ombre et de lumière, il élargit la portée de notre musique.

Oui, un autre exemple, c'est « All Join In ». La musique est très entraînante mais avec des paroles comme « future is a dying game » ou « soon, there will be nothing left for you to laugh about »...

AS : C'est une autre chanson sombre... Mais il y a aussi de l'humour dans celle-ci ! Bon, un humour un peu malsain, certes...

Mais elle n'en n'a pas l'air à première écoute... Et puis, tu prêtes attention au texte, et là...

AS : C'est comme les comptines ou ces très vieilles chansons que tout le monde connaît... Les textes sont en général assez horribles ! Je pense que c'est quelque chose de très anglais.

TW : Je pense qu'on a naturellement tendance à écrire de la musique assez entraînante, qui a toujours une composante assez euphorique, mais on voulait écrire des textes un peu plus introspectifs. Ça nous a semblé être une bonne combinaison.

Est ce que l'endroit où vous vivez a eu une influence sur votre écriture ? Vous dites que certains éléments de vos compositions sont typiquement anglais et je suis bien d'accord avec vous...

AS : C'est difficile à dire. Pour une partie d'entre eux, je ne saurais même pas dire d'où ils proviennent.

TW : Quand tu subis certaines vicissitudes et certaines épreuves dans ta vie, c'est très britannique de le dissimuler...

AS : ...de te plaindre, mais pas d'une manière directe, d'étouffer tout ça... sans pleurnicher. Je pense que Volcano n'est pas un album pleurnichard.

TW : Non. L'album ne te laisse pas une impression lugubre... il répond aux questions qu'il pose. Dans chaque chanson.

En parlant de choses typiquement britanniques... Le Brexit... Votre pays a officiellement débuté le processus pour sortir de l'Union Européenne. Je crois me souvenir que vous aviez partagé sur les réseaux sociaux que vous souteniez le camp du « Remain ».

Tous les deux : Oui, évidemment !

Et juste après le référendum, vous jouiez lors d'un festival en France et vous vous êtes excusés pour le Brexit.

AS : On était extrêmement gênés du résultat du vote... On l'est toujours.

TW : On se sent Européens, pas seulement Anglais.

AS : Comme un pourcentage élevé de la population en fait. Mais les élections générales ont été avancées en juin, alors qui sait ? Il y aura peut être une solution pour éviter le Brexit, une manière d'annuler les résultats du référendum..

Encore pire, le Brexit pourrait initier une genre de réaction en chaîne. Dans d'autres pays, en France même, certains responsables politiques commencent à prendre l'Angleterre en exemple et disent qu'on devrait faire la même chose.

AS : On vit dans un monde effrayant...

 

Qu'est ce que vous écoutez en ce moment ? On doit vous poser cette question tout le temps, mais on a découvert plein de groupes via des recommandations d'artistes.

AS : Est ce que vous voulez vraiment savoir ? (rires) On écoute pas mal de choses en ce moment. Cleaners From Venus. C'est un groupe des années 80. Ils sonnent un peu comme un groupe des années 60 qui aurait mal tourné dans les années 90. Leur songwriting est vraiment super, c'est un groupe qui vaut vraiment le détour.

TW : Beaucoup de Genesis. Todd Rundgren, Utopia. Bill Nelson de Be Bop Deluxe, beaucoup de son travail en solo.

(Et bientôt, Rémy Bricka)

Est ce que vous vous investissez beaucoup dans la conception des visuels de vos albums ?

AS : On s'est beaucoup plus impliqués dans la couverture de Sun Structures... Pour Volcano, on est entrés en contact avec un artiste graphique, Jonathan Zawada. On lui a envoyé quelques chansons et on lui a donné quelques indications sur la signification de certains morceaux. Il nous a proposé plusieurs ébauches. Parmi elles il y avait la clé... Pas exactement celle qui est maintenant sur la couverture mais on a beaucoup échangé à ce sujet. Ca a été un travail collaboratif mais c'est lui qui a amené l'idée principale, qu'on a trouvée géniale dès le départ.

TW : Ca nous a semblé coller très bien aux thèmes de beaucoup des chansons... L'introspection et la réalisation de son potentiel... Est ce que la clé verrouille ou déverrouille le cadenas ? Peut-être un peu des deux.

Parlant d'artwork, vous avez rendu le Triangular Lodge célèbre dans le monde entier...

AS : C'est possible. C'est un bâtiment assez impressionnant, assez irréel, comme un vaisseau spatial au milieu de la campagne... Des Japonais nous ont montré des photos, ils étaient venus en Angleterre et il étaient allés voir le Triangular Lodge, c'était plutôt cool.

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Est ce qu'ils avaient imité la photo de la couverture ?

AS : Je crois bien.

Il y a une question que je pose à tous les compositeurs parce que je suis assez fascinée par le sujet... Beaucoup de songwriters disent en substance qu'on n'écrit pas de la musique, mais que la musique s'écrit toute seule, et qu'ils se sentent un peu comme des médiums qui ne feraient que retranscrire une musique qui existerait déjà...

AS : C'est assez vrai. Je crois que chacun d'entre nous est créatif mais ne sait pas forcément comment utiliser sa créativité. Alan Moore, le scénariste de BD qui est originaire de Northampton, dit que toute personne créative est une sorte de magicien... De la même manière qu'un magicien fait sortir un lapin d'un chapeau, une personne créative va faire apparaître une mélodie de nulle part... Donc oui, c'est un genre de magie...

Crédit photo : © Alan VAN BRACKEL
Interview : Sandrine LILSAN & Alan VAN BRACKEL

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