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Black Box Revelation + John Rattray à l’Aéronef

Grosse grosse frayeur en arrivant devant l'Aéronef ce samedi 9 octobre! En voyant l'entrée de la salle envahie de jeunes en slimard arborant perfecto, converses griffées, t-shirt de créateur, mèche savamment négligée devant les yeux, toute la panoplie de la révolte chic versaillaise, on se dit qu'on est à côté de ses pompes, qu'on s'est trompé de date. Tous ces BB Rockeurs, pour qui le Rock n'est né qu'avec les Strokes et The White Stripes ne peuvent être là que pour les BB Brunes, ce groupe français acnéique que certains critiques n'ayant pas peur de perdre toute crédibilité (devinette: l'un d'eux s'est fourvoyé dans du télé-crochet, seras-tu deviner lequel?) ont mis sur un piédestal (mwouahahah, rire gras de vieux con) et bientôt programmé en ces lieux. Mais quelques visages moins fashion et moins juvéniles nous rassurent. Ce soir, c'est un bon groupe qui foule les planches de l'Aéronef. Les belges de Black Box Revelation qui, en deux albums et en tournant incessamment, ont su créer le buzz autour d'eux.

Ce sont des petits gars bien de chez nous qui ouvrent les hostilités. Le groupe lillois John Rattray. Ou plutôt The Brightest Outlook, Béranger, le chanteur, annonçant ce soir-là le changement de nom du combo. Formé également de Fred et de Guillaume à la guitare, d'Olive à la batterie et de Charles à la basse, les membres de The Brightest Outlook, visiblement ravis de se produire à l'Aéronef, présentent les morceaux de l'album qu'ils vont prochainement enregistrer. Les compositions sont orientées Punk/Hardcore avec des touches de Métal ou de Skate Music. Rien de bien étonnant en soi, l'ancien nom du groupe faisant référence à un champion de skate. Le tout est énergiquement joué, parfaitement maîtrisé, à la fois sec et nerveux, carré et violent... Le chanteur, très communicatif avec le public, témoigne d'un savoir-faire viril dans les rugissements et les grognements inhérents à ce style musical et le groupe, dans son ensemble, se montre très à l'aise sur scène. Un set court (30 minutes), resserré, efficace, prometteur quant à l'avenir de ce groupe.

Second passage de l'année dans la métropole pour Black Box Revelation qui avait eu les honneurs d'ouvrir pour Iggy Pop au Zénith de Lille au mois d'avril. Le duo composé de Dries Van Dijk à la batterie et de Jan Paternoster au chant et à la guitare, ayant pourtant réussi l'exploit de jouer plus fort que l'Iguane et ses Stooges, avait alors divisé l'assistance, une grande part du public (sûrement trop impatiente d'en découdre avec son idole) n'ayant goûté que du bout des lèvres les déferlantes guitaristiques du groupe et se sentant agressée par leurs jeux de lumières violemment stroboscopiques. Mais ce soir, dès le morceau d'entame, « Run Wild », l'ensemble des spectateurs est conquis et l'ambiance sera à la fête durant tout le concert, les BB Rockeurs, dans leur prime jeunesse, se chargeant de rendre bruyamment hommage aux musiciens belges en levant le poing, en criant et en martelant le sol de leurs jumps endiablés. Un pur moment de Rock N' Roll comme on aimerait en voir plus souvent.

De ci de là, on a souvent pu voir BBR comparé au groupe britannique Oasis en raison d'une certaine ressemblance physique et vocale de son chanteur avec ce roi des branleurs qu'est Liam Gallagher, dont le seul moment d'intelligence dans son parcours artistique fut d'avoir mis fin à la carrière de son insupportable groupe (qui n'a jamais soutenu la comparaison avec leurs rivaux de toujours, les géniaux Blur). Une comparaison absurde, Jan Paternoster ressemblant davantage à Richard Ashcroft, chanteur de The Verve, et la musique de BBR et d'Oasis n'ayant strictement rien à voir. Alors que la Pop Music FM pour midinettes d'Oasis copiait les grands de la Pop anglaise, les deux compères belges puisent leurs influences outre-Atlantique, particulièrement dans le Blues. Une musique du diable qu'ils abordent de manière décomplexée en la mâtinant d'un son garage ou d'envolées psychédéliques. Et le résultat est particulièrement brillant et bluffant. L'air de rien, Jan Paternoster s'impose comme un des jeunes guitaristes les plus talentueux que le Rock européen nous ait permis d'entendre ces dernières années enchaînant sans temps morts riffs et solos inspirés et électrisants, s'inscrivant dans la grande tradition des guitar-heroes des seventies tout en faisant preuve d'une réelle personnalité et de modernité. Un talent à la six-cordes qu'il embellit, qu'il pare de sa voix particulière, désinvolte, rocailleuse et sexuelle.

Bénéficiant également de la hargne du non moins talentueux Dries Van Dijk à la batterie, véritable performer métronimique derrière ses fûts, le duo livre un concert puissant, violent, à la sensualité crasseuse, invoquant le spectre du Sex, Drugs & Rock N' Roll, donnant la furieuse envie de se plonger dans le stupre. Et démontre une nouvelle fois sa tendance à repousser les limites du son, jouant à un niveau de décibels rarement entendu ailleurs. Être fan de BBR et les suivre à chacune de leur date provoque une surdité précoce. Mais des bombes telles « 5 O Clock Turn Back The Time », « High On Wire », « Do I Know You » ou le monstrueusement psychotrope « Here Comes The Kick » qui vient clore en beauté le concert méritent largement que nos tympans périssent sur le joyeux champ de bataille du Rock.

Black Box Revelation, ne souffrant d'aucune comparaison possible avec les formations guitare-batterie américaines The White Stripes et The Black Keys, prouve que la Belgique, une fois de plus, après Deus, Zita Swoon, Ghinzu, est un des pays les plus excitants pour nos oreilles à l'heure actuelle.

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