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Daniel Darc + Greenshape au Grand Mix – Les Paradis Artificiels 2012

Greenshape, « la forme verte ». Non ne vous parlerons pas ce soir de comics inspirés par Marvel ou d'autres dessinateurs. Car derrière ce nom particulier se cache Régis Israël, Valenciennois trentenaire, ancien boxeur et nouvelle sensation folk du moment.

La boxe, ainsi que les coups durs de la vie, lui ont donné cette combativité remarquable qui le pousse, pendant trois mois, à envoyer chaque jour un de ses morceaux au label « Sober & Gentle » (Hey Hey My My, Cocoon, …). La pugnacité paie, puisqu’en octobre 2011 sort « Storyteller », petit bijou de folk emmené par des textes souvent autobiographiques. En effet, Greenshape s’inspire de sa vie, de ses échecs, des marques que le temps et les êtres que l’on croise sur sa route laissent le plus souvent. En somme rien que du vécu. Même s’il n’utilise que très rarement le « je », on sent qu’il a traversé des périodes difficiles. Les textes sont délicats, ils vous étreignent le cœur sans jamais le faire pleurer. Son personnage est en contraste avec ce qu’il nous délivre sur scène : un crooner tatoué du genre mauvais garçon, qui chante des balades folks envoutantes.
Inspiré par les années 60 et 70, par les Beatles, Cat Stevens ou Leonard Cohen, Greenshape écrit à la manière de séquences filmées. Chaque titre nous raconte une histoire, et il nous suffit de fermer les yeux pour entrer dans le jeu. La voix est chaude, profonde, les arrangements soyeux sont capables de vous arracher des frissons, sans jamais tomber dans le pathétique. Chacun peut y retrouver une part de lui-même.
Sur scène, Greenshape a su s’entourer, à ses débuts ils n’étaient que deux. Aujourd’hui ils sont quatre : deux guitares, une basse et une batterie. L’ajout d’instruments rend l’atmosphère différente, car moins épurée mais toujours aérienne. Et parfois même dramatique, quand il entonne Storyteller au clavier. Les musiciens se plaisent à mélanger les genres : rock, électro, folk. Le tout pour embarquer le public loin très loin au dessus de la terre, et cela sans substances interdites. Et puis, Régis est plus à l’aise, la voix est beaucoup plus assurée. Heureusement, elle laisse passer toujours autant d’émotions. A un moment, il nous parle de son expérience en première partie de Daniel Darc qu’il a vécu comme une aventure formidable. Il ajoute que ce soir est particulier, car c’est leur dernière date avec Daniel et qu’ils sont de retour chez eux. Nous avons droit à toutes les chansons de l’album, et le set se termine sur la très belle Feel Better et ses faux airs de bossa nova.
Greenshape, contrairement à ce que son nom laisse entendre est bien réel, et palpable, son album « Storyteller » est à écouter, en boucle, le long d’une route de campagne enneigée ou au coin du feu. En attendant la suite de ses histoires, Greenshape sera cet été au Main Square. Gageons que la nouvelle sensation folk ne s’évanouira pas de sitôt, et qu’elle a de beaux jours devant elle !

Daniel Darc aura 53 ans cette année. Un âge où l’on a vécu. Et c’est le moins que l’on puisse dire pour lui ! En 1978, avec ses potes de lycée, Daniel rejoint Taxi Girl, groupe de rock du genre inclassable. Ce sera le début de tous les excès ! Drogue, alcool... En 1986, le groupe se sépare, suite à la mort d’un des leurs et au départ des autres membres. Daniel commence alors une carrière solo, ponctuée de nombreux albums. Citons par exemple « Sous influence divine » en 1987, ou « Le Meilleur » en 2003. En 2008 il sort « Amours suprêmes » et puis plus rien… Jusqu’à ce début d’année 2011 où il nous livre « La Taille de mon âme». Depuis, il enchaine les concerts et c’est, comme à son habitude, vêtu d'un jean avec un tee-shirt noir laissant apparaitre les tatouages de ses bras et des lunettes de soleil, qu’il entre en scène. Si le Monsieur a toujours su s’entourer : Jacno, Bill Pritchard, Etienne Daho, Georges Betzounis lors de ses créations, il participe également à la production de plusieurs artistes comme Cali, Elisa Tovati ou Thierry Amiel.
Ayant longtemps pratiqué le karaté, il compare un peu l’écriture à un entrainement. A la fin l’album est apprécié comme un combat. Reste à savoir s’il en ressort victorieux à chaque fois ! Mais ne tombons pas dans les clichés le laissant apparaitre comme un revenant, un survivant, vu ses multiples excès. Concentrons-nous sur ce qui nous amène ce soir : la musique. Et il y a beaucoup à dire ! Tout d’abord sur les instruments qui l’accompagnent : rien de plus qu’un violoncelle et un piano à queue. L’effet est saisissant et l’atmosphère appartient plus à un concert intimiste et acoustique qu’à un grand déballage de rock. Une ambiance dépouillée donc, qui se concentre sur l’essentiel : les textes. Des textes qui parlent de l’amour, le vrai celui qui vous casse et qui vous pousse en même temps, de la déchéance du corps et de l’esprit. De ces démons intérieurs qui vous bouffent la vie mais de qui on ne se sépare jamais vraiment. Une aura de poète maudit flotte constamment autour de Daniel Darc. Il nous enchante, ou nous arrache presque une larme de sa voix rauque et nasillarde. Il nous fait rire également par ces petites piques cyniques dont il raffole. Tout cela avec ses gestes saccadés, quasi-épileptiques. Par exemple, il se présente après C’est moi le printemps par un « Benjamin Biolay…. J’fais des progrès non ? ». On a le droit à Serais je perdu, La pluie qui tombe, J’irai au Paradis, Un an et un jour, L.U.V. …. Sur Ca ne sert à rien, le trio nous captive avec une rythmique flûte traversière et violoncelle magnifique. Car si le personnage très « dark » de Daniel fait beaucoup, on ne peut que saluer le grand talent de ceux qui l’accompagne. Avant de quitter la scène, Daniel nous lit un texte biblique, comme un point d’orgue à son fil conducteur de la soirée : la religion. Juif d’origine, il se convertit au protestantisme en 1997. Depuis, la religion le suit, le porte, le consacre, comme dans Soit sanctifié qui précède justement la lecture de ce texte. Daniel Darc nous emmène dans son univers, mais plus qu’une catharsis, ses textes ressemblent à un état des lieux de sa vie pas du tout désespéré.
Au moment du rappel, une femme dans l’assistance crie « La taille de mon âme ! » soulevant des sifflements et des applaudissements dans le public, plus nombreux et expressif que lors de la première partie. Daniel se marre…. Il faudra encore attendre un peu avant de l’entendre puisque c’est sur C’était mieux avant qu’il commence. Et puis tout finit par La taille de mon âme. Car oui, Daniel Darc a une âme en version XXL. Pleine de douleur, de chaos, d’amour, de désir, de choses inavouables. Et pourtant, il sait se rendre proche de nous, public attentif et passionné, qui reste malgré tout borderline, ayant peur probablement de se pencher trop et de tomber comme lui au fond du gouffre. Heureusement, il a su remonter la pente et nous a offert un très bon moment en sa compagnie !

C’est aussi ça le pouvoir des Paradis Artificiels !

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