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Daran & Guillaume Ledoux à la MJC Athena de Saint-Saulve – Festival A Travers Chants

17 ans déjà que la MJC de Saint-Saulve rend hommage à la chanson française en organisant le festival « A Travers Chants ». Un festival convivial qui, malgré un budget serré, permet chaque année, grâce aux efforts de ses organisateurs, de mettre en avant la variété du paysage musical hexagonal et de réunir des artistes de différents horizons et univers. Ainsi, les fidèles de cette manifestation ont pu applaudir au fil des ans des chanteurs ou groupes aussi divers que La Grande Sophie, Saule et les Pleureurs, Pep's, Les Fatals Picards, Jacques Higelin, Emily Loizeau ou Blankass.

C'est d'ailleurs Guillaume Ledoux, chanteur de Blankass, qui ouvre cette soirée du 05 mars 2010. En marge de son groupe (qui, rassurons les fans, n'a pas du tout splitté), le chanteur est parti, depuis quelques semaines, sur les routes avec l'envie d'offrir des compositions qui lui sont plus personnelles. Dans le cadre intimiste de la salle Athena de Saint-Saulve, le chanteur-guitariste, assis sur un tabouret, éclairé par une simple lampe de bureau posée sur une petite table basse devant lui et accompagné de son fidèle compère Cédric Milard au piano (membre également de Blankass) livre une prestation à la fois tendre et touchante. Ses chansons, très visuelles, sont des instantanés, des petites nouvelles qui nous racontent le parcours de gens simples attachés à leurs terres (« Marie, mon amie ») ou de boxeur ayant perdu l'envie de prendre les gants (« A terre », hommage émouvant à Fabrice Bénichou), nous narrent des histoires d'amours déçues ou parlent du désenchantement d'un homme de trente-huit ans. Un homme de trente-huit qui a su garder intacte la fraîcheur de son adolescence et la révolte qui l'accompagne. Une révolte exprimée avec sensibilité et sans discours moralisateur ou démagogique quand le chanteur évoque en musique le sort de Zolboot, enfant originaire de Mongolie, sourd et muet, bénéficiant de soins en France et qui est menacé d'expulsion alors que, dans son pays d'origine, aucune structure adéquate ne pourra le soigner et le faire progresser. Déclarant « n'avoir écrit des chansons que pour plaire aux nanas », Guillaume Ledoux se révèle, en fait, un homme sincère et intègre.

Des qualités qui définissent également Daran, tête d'affiche de la soirée. Artiste dont le répertoire navigue entre rock et chanson, Daran est un véritable électron libre dans le paysage musical français. Un chanteur quelque peu oublié des médias mais que les fans (nombreux ce soir-là) chérissent comme un trésor caché, guettant inlassablement chacun de ces passages. En effet, aux yeux de beaucoup, Daran est plus qu'un simple chanteur mais un véritable compagnon de vie. Ses albums (les hautement recommandables « J'Evite Le Soleil », « Huit Barré », « Déménagé », « Augustin & Anita », « Pêcheur De Pierres » et « Le Petit Peuple Du Bitume ») sont des oeuvres qui, lorsque l'on a la chance de les connaître, vous accompagnent tout au long de votre existence, dans lesquelles on se plonge et on se replonge et que l'on prend plaisir à faire découvrir autour de soi. D'ailleurs, dans la salle, se trouvaient des adolescents à qui les parents avaient transmis le virus.

Depuis presque vingt ans, Daran, à travers des textes acérés et sombres, chante la perte des illusions, la révolte vis-à-vis d'une société de plus en plus inhumaine, superficielle et conformiste mais aussi l'amour, désabusé ou heureux. Ses chansons sont de véritables odes à la liberté individuelle, au droit à la fragilité et à la différence, interprétées de manière déchirante avec sa voix d'écorché vif.

Mais attention, en live, Daran n'a rien de l'artiste torturé et dépressif. Véritable bête de scène sur laquelle il est comme un poisson dans l'eau, chaque concert est pour lui une fête et l'occasion de s'amuser et de communiquer généreusement avec son public fidèle. Cette date, qui suit la sortie de son best-of « Couvert de Poussière », en est une preuve supplémentaire. A l'aise sur scène, il se moque de lui-même et de son âge (50 ans) en voyant des ados dans le public, gère avec humour les quelques problèmes techniques rencontrés (problèmes de jack ou de guitare désaccordée). Et, surtout, il livre un magnifique résumé de sa carrière. Accompagné de ces fidèles musiciens, Erik Fostinelli à la basse, Stephane Terranova à la guitare, Frank Terranova aux claviers et à la guitare et Jean-Daniel Glorioso à la batterie, il revisite avec brio différents titres de sa longue discographie en les proposant dans des versions réarrangées et très rock en mettant les guitares en avant,

Défilent ainsi des morceaux aux thématiques sociales cheres à l'artiste (les, malheureusement, toujours d'actualité « Olivia » sur le licenciement d'un ouvrier ou « Augustin & Anita » sur le sort des SDF), des titres sur l'uniformisation de notre société (« Publicité », « Extreme »), des chansons émouvantes sur l'amour et la difficulté de le gérer (« Via Felicita », « Le Mouvement Des Marées », « Télévision ») mais aussi sur l'amour heureux (« Anatomique » et, surtout, « Une Sorte D'Eglise», l'une des plus belles chansons d'amour jamais écrites) et des classiques comme, bien évidemment « Dormir Dehors » pour lequel il avait été nommé aux victoires de la musique en 1996. Sur chacun de ces morceaux, Daran et ses musiciens se lâchent et montrent leur dextérité en livrant une prestation énergique et enjouée. Le tout emballé par la voix extraordinaire de Daran qui, à chaque fois, offre une interprétation habitée de ses magnifiques textes

Le concert, qui durera presque deux heures, se conclura par deux rappels, le public se refusant de voir Daran et ses musiciens quitter la scène, et une standing ovation. Faisant écho aux paroles d'introduction d' « Oublie Tout », première chanson interprétée par le chanteur ce soir-là: « Est-ce que tu penses que je dépasse suffisamment pour faire un trou à la surface et risquer une vie moins fade ? », cette standing ovation a permis de répondre par l'affirmative à cette question et de prouver tout l'amour et l'attachement que l'on peut éprouver pour cet artiste.

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