Aujourd’hui39 événements

Duo Aquilon aux Nuits De La Crypte au Centre D’Art Sacré

L'aquilon... Un souffle venu du nord qui n'a pas manqué d'inspiration par les airs expirés du duo éponyme. En ce vendredi saint du 25 mars 2016, le souvenir de l'expiration du Christ a été accompagné par un concert du Duo Aquilon qui nous a été offert dans le cadre des Nuits de la Crypte. Ni orchestre, ni instruments harmoniques d'aucune sorte pour ce duo lillois surprenant et exceptionnel. La flûte traversière de Flavien Bassimon et la voix de contre-ténor de Nicolas Zielinski ont fait vibrer le Centre d'Art Sacré.

Dans la crypte moderne de la cathédrale Notre-Dame de la Treille, trois grandes peintures illustrant avec violence la Passion du Christ créent le décor derrière lequel se détachent deux simples pupitres. Qu'il s'agisse des œuvres picturales présentées, comme La Déposition d'Ian Hugues ou bien, des œuvres musicales exhalées par le Duo Aquilon, les souffrances du Christ et de Marie ont été transfigurées en esthétisme total.

Stabat mater dolorosa... Elle était debout la Mère malgré la souffrance... Dans cette prière, nous sommes invités à partager la douleur de la Vierge face à son fils mort. Les célèbres et splendides Stabat Mater de Vivaldi et Pergolèse nécessitent notamment l'emploi d'une basse continue. Le Duo Aquilon, en transcrivant ces œuvres pour une seule flûte traversière et un contre-ténor, nous emmène dans les hauteurs. Sans le support harmonique et le socle des sons graves, les aigus des deux musiciens nous donnent le sentiment du céleste. Littéralement inouï, la musique du duo est comme diaphane. L'écho sur les hauts murs de la crypte a rendu la musique encore plus irréelle et impalpable. Les textes ont eux aussi résonné grâce à l'interprétation sincère et à la perfection musicale.

Un sentiment de pureté... Les transcriptions pour une telle formation nécessitent d'aller à l'essentiel de la partition. Les harmonies sont suggérées et nous avons le sentiment de renouer avec l'essence et l'âme des compositions. Pour concentrer une musique orchestrale en deux monodies, la virtuosité des interprètes est nécessaire. Ainsi, au travers de traits d'une agilité extrême, l'harmonie d'un continuo cède sa place à un contrepoint à la flûte qui suggère à lui seul l'harmonie d'un ensemble instrumental complet. La transcription et l'interprétation du brillant Sorge l'Irato Nembo tiré d'Orlando furioso de Vivaldi a montré l'exploit et la réussite de ce pari musical époustouflant.

Voix de flûte... La voix de contre-ténor a pris de nombreuses appellations comme une preuve de son caractère indéfinissable. Des compositeurs comme Scarlatti utilisait cette voix pour symboliser la voix de Dieu. Cette voix d'homme qui va dans l'aigu, qu'on associe instinctivement au registre féminin, semble presque inhumaine et divine. La virtuosité, les nuances pianissimo dans des suraigus, la puissance interprétative et le timbre indéfinissable ont donné à l'écoute de ce chant un sentiment quasi mystique.

Sur le Fat uc mortem du Stabat Mater de Pergolèse, le contre-ténor a donné l'impression de sortir des nuées et la flûte a semblé donné des coups d'archet. Comme Pergolèse, mort à 26 ans mais qui a laissé une si grande empreinte, la valeur n'attend pas le nombre des années pour le jeune Duo Aquilon. Comme une continuité du souffle et de la voix, la flûte fut le premier instrument de musique de l'humanité. Les deux voix du Duo Aquilon se mêlent comme d'évidence avec subtilité et raffinement. Emplis d'audace, capable de revisiter des maîtres de l'orchestration comme Berlioz sous une toute autre forme, Flavien Bassimon et Nicolas Zielinski prennent un véritable parti artistique. La musique savante est bien vivante.

Revenir aux Live report Concerts
A lire et à voir aussi
294 queries in 0,404 seconds.