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Eli Paperboy Reed & The True Loves et Eldia à l’Aéronef

Soirée « Retour Vers Le Futur » en cette date du 30 avril 2010 à l'Aéronef. En effet, le public présent ce soir-là, tel Marty Mc Fly et le Doc dans leur De Lorean trafiquée, a pu voyager dans le temps pour oublier la morosité du quotidien. Mais alors que le personnage incarné par Michael J. Fox se retrouve plongé en plein dans les années cinquante dans le premier volume de cette formidable trilogie cinématographique, les lillois, eux, sont projetés au milieu des années soixante. Une période musicale d'une incroyable richesse principalement marquée par la luxuriance de la pop britannique (grâce à un obscur petit groupe de quatre morveux ayant pris un drôle de sobriquet, mal orthographié en plus, signifiant « les scarabées ») et la suavité de la musique noire américaine en pleine effervescence grâce à des génies (des dieux?) tels que Otis Redding ou James Brown et aux innovations de la Stax et de la Motown. Ce sera à ces deux idiomes musicaux que la soirée sera consacrée.

 

Dans un premier temps, plongée dans le Swingin London des sixties avec le jeune groupe parisien Eldia (traduisez « le jour ») qui vient de sortir, après un premier LP autoproduit And All The People On The Ship Say Hand Lo , son second album Yayaya (équivalent espagnol du fou rire virtuel « lol »). Nul besoin d'être un esthète musical pour s'apercevoir que le combo est fortement influencé par ce qui se faisait de mieux outre-manche dans les années soixante en matière de Pop Music. Les références aux Beatles, Byrds ou autres Kinks, sont plus que perceptibles. Des références, malheureusement, plus ou moins bien maîtrisées... Si des morceaux comme le premier single du nouvel album « Favorite Murderer » offrent un plaisir immédiat par la finesse d'écriture et l'évidence de la mélodie ou d'autres, tels ce « Kenneth Anger Satanic Blues », joué en final, étonnent en étant tout à la fois sombre et entraînant, certaines chansons laissent de marbre et peinent à convaincre complètement car ressemblant trop à des copier-coller de tubes des groupes pré-cités. Le manque de charisme scénique du groupe n'arrange pas l'affaire. Néanmoins, on devine un fort potentiel chez ce groupe. Il ne demande qu'à être exploité pleinement et à s'exprimer à travers un travail plus personnel de composition afin d'avoir une signature qui lui est propre.

Véritable phénomène aux USA et en Grande-Bretagne, où il est attendu de pied ferme par tous les mods britanniques, (ce qui n'est pas le cas en France, le concert ayant lieu dans la petite salle du Club), Eli Paperboy Reed nous fait traverser l'Atlantique et nous fait revivre l'ambiance enfumée des clubs de Harlem ou de Chicago des années soixante. Dans la grande tradition des concerts Soul de l'époque, le groupe, multiculturel, composé à la fois de latinos, de blacks et de blancs-becs, arrive sur scène avant le chanteur. Commence une jam mêlant cuivres (deux saxophones, un alto et un baryton et une trompette), orgue, guitare, basse et batterie. L'organiste en profite pour invectiver le public, le chauffer et introduire ce beau gosse gominé qu'est Eli.

En costard, il bondit des coulisses, s'empare du micro et entame les premières paroles de la chanson « Satisfier ». Et tout de suite, c'est du miel qui coule dans nos oreilles. Jouant également de la guitare, Eli Paperboy Reed mouille la chemise, tombe la veste et comble les espoirs des amateurs de soul à l'ancienne présents dans la salle. A l'instar d'Alice Russel, présente lors des Paradis Artificiels, il y a quelques semaines, Eli est une erreur génétique. Il a beau n'être qu'un petit blanc né dans les années 80, sa voix et sa prestance rappellent celles des plus grands artistes noirs de l'âge d'or de la Soul Music américaine. Son timbre est d'ailleurs très proche de celui du regretté Sam Cooke, dont il reprendra, ce n'est pas pour rien, brillamment le fameux "Twistin' The Night Away". Certains grincheux pourraient avancer que « le livreur de journaux » n'invente rien. Laissons-les se fatiguer à ronchonner vainement. Le talent d'Eli Paperboy Reed est d'être, comme Ben Harper avec le Blues, un passeur, un musicien qui, avec virtuosité et panache, fait survivre le formidable héritage musical que nous ont laissé Stevie Wonder, Sam And Dave, Otis Redding, The Temptations... Et cela avec des titres ( « Name Calling », « Help Me », « Pick Your Battles »...) de son nouvel album Come And Get It et des chansons (« It's Easier », « Am I Wasting My Time »...), issues de son album précédent, le fabuleux Roll With You.

Comme tout grand artiste Soul qui se respecte, le chanteur est bien évidemment boosté par son groupe attitré, les impeccables True Loves, qui l'accompagneront et régaleront le public en prodiguant une musique noire authentique, vintage et classieuse. Et cela avec une joie de vivre perceptible et une envie communicative de faire la fête avec le public. Eli Paperboy Reed et ses True Loves casseront donc la baraque pendant près d'une heure et demie.

Il va sans dire que le retour au présent qu'imposa la fin de concert et l'architecture néo-laide qui s'impose à nos yeux à la sortie de la salle furent difficiles à négocier. Heureusement, l'auto-radio, sur la route du retour, permis de prolonger le plaisir et de nous donner l'impression de conduire notre propre De Lorean.

Lavomatik Session - Eli *Paperboy* Reed - It's Easier

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