Repérée il y a six ans lors d'un « cabaret-découverte » par l'association de chants amateurs et professionnels « Di Dou Da », Gaëlle Vignaux a souhaité réitérer l'expérience arrageoise. Après avoir raflé de nombreux prix (Grand Prix du Centre de la Chanson et Prix du Public « Vive la reprise 2010 », Grand Prix International Philippe Le Guy du Visa Francophone...) elle revient sur scène pour nous compter les anecdotes de la Cité Thorez.
Du haut de sa tour HLM, voilà un peu plus de 35 ans que Gaëlle Vignaux observe l'effervescence de son quartier de Malakoff : les vieux, leurs toutous en K-way et les mômes dans la cours de récré. Un melting-pot qui fait la part belle aux aléas du quotidien et à des personnages hauts en couleurs. Sa cité, elle aime la comparer "à un théâtre ou à une grande famille où tous ses membres, du plus âgé au plus jeune sont attendrissants. Même les plus bougons ».
Avec son look de Gavroche, bretelles et t-shirt ample, elle arrive baguette magique en main « C'est moi qui commande, c'est moi la chanteuse ! ». Son quatuor masculin (batteur, clarinettiste, guitariste, violoncelliste) débarque cagoulé et lui obéit au doigt et à l'oeil. Il ne s'agit pas là d'un hold-up mais juste d'un « souvenir de cartable ». Parce que dans notre jeunesse, on a tous eu une cagoule acrylique qui conservait les poux ! Eh oui, la femme-enfant a des histoires de bonbons, de chocolats et de bons points plein les poches ! Ses mimiques expressives la rendent sympathique : « J'aime faire des tronches pas possibles » confie-t-elle. On aurait presque envie d'en faire une copine et de partager une partie de marelle en sa compagnie ! Sa plume peut être tendre mais aussi aussi très incisive. Le titre « Les caddies » dénonce les « con-somateurs et leurs caddies tout pourris ». Elle tire la langue aux concours de « Mini-miss » et aux diktats de la beauté. C'est d'ailleurs ce sens critique qui la rapproche d'une autre invitée de ce festival, Melissmell. « Nous nous sommes rencontrées dans le cadre d'un stage mis en place par Pôle Emploi qui visait à faire avancer nos projets artistiques. Nous avons sympathisé, je lui ai proposé de venir dormir à la maison. On a discuté toute la nuit et depuis nous sommes restées en contact. J'aime sa voix, son naturel et son militantisme humain ». Les fans pourront applaudir ce tandem poétique et contestataire le 9 novembre au Trianon à Paris.
Sa dédicace à toutes les moches vaut, sans hésitation, le détour. Vous savez celles qui gardent les sacs de leurs copines en soirée? Dans un registre qui évoque, les mélopées de Zazie, elle fredonne l'indescriptible amour qu'elle porte à son fils Saska « même que pour toi je me remets à dire crotte de bique ». « Que fœtus? » s'inscrit dans la même veine.
Quant à « ANPE » (comprenait A Ne Pas Embaucher) la Malakoffiote nous met en garde au sujet de son aversion pour le monde du travail : les boudins, les sales gosses et les patrons condescendants n'ont qu'à bien se tenir. Et toc ! Faite de paroles grivoises, la chanson dédiée à sa mémé au langage châtier nous fait éclater de rire. Partie de cette belle maxime « On dit qu'un aïeul qui s'éteint c'est une bibliothèque qui brûle », Raymonde (la fameuse grand-mère) préfère dire que « la vie est une tartine de merde dont on en croque un bout chaque matin ». Les noms d'oiseaux fusent ! Quelques reprises de Linda Lemay et d'Anne Sylvestre, joliment interprétées, viennent ponctuer le concert. Largement ovationnée et rappelée à remonter sur les planches, elle gardera de cette rencontre des étoiles dans les yeux et repartira les mains garnies de fleurs.
