On l'attendait sur la touche pour remplacer sur le terrain, Rachmaninov. Et un, et deux, et voici le 3ème concerto du fameux pianiste et compositeur russe. Les 45 minutes de jeu ont été menées par Geoffrey Storm. Athlète musical, il n'en fallait pas moins pour exécuter cette œuvre considérée comme la plus difficile du répertoire pianistique.
Un peu marteau ? Le 3ème concerto a été popularisé par le film Shine. L’autre Geoffrey, Geoffrey Rush tient le rôle du pianiste un peu fou… Il faut au moins cela pour se lancer dans un tel répertoire. Helfgoot, longtemps interné, Rachmaninov, qui n'a pu se sortir de la dépression qu'avec l'hypnose, les interprètes de cette œuvre sont-ils condamnés au trouble ? Le déroulement musical respire l’odeur des lilas de Novgorov jusqu’aux palmiers de Beverly Hills. Ce concerto nous balade de flash-back en flash-back, de la musique romantique à la musique de cinéma, de mélodies simples comme une chanson populaire à une harmonie possédée par le jazz. Ce concerto nous ballote de lieux en lieux et d’époques en époques.
Un peu sportif ? La performance musicale évoque un autre pianiste et compositeur romantique, Franz Liszt. Loin de cette virtuosité ostentatoire, les acrobaties du 3ème concerto de Rachmaninov peuvent être comme furtives, avec des arpèges fous et des accords incroyablement fournis qui se dissimulent sous un orchestre enveloppant. L’interprétation de Geoffrey Storm nous a été offerte comme une création autant artisanale qu’artistique. Sa proposition musicale a su nous mettre face à face avec la partition. Il n’y eut pas de rubato excessif ou de grandiloquence démesurée qui peuvent souvent parasiter la pureté de l’écoute.
Rachmaninov lui-même ne pouvait assurer un rappel du public après l’interprétation de cette prouesse. Les hématomes au bout des doigts offerts par le concerto en ce 11 novembre 2016, n’auront pas eu raison du Nocturne de Chopin qui a été concédé au public. On est en droit de se demander si la performance athlétique et esthétique sera aussi sensationnelle le 4 février au Théâtre des Sources de Saint-Amand-Les-Eaux…
