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Izia + Blackfeet Revolution à l’Aéronef

Le coup de foudre fut immédiat. On avait d'yeux que pour elle. Que son nom à la bouche. Elle alimentait nos phantasmes. Nous faisait battre le coeur comme aucune chanteuse française n'avait su le faire. Sur notre petit nuage, on ne tarissait pas d'éloges à son égard.

Envers et contre tous. Contre les peine-à-jouir. Contre les méfiants. Contre les jaloux. Qui ne voyaient en elle qu'une fille de. Une pistonnée. Une arriviste surfant sur la mode du revival Rock. Une Janis Joplin du pauvre. La méprisant. La dénigrant. Rabaissant sa musique au niveau de celle des Plasticines ou autres BB casse-burnes.

On se moquait des dires de ces pécores, de ces médisants. Le palpitant carburait à plein régime.

On en était sûr. On était à l'aube d'une belle histoire. Qui ne se terminerait jamais. Que rien ne viendrait ternir. Avec Izia, c'était pour la vie...

Pourtant, tacitement, le doute s'est installé. Et s'il ne s'agissait en fait que d'un amour de plage? Que d'une passade?

La suspicion naquit avec la sortie du second album, 'So Much Trouble'. Alors que le premier disque de la belle nous avait fait souiller le caleçon, en en faisant péter les coutures, nous poussant toujours à en remettre un coup, celui-ci n'aura pas provoqué autre chose qu'une demie-molle. Et l'envie de se retourner de son côté une fois l'acte fini.

Non pas que 'So Much Trouble' soit un mauvais album. Mais l'amour, surtout quand il est passionné, ne supporte pas la routine. Et là, malgré des influences plus actuelles (Gossip, PJ Harvey), lorgnant moins vers les Seventies, l'absence de surprise et de folie se fait ressentir. Le manque d'originalité empêche d'éprouver l'enthousiasme des débuts.

Tant pis! Le deuxième album a toujours été un exercice difficile à négocier. Nous choisissons de ne pas lui en tenir rigueur. Car Izia, à l'image de cette pochette où elle apparaît le torse nu et cerclé d'un imposant serpent, reste une sacrée tentatrice. Chacune de ses venues dans la région (au Splendid en octobre 2009, au Centre Culturel Gérard Philipe de Calais en février 2010 ou à L'Aéronef au mois de novembre de cette même année) fut mémorablement orgasmique. Aucune raison, donc, que cette nouvelle tournée n'apporte pas son lot d'émotions. La demoiselle, par son attitude frontale et hargneuse, ayant prouvé que la scène était son domaine de prédilection.

Malheureusement, l'amour ne rend pas toujours aveugle. Et un joli minois ainsi qu'une nouvelle coupe de cheveux ne suffiront pas à effacer la désagréable déception ressentie pour ces retrouvailles.

L'énergie est là. Mais pas l'émotion. Celle qui donnait toujours l'impression de livrer LE concert de sa vie ne donne, ce soir, qu'UN concert. Transformant des nuits de folie luxurieuse dans un palace en 5 à 7 routiniers dans un hôtel de bord d'autoroute. Tout est mécanique. Manque de naturel. Consciente de l'amour qu'on pouvait lui porter, la chanteuse se sent obligée de reproduire ce qui faisait le charme de ses concerts précédents.

Mais cela sonne faux. Izia n'est plus Izia. Elle joue désormais un personnage. « L'Argent pourrit les gens » chantaient les NTM. La reconnaissance publique et critique aussi. La spontanéité a laissé la place aux clichés, la sauvagerie se transforme en gesticulations ou en poses affectées et l'espièglerie devient marque de fabrique. La chanteuse sombre dans l'auto-caricature. Et les travers du discours démagogique. Les « Je vous aime » lancés au public, le caressent dans le sens du poil. Rappelant la gnan-gnantise polluant les concerts d'un autre fils de, Matthieu Chédid.

Le set est trop savamment orchestré, trop millimétré, trop convenu. Les chansons du premier album ne sont plus, maintenant, envisagées que comme des passages obligés. Ceux qui feront danser. Ou ceux qui émouvront. On s'attend presque sur 'Sugar Kane' à voir arriver un chauffeur de salle brandissant devant la scène une pancarte 'Pleurez maintenant' adressée au public. Ces anciens titres ne sont pas réarrangés. Démontrant une volonté de ne pas prendre de risques.

De plus certains morceaux sont vite expédiés. A l'image de 'I Can Dance', pourtant l'un des meilleurs morceaux du dernier album. On ne retrouve pas, en live, la tension exprimée en studio. Le plus embarrassant reste les couacs décelables dans la voix d'Izia à la fin du concert, sur 'Let Me Alone'. L'ange a les ailes brisées. Le 'Cut Off Your Wings' d'introduction était tristement prémonitoire.

Qui aime bien châtie bien. Possible. Mais il est dommage de voir une jeune pousse perdre sa fraîcheur, son innocence artistique pour se transformer en figure établie du paysage musical français, de l'establishment. « J'ai envie de faire la grande » a-t-elle déclaré dans Rock N'Folk. C'est bien triste... Car cela signifie la perte de cette attitude juvénile et frondeuse que l'on aimait tant.

Attitude que l'on retrouvait avec le groupe d'ouverture, les Black Feet Revolution. Un duo batterie-guitare (et oui, encore un!) qui, s'il n'a pas inventé l'eau tiède, a su livrer un set incandescent. Jouant de manière totalement décomplexée un Boogie-Rock endiablé où l'on devine les influences des Black Keys, des White Stripes (bien évidemment!) mais aussi de The Hives, Wolfmother ou Creedance Clearwater Revival. Un Blues moderne et primitif à la fois, teinté de sonorités Stoner, exhalant par le moindre des ses pores l'envie dévorante de foutre le bordel. De tout retourner sur son passage. Et qui fut le lot de consolation de la soirée.

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