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John Cale + Slow Joe & The Ginger Accident au Splendid – Festival Ground Zero

Ground Zero : Slow Cale and Rockin' Joe

Le Ground Zero Festival n'ayant peur de rien, Slow Joe and the Ginger Accident montent sur scène devant un Splendid silencieux d'un public embarrassé ; les gens sont manifestement venu pour la légende du Velvet Underground, John Cale. Fruit de la rencontre entre un jeune français musicien et un sans-abri chanteur à Goa, en Inde, le projet est pourtant suffisamment improbable pour qu'on s'y intéresse.

Le petit homme au chapeau est donc Slow Joe, pas de doute. Vu les cheveux roux du guitariste, il doit s'agir du ginger accidentel, Cédric de La Chapelle. Mais assez de suppositions, la formation attaque, après un "bonsoir" d'un des français lancé à la salle sans prendre le temps d'attraper un micro. Le clochard crooner de 70 ans, tout sourire, à mi-chemin entre Tom Zé et Tom Waits (il aurait pu s'appeler Slow Tom...), prend manifestement un pied énorme à chanter. Le son est bon, la basse et l'orgue ne se parasitent pas, tout est joué en nuance. C'est un vrai plaisir de les regarder : Slow Joe est très free, sa voix bien maîtrisée, assez profonde, est épaulée à chaque instant par les musiciens. Leur rhythm and blues, qui tire à la fois vers le rock vintage et vers des sonorités plus orientales (forcément) bénéficie d'arrangements assez souples pour suivre (rattraper ?) le leader, assez modernes pour interpeller l'oreille. Le show est touchant, entre la tendresse évidente des musiciens pour leur leader et l'humilité de celui-ci : "You are so beautiful, every one of you, you are WOW". Pour avoir discuté un peu avec le bassiste, j'apprécie encore plus cet état d'esprit, leur enthousiasme sur scène allant de pair avec une modestie louable.

Après une courte discussion à la pause avec Ian Monk, le plus anglais des oulipiens de Lille, John Cale commence à jouer. La disposition de scène est à l'américaine, le leader devant, les autres au fond, à peine éclairés et cachés par les amplis du maître. Le son est étrangement moins bon : le bassiste est inexistant dans le mix, quand le guitariste soliste est trop fort, d'autant plus qu'il se lance dans des improvisations parfois hasardeuses, dont les dissonances, acceptables dans le jazz, sont étrangement déplacées sur les bases harmoniques relativement simples des morceaux de Cale. Le show commence par un morceau très rock américain, le leader à la guitare accoustique, de deux minutes. S'ensuit une longue plage de morceaux lents, très atmosphériques, joués par Cale au synthé. La guitare solo pose décidément problème : bien qu'elle apporte un peu de fantaisie à des morceaux qui seraient sans doute monotones sans elle, ni ses interventions typés blues, ni son jeu Floydien ne conviennent parfaitement. Un morceau sort du lot, très dissonant, rythmiquement audacieux, avec des effets sur la voix à faire pâlir Tom Waits (encore lui).

Le reste du show se fait à la guitare pour Cale, et on retourne à un registre plus rock que progressif. Le tout sonne un peu comme les derniers albums de Clapton : une batterie assez monotone, de longues minutes d'alternance chant/solo de guitare. Mais sans Clapton. Tout est très professionnel, les choeurs sont parfaitement exécutés, les mises en place efficaces, mais le show reste froid. Le leader se contente de remercier le public entre chaque morceau, peu de communication, peu de sourires, peu d'homogénéité dans la setlist. Les fans ayant l'air d'y trouver leur compte, je dois simplement être hermétique à la musique de John Cale. Mais si Slow Joe and the Ginger Accident ont réussi à réchauffer la salle, il finit devant moins de monde qu'il n'a commencé. Dommage pour une légende.

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