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Odezenne + Moussa à l’Aéronef

Après avoir coulé la Péniche en 2016, Odezenne fait encore chavirer Lille. Cette fois-ci dans les airs, dans un Aéronef surélevé au nucléaire. Feuilles en L, dans le sub comme dans la salle, retour sur une soirée hors du temps.

Moussa

Tout commence avec Moussa, le compagnon de route des bordelais sur ce premier mois de tournée. Et dès les premières notes, on comprend ce qui lie Odezenne au jeune parisien. Moussa joue la carte de l'hybridation : une musique élégante, dérivant vers la pop et le RnB. Des textes  rappés, slamés, chantés, oniriques ou terre à terre. Seul sur scène, l'artiste-producteur gère avec maîtrise les différents aspects de son live pour démontrer son talent de multi-instrumentiste : du clavier à la guitare en passant par la coordination de ses beats pré-enregistrés.

Moment court mais prenant, Moussa s'exprime devant une foule déjà acquise à l'idée de voir Odezenne. Le concert chauffe la salle mais ne crée pas d'étincelles. À notre avis, il gagnera sans doute en intensité dans le temps, à l'instar du très classe single Cabrioli.

Odezenne

Même avant d'entrer sur scène, Odezenne en impose déjà. Les grandes machines de Mattia (l'instrumentiste de la bande) surplombent la fosse, avec  en fond une grande bannière sobre du groupe. Quand la salle plonge dans le noire, l'ambiance s'électrise instantanément au profit de Nucléaire, morceau d'ouverture du dernier opus Au Baccara. L'entrée en matière est judicieuse : solennel, planant, fédérateur, Nucléaire incarne bien l'essence d'Odezenne, dans ses versants les plus poétiques.

L'ovation est déjà générale quand le groupe enchaîne les titres avec puissance et justesse : Un corps à prendre, Vilaine, En L, Bonnie... À notre grand plaisir, Odezenne consacre sa setlist en majorité à ses deux derniers albums, symboles d'un tournant dans sa carrière vers des paysages plus abstraits, sombres et fascinants que le rap jazzy de leurs débuts. Car la force du groupe en live réside sans aucun doute de transposer son univers poétique et mélancolique en une grande communion avec le public. Instrus punchées à 1000 volts, un Jacques dansant intenable, batterie martiale en complément,  Odezenne sait faire vivre ses compositions.

Mais c'est quand Mattia sort sa guitare que le groupe nous touche droit au coeur. Les arpèges transcendent l'Aéronef, au fil d'enchaînements splendides. Odezenne nous offre un quart d''heure américain montant en puissance, de l'entraînant valse Au Baccara au slow enivrant Cabriolet, en finissant par l'ébouriffant Souffle le vent.

Pour cette tournée, les voix graves et profondes sont parfois sublimées par des effets vocoder ajustés. Côté instrumentations, le live rappelle à quel point les influences d'Odezenne sont variées : de la chanson à textes à l'indie rock, sans oublier des accents clubbing proéminents et de belles références cinématographiques (coucou Twin Peaks).  Étiré sur plus d'une heure et demi, ce concert prend des airs de consécration. On y voit un groupe complet, comblé et terriblement généreux. De l'autre côté, le public rend la pareille, le sourire jusqu'aux oreilles et le poing levé. Entertainers sans en faire trop, Alix et Jacques haranguent la foule, déclament leur prose crue et poétique, avec une attitude sincère. Car si la machine d'Odezenne est de plus en plus rodée, elle n'en oublie pas ce qui anime les grands concerts :  une place primordiale au sensible, et une attention spontanée pour le moment présent. Deux rappels et deux chansons inédites plus tard, le groupe quitte la scène sous des applaudissements interminables. Une douce euphorie plane sur l'Aéronef, et cela encore après le concert, à l'image d'un queue bien fournie au merchandising !

Photo : © Edouard Nardon / Clement Pascal

 

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