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Peter Von Poehl sur La Scène du Louvre Lens

Peter Von Poehl et son violoncelliste venaient clôturer une très belle journée, porteuse d'espoirs et de visions d'avenir. Maryse Roger et son association Ouvrir les yeux se battent obstinément et avec une belle dignité pour aider les chercheurs à travailler sur les neuropathies optiques héréditaires, le genre de douceurs dont tout le monde se passerait bien : ces maladies provoquent la perte quasi totale de la vue et ne se déclenchent pas à date fixe, ni à un âge prédéfini...entre 10 et 30 ans la plupart du temps mais aussi à 60...

On imagine l'angoisse des porteurs sains qui savent pertinemment qu'à tout moment, toutes les couleurs du monde peuvent s'évanouir. Tout commence par une baisse brutale de l'acuité visuelle sur un œil puis des deux. En deux mois. Le porteur sain, quant à lui, ne sait pas s'il développera ou pas la maladie. L'épée de Damoclès est là. On pense un instant à la difficulté de construire sa vie...Maryse Roger nous raconte ici comment elle mène ce combat.

On avait donc choisi de lutter aussi avec la musique très intimiste de Peter Von Poehl, muni d'une simple guitare acoustique et accompagné d'un très talentueux violoncelliste Zach Miskin qui va sans cesse rehausser l'éclat de la musique de Peter par un jeu subtil et toujours en parfaite harmonie avec celui du Suédois. On commence par aller chercher de très belles harmoniques sur le manche pour lancer la soirée sur les plus hautes marches de l'élégance musicale après une journée très dense sur le plan scientifique. On est au bord du unplugged absolu sur la magnifique Scène du Louvre Lens, une vraie splendeur, un écrin magique pour cette musique étoilée. Un bois splendide au sol pour que tout sonne et résonne. On est vite à quatre d'ailleurs, au fond, avec un harmonica et un pied qui tape sur ce plancher sonore. Le dépouillement n'a rien à voir avec le précaire quand c'est maîtrisé et qu'on dispose du vocabulaire pour faire parler les instruments. C'est leur cas, complices et rodés, ça tourne à merveille.

La veille à Lille sur les Chemins de Patti Smith, Peter Von Poehl chasse ce soir la cécité de ses yeux tout particulièrement clairs. Il tentera même une expérience sensorielle étonnante, jouer les yeux bandés devant un public lui aussi temporairement aveugle. C'est surprenant. Les oreilles totalement libérées du regard offrent une autre perception de la musique. Notre soulagement en ôtant ce masque nous laisse aussi songeur. Si c'était définitif. Si on avait le temps de comprendre ce qui nous arrive en plaine période de déclenchement de la neuropathie. Instructif. Tout est d'ailleurs étonnamment visuel, le costume noir de Peter tranché net de chaussettes rouge vif sur des souliers presque vernis. Les spots cinématographiques disposés aux quatre coins de la scène découpant des ombres gigantesques sur les murs. La Gibson acoustique de Peter égrène ses accords fins et argentés qui se passent sans problèmes de lumière. Zach Miskin enlumine tout ça avec un toucher extrêmement fin. On termine avec une reprise d'Arthur Russell qui permet à Peter de faire participer le public : This is how we walk on the moon. Les gens atteint de cette neuropathie ne demandent sans doute pas à marcher sur la lune mais on peut sans doute les aider, en participant au financement de la recherche, à en percevoir, un jour, les reflets d'argent, voire à la décrocher.

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