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Sallie Ford + Laish au Grand Mix

Signature récente du label bordelais Talistre, Laish est le projet musical du compositeur et multi-instrumentiste britannique Danny Green. Une formation encore relativement discrète mais auréolée d'une réputation flatteuse. 'Pendulum Swing', le dernier album, sorti cet automne, ayant récolté les lauriers de la blogopshère française et des prescripteurs les plus avisés d'outre-Manche.

Sur scène, le disque est défendu humblement. La formule choisie étant celle d'un simple trio : Danny Green au chant et à la guitare et, à ses cotés, Rob Pemberton à la batterie et Tom Chadd aux claviers. L'univers est résolument folk. Privilégie l'acoustique, avec une guitare joliment orchestrée, tout en s'accordant quelques pointes d'électricité. Faisant ainsi s'alterner moments de douce mélancolie et éclaircies plus joyeuses. Les influences sont autant anglo-saxonnes qu'américaines. On pense à Badly Drawn Boy, à The National, à Eels voire à Grandaddy, quand percent quelques sonorités de synthétiseur délicieusement kitsch. L'artisanat est solide mais malheureusement quelque peu classique. Et s'il se détache de très beaux moments, particulièrement quand Danny Green, très à son aise, n'hésite pas, en solo, à lâcher son micro pour interpréter de sa voix chaude et caressante deux chansons a cappella, on sent que le minimalisme, l'économie des moyens ne rendent pas forcément justice aux chansons, sûrement plus subtiles et plus riches dans leur versions studio. Pas toujours convaincant musicalement, Laish force néanmoins la sympathie, le trio agrémentant sa prestation d'un humour So British des plus charmants.

Avec sa frimousse de secrétaire sixties qui s'encanaille le soir venu dans des bars de motards un peu louches, Sallie Ford impose immédiatement sa présence. De même qu'une imagerie indubitablement millésimée, tout droit sortie des années 50 et 60. Celle de l'âge d'or du Rockabilly, du Rhythm and Blues, de la Surf Music, du Garage Rock... Quand des animateurs de radio tels que Alan Freed, Wolfman Jack ou Larry Lujack étaient autant des vedettes que les artistes qu'ils passaient sur les ondes.

L'héritage est assumé. Pour autant, il ne verse jamais dans le cliché passéiste ou le pastiche fétichiste. D'ailleurs, en interview, Sallie Ford s'est toujours targué d'avoir une culture musicale plutôt limitée. A l'instar de Jon Spencer, certes dans un registre moins tempétueux, on sent que ce qui motive principalement l'artiste n'est pas la nostalgie ou la nécrophilie encyclopédique. Mais le retour à une certaine forme de concision et de spontanéité, dans l'écriture et l'interprétation.

Le show est ainsi extrêmement dépouillé. Aucun signe de maniérisme, de pose superflue ou de célébration artificielle du passé. On ne théâtralise pas. On n'appuie pas inutilement sur le bouton Vintage. Sallie Ford, guitare Fender en bandoulière, et ses trois musiciens (basse, batterie et clavier) se concentrent sur l'essentiel : la musique. Leur jeu est d'un naturel confondant. Le son, brut, rugueux et racé. Presque dénué d'effets. Les titres des quatre albums de l'ancienne étudiante de Portland s'enchaînent sans temps mort, avec fluidité. On reste dans le format court de l'indie-pop établi sur les disques. Les rythmes, les ambiances et les couleurs changent sans se chevaucher. Pas de temps mort. Hormis quelques interventions ponctuées à chaque fois d'un rire incontrôlé communicatif. Et, au lendemain de la journée de la femme, Sallie Ford montre crânement qu'elles ont en effet tous les droits. Même celui de faire la nique aux guitaristes mâles. Avec sa guitare qui fait Twang et ses riffs incisifs et teigneux.

La voix, elle, est absolument stupéfiante. Gouailleuse et puissante. Rageuse et acidulée. Poignante et indolente. Tout cela. Et bien plus encore. Une voix hors-d'âge marquée par le Blues, la Soul et la Country, capable de s'adapter à tous les terrains boueux, profondément américaine tout en ayant des accents universels. Sublimant des chansons, aux textes introspectifs, d'une pureté et d'une authenticité assez rares aujourd'hui, qui racontent la détresse et la solitude des cœurs brisés. On pense à certaines grandes figures féminines de la musique U.S. (Janis Joplin en tête) puis on se ravise, presque honteusement, aussitôt. La singularité de Sallie Ford, sa manière bien à elle, quasi-instinctive, de porter ses mots, de leur conférer de la force, n'amène en effet aucune comparaison possible.

Alors, rétro, vintage, old-school ? Finalement, on s'en fout. Sallie Ford est juste une chouette petite nana qui fait du Rock N'Roll comme on aime. Primal et jouissif. Et c'est ce qui compte.

 

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