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Skindred & Tronckh aux 4 Ecluses

Ce soir, direction le littoral pour une soirée Métal aux 4 Écluses de Dunkerque, formidable petite salle qui, comme son nom l'indique, se trouve au bord d'un canal. La programmation, qui, telle le tunnel de la Manche pas très lointain, fait le pont entre notre pays avec les boulonnais de Tronckh et la « perfide d'Albion » avec Skindred, ainsi que l'intimité avec les artistes qu'impose la modestie de ce lieu de spectacle a visiblement conquis, ce soir, le coeur des métalleux venus nombreux chercher leur dose de décibels.

 

Ce sont donc les quatre petits gars du coin de Tronckh qui lancent les premières salves. La légende veut que ce groupe soit né dans des effluves de vinaigre et de bière, à l'arrière d'une baraque à frites de Boulogne-sur-Mer. En défendant haut et fort (surtout fort!) les vertus du métal ch'ti, ces joyeux drilles ont créé un style musical, dont ils sont, pour l'instant, les seuls représentants mondiaux: le Deglingo-Core. Tel le Picon-Bière, ce genre bâtard est un subtil mélange où chaque ingrédient est parfaitement dosé: une bonne rasade de métal, bien sûr, assaisonnée de soupçons gouteux de Hip Hop, de Funk, de Punk voire de Musette. Le tout relevé d'une bonne dose d'humour potache comme le montrent les titres de leurs deux albums: L'Empire Contre Un PacKH en 2002 et Freak And Hell (à prononcer avec l'accent du coin pour déguster au mieux ce jeu de mots aux saveurs purement nordistes) en 2010.

Mais attention! Les membres de Tronckh ne sont pas que de simples amuseurs publics. Ces mecs ont un niveau d'études élevé, hard + 14. Quatorze ans de bons et loyaux services à la cause du Métal. Quatorze ans de répétitions, de concerts et sûrement de visionnements intensifs de concerts de leurs idoles pour comprendre les rouages du bon fonctionnement d'un excellent show. Car sur scène, tout en se montrant bon enfant avec des interventions pittoresques du batteur qui gratifie le public d'une très belle voix d'animateur de ducasse et la gouaille du chanteur, Tronckh se révèle être un groupe incroyablement talentueux qui rappelle aux amateurs du genre les prestations enflammées de Lofofora. Foune, aux mimiques et à la gestuelle dignes de Jack Black dans Rock Academy ou Tenacious D, The Pick Of Destiny, montre à la six cordes une dextérité impressionnante, avec un jeu carré, lourd mais également très nuancé lorsqu'il introduit des sonorités extérieures tel ce passage disco dans « Tronckhy ». L'influence de Kiss, dont il arborait un seyant t-shirt, n'est certainement pas anodine. Le Headbanger dreadlocké , Nickhô, à la basse n'est pas en reste avec une technique mettant le Slap en avant et des sonorités claquantes et profondes formant avec Ju, véritable Squiggly La Pieuvre de la batterie, une assise rythmique dévastatrice. La fusion métallique que nous servent ces musiciens servent au mieux la voix puissante de Denis, techniquement irréprochable, et les textes du groupe, travaillés avec humour (l'esprit San Antonio n'est pas très loin) et faisant preuve d'une belle plume: les légers « Tronckhy », « Raoul », « La Débrandade » ou les plus engagés « Homo Speculos » et « Evangelista ». On comprend pourquoi ce groupe est en liste dans la catégorie meilleur album de Métal aux Awards Nord – Pas-de-Calais et on souhaite au groupe de voir son succès régional devenir national car il le mérite. On regrette juste que le public n'ait pas été à la hauteur de la prestation du groupe en restant relativement statique.

Les anglais de Skindred sauront, néanmoins, le convaincre de faire ruisseler la sueur sur son corps à grands coups de Slam, de Jump et de mouvements de tête à se défaire une cervicale. Construit sur les cendres de Dubwar, combo mythique des années 90, avec au micro le malicieux Benji Webbe, Skindred offre une musique que l'on pourrait qualifier de Ragga Metal en combinant intelligemment sonorités Reggae, Dub, Hip Hop et Métal. Ces britanniques, qui ont joué sur les plus grandes scènes des festivals de Hard mondiaux et devant des foules imposantes, apprécient visiblement de jouer dans une petite salle leur permettant une réelle proximité avec l'auditoire. Ce qui malheureusement n'est pas toujours le cas avec des groupes d'un certain standing.

Sur scène, Skindred (Benji à la voix donc, Mikey Demus à la guitare, Dan Pugsley à la basse et Arya Goggin à la batterie) démontre qu'il est une des formations Métal du Pays de Galle, et, n'hésitons pas, du monde, les plus excitantes et originales du moment. Le combo ne se contente pas d'appliquer des recettes musicales toutes faites et choisit de brasser dans sa marmite bouillonnante différentes influences mettant ainsi en avant son talent de mixeur de génie passant d'un gros riff de Metal à une déferlante de vocalises Reggae. De quoi faire danser les métalleux et pogoter les dreadeux! Les sonorités de guitare font plaisir aux fans et nostalgiques du Néo Metal du début (Korn, Deftones...) avant que ce mouvement ne soit tué dans l'oeuf en étant MTVisé. Les structures des morceaux (issus des trois albums du groupe: Babylon, Roots Rock Riot et Shark Bites And Dog Fights) sont surprenantes et prennent un malin plaisir à déstabiliser par des breaks ou des transitions inattendus. Et techniquement, rien à redire. Les musiciens sont au diapason, particulièrement le couple basse-batterie au jeu varié et à l'aise dans toute les situations, surtout les plus Groovy. Et Benji se révèle encore une fois un chanteur tout simplement extraordinaire, au spectre incroyablement large, capable de passer de grognements hardcore à des vibes reggae ou à un flow Hip Hop de la manière la plus déconcertante qui soit.

Une voix qui sait se faire à la fois violente et sensible. Pas sûr que cela plaise au public premier du groupe mais en l'entendant chanter a cappella lors de certains interludes, on l'imaginerait bien chanter de la Soul. Et pourquoi pas créer encore un nouveau genre: la Soul Hard. Avec lui tout est permis!

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