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Steve Hill & The Majestiks à La Péniche

Insidieusement, ce que l'on pourrait qualifier comme l''Underground Rock est en train de changer de visage. Longtemps l'apanage de l'Indie-Rock, il ne peut plus, à l'heure actuelle, en revêtir les oripeaux. Il suffit, pour le constater, de jeter un simple coup d'oeil sur les rayons Rock Indépendant de son disquaire préféré. En effet, qu'y trouve-t-on placés en tête de gondole? Des groupes ou artistes tels qu'Interpol, Arcade Fire, The Strokes, MGMT, Vampire Weekend, TV On The Radio, bénéficiant d'une très large distribution, d'une énorme médiatisation et remplissant les salles de concert. Pour le côté Underground, on repassera donc... Même des groupes à priori moins abordables par leurs expérimentations et leur musique difficile d'accès (Animal Collective, par exemple) connaissent un succès grandissant et rameutent les foules. Enfin bon, certains n'hésitent pas à dire que les multimillionnaires de Radiohead sont des artistes indépendants. Un groupe faisant les unes des magazines spécialisés, pensant minutieusement chacune de ses apparitions médiatiques et faisant des tournées hors de prix qualifié d'indépendant et d'underground... Ouarf ouarf, on s'esclaffe!!!

 

Non, non, l'Underground Rock, désormais, a un visage buriné, mal rasé, viril, des cheveux longs et gras, la voix rocailleuse à force de nuits passées en compagnie des fidèles Jack Daniels ou Jim Beam à fumer des blondes virginiennes et n'en a franchement rien à faire des modes musicales, du pseudo avant-gardisme et des expérimentations hypes et stériles. Le véritable Underground Rock est du côté des musiciens se voulant, avant d'être des artistes, être avant tout des artisans honnêtes soucieux de livrer une musique à l'ancienne, à l'état d'esprit seventies, primaire, sincère, brute de décoffrage et invoquant la philosophie du blues. Certains parleront de « musique de vieux cons »... Laissons les pérorer et s'extasier devant les albums de plus en plus ennuyeux de Radiohead. Et comme, on est tous le con de quelqu'un, chantons leur gaiement le « Who Do You Think You Are » de Steve Hill et de ses Majestiks.

Canadien d'origine, Steve Hill marque le retour du rock, le vrai, celui que l'on entend plus à la radio (du moins en France, heureusement en Belgique, il y a la formidable station Classic 21) et que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître. Celui qui donne envie d'enfourcher une Harley Davidson pour sillonner les grands espaces américains à l'image de Dennis Hopper (paix à son âme!) et de Peter Fonda dans le mythique Easy Rider, tout de cuir vêtu, bandana sur la tête, cheveux et barbe au vent. Celui qui renvoie à l'époque bénie des guitar-heroes, du Blues-Rock rugueux à la ZZ Top ou du Rock Sudiste de Lynyrd Skynyrd ou des Allman Brothers. D'ailleurs, difficile de ne pas penser à Greg Allman, tant la ressemblance entre le canadien et le leader de ce groupe est frappante mais aussi par le fait que la prestation de Steve Hill And The Majestiks plonge les plus cinéphiles dans l'atmosphère moite, poisseuse, aux forts relents de cambouis et d'huile de vidange du club texan tenu, dans les années 70, par le trafiquant de drogue Will Gaines (interprété par le chanteur des Allman Brothers dans son unique incursion cinématographique) dans le film Rush réalisé par Lili Finn Zanuck en 1991, formidable polar dont la B.O. fut signée par le God des guitar-heroes, Eric Clapton.

Une ambiance à l'ancienne où La Péniche se transforme en rade traditionnel du sud des Etats-Unis et où la petite scène ne se pare que des amplis Marshall empilés par le groupe : Rock Laroche à la basse, Richard Boisvert (sic!) à la guitare et Sam Harrison à la batterie. Pas de fioritures. Juste la musique et la voix hargneuse de Steve Hill, Et, bon dieu, ce que c'est bon!!! Les morceaux de l'album, acclamé par la critique, The Damage Done (« The One », « Who Do You Think You Are », « I'm Dying For You »...) s'enchainent, pendant une heure trente, à une vitesse supersonique, le son du bottleneck flatte nos cages à miel, les solos de guitare, entre sonorités Bluesy, Country ou Hard-Rock (à la Motorhead ou Black Sabbath) font taper du pied et bouger la tête. Difficile de résister à la tentation de se commander un bon vieux Jack pour s'imprégner encore plus de l'ambiance.

Ayant écumé les clubs et salles de concert du continent Nord-Américain, Steve Hill et ses musiciens font preuve d'une aisance scénique incroyable et savent comment chauffer leur public. Avec son charmant accent canadien, Steve présente ses morceaux, les reprises jouées par le groupe (dont une cover, burnée en diable, du « Up Jumped The Devil » de Robert Johnson) et invective le public qui ne se fait pas prier pour taper dans les mains. Un public peu nombreux, une cinquantaine de personnes (et oui, quand on vous dit que le Rock, le vrai, c'est Underground) mais aux anges et faisant bruyamment connaître sa joie d'être là (surtout les filles du fond poussant de jolis cris de rodéo). Et, grande surprise, pas uniquement constitué de glorieux vétérans des Seventies mais également de spectateurs plus jeunes connaissant par coeur le « Won't Get Fooled Again » des Who joué, énergiquement, en clôture de concert. Qui a dit qu'il n'y a plus de jeunesse?

Il est des soirs où il fait bon avoir des goûts de « vieux con ». Et celui du 16 septembre 2010 à la Péniche en fut un. Parole de vieux con!

 

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