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The Jon Spencer Blues Explosion + Joe Gideon & The Shark à l’Aéronef

On peut dire qu'ils nous auront fait attendre, les gaillards. Car depuis l'album 'Damages' en 2004, les fans du JSBX n'ont pas eu grand chose à se mettre sous la dent. Hormis les quelques compilations et rééditions de rigueur.

Une sensation de manque commençait cruellement à se faire ressentir. Que l'on essayait de pallier avec les projets parallèles de Jon Spencer (Heavy Trash, Spencer Dickinson ou Solex) ou de ses acolytes. Man Without Pants pour le batteur Russel Simmins. Twenty Miles pour le guitariste Judah Bauer. Mais peine perdue. Comme les patch à la nicotine, ces escapades n'avaient qu'un simple effet thérapeutique. Et ne faisaient pas oublier le plaisir d'antan. Que l'on souhaitait revivre.

La parution d'un nouvel album, le carnassier 'Meat + Bone', reprenant là où les choses s'étaient arrêtées, fut donc une des excellentes nouvelles de l'année 2012. De même que l'annonce d'une bienfaitrice tournée européenne. L'insoutenable sevrage était enfin terminé. Les accrocs allaient pouvoir reprendre leur dose d'un Rock N'Roll garanti extra pur. 100 % non coupé. Sans addictifs synthétiques.

Pour ronger son frein. Joe Gideon And The Shark. Un duo londonien. Un frère et une soeur. Lui, Gideon à la guitare. Elle, Viva, à la batterie et aux claviers. Leur came : le Blues. Revisité façon Greenwich Village. Période Beat Generation. Une prestation plutôt déconcertante. Qui fait souffler le chaud et le froid.

Brûlante quand le Blues prend le dessus. Avec une guitare vive, tranchante, abrasive. Qui serpente à travers des paysages sonores psychédéliques. Sur lesquels Viva, avec son jeu tout en tribalité, fait gronder le tonnerre. Alliant, derrière ses fûts, puissance et grâce, chorégraphiant le moindre de ses mouvements de baguettes, sa gymnastique rythmique fascine.

L'aspect théâtral nettement moins. C'est d'ailleurs lui qui fait chuter le thermomètre. A de trop nombreuses reprises. Fortement influencée par Lou Reed, Nick Cave, Patti Smith ou encore Jim Morrison, la fratrie montre des prétentions littéraires et veut adopter la posture du poète. Pouet pouet.

Gideon clame plus qu'il ne chante ses mésaventures autobiographiques. Tandis que les choeurs de sa soeur tentent de leur apporter une touche mystique. On frôle la caricature. Mais pas l'ennui. La construction trop alambiquée des morceaux faisant retomber immanquablement toute tension nuit au duo. Et fait bailler aux corneilles. En se voulant Arty. Joe Gideon And The Shark, au final, ne réussit qu'à être intello-chiant.

Pas de problème de ce genre avec Jon Spencer. Son approche de la scène est purement viscérale. Le JSBX privilégie le son brut, limite dégueulasse, cogne et rugit. Aucune politesse. Aucune bienséance. On ne perd pas de temps à discuter ou à faire ami-ami. On se contente d'éructer « One, Two, Three », « Oh Yeah » ou « Let's Play The Blues ». Et c'est aussi bien comme ça. Le Rock N'Roll n'a pas besoin du superflu.

8 ans se sont écoulés depuis le dernier méfait. Et on est ravi de voir que rien n'a changé. Jon Spencer, ce salopard, est toujours aussi beau. Toujours capable de prêter son corps filiforme pour une campagne de pub Calvin Klein. Le gras, il le conserve pour sa musique. Dont la formule n'a été nullement modifiée. Des riffs de guitare saignants et une batterie (incroyable Russel Simmins) martelant les plaies pour empêcher la suturation. Aucun répit, aucune accalmie de tout le concert.

Le groupe joue pied au plancher. Avec un sentiment d'urgence. Et une énergie phénoménale. Dévastatrice. Monter à bord du Blues Explosion, c'est accepter de monter dans un véhicule conduit par un psychopathe. Ne laissant ni le temps de réfléchir aux multiples influences décelables (de toute façon, c'est toute l'histoire du  Rock qui est passée sous le rouleau-compresseur du trio) ou de se reposer. Si le JSBX était un personnage de fiction, nul doute qu'il prendrait les traits du Stuntman Mike, incarné par Kurt Russel, dans le film 'Boulevard De La Mort'. Un serial-killer tuant ses victimes grâce à son automobile. Avec Jon Spencer, en live, tout n'est que fracas et chaos. Aux commandes de son groupe, il précipite le Rock N'Roll droit vers le mur. A toute vitesse. Pour le détruire. Et mieux le reconstruire.

En ne lui laissant que la viande et les os. L'essentiel.

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