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Winston McAnuff & The Bazbaz Orchestra + Furieux Ferdinand au Nautilys – Festival Tour de Chauffe

Avec un prénom qui rime avec Kingston, pas étonnant que Winston McAnuff soit devenu une figure majeure de la musique Reggae.

Même si cela lui aura pris, néanmoins, plus de deux décennies. Car malgré des albums parus à la fin des années 70 et dans les années 80, salués par les initiés, ce n'est qu'en 2005 qu'il obtiendra, en France, le succès et la reconnaissance qu'il mérite. Grâce au label Makasound (malheureusement aujourd'hui disparu) qui a réédité ses premiers albums. Et sa rencontre providentielle avec le musicien français Camille Bazbaz avec qui il enregistrera, à cette même époque, l'album 'A Drop'.

Et le récent 'A Bang'. Présenté live ce soir à l'occasion de la première date de la 6e édition du festival Tour De Chauffe organisé par la structure du même nom. Un dispositif accompagnant les formations amateurs locales par diverses actions (résidences, enregistrements professionnels, aide à la structuration administrative et à la communication, formations...). Et leur permettant, par le biais du festival, de jouer en première partie de têtes d'affiche nationales ou internationales.

Le premier groupe, cette année, à bénéficier de cette mise en lumière est Furieux Ferdinand. Un trio Slam-Jazz constitué autour de Pierre Boudeulle. Un véritable touche-à-tout: comédien, clown, metteur en scène, musicien (saxophone, flûte, mélodica) et slameur. Qui pour son projet musical s'est entouré de Sergio Siddi à la guitare (acoustique et électrique) et de Nicolas Montagne aux percussions (calebasse, cajon, cloches et même jouets pour enfants).

L'atmosphère se veut intimiste. Les mots sont mis en avant. Avec, toutefois, un réel souci de musicalité. Groove jazzy, boucles de guitares recherchées, rythmes venus d'ailleurs... Un univers hybride et métissé passant par de multiples couleurs, de la plus joyeuse à la plus sombre. Tentant de coller au plus près aux histoires tissées par le slameur. Qui raconte la vie, la peur, les doutes, l'amour, ses joies et ses peines...

Malheureusement, le trio a du mal à embarquer le public dans son monde. La faute à une trop grande théâtralité. Les apartés de Pierre Boudeulle, ses prises de parole entre les morceaux sont, en effet, eux aussi slammés. Le concert étant écrit et préparé dans ses moindres détails, cela nuit au naturel de la prestation. Et crée une distance, voire une certaine froideur.

De plus, certains textes semblent beaucoup trop naïfs et certains thèmes trop éculés. « Quand j'étais petit, je voulais devenir grand. Maintenant que je suis grand, je veux pas devenir vieux ». On a déjà entendu plus original et percutant. Pas de quoi séduire un public déjà bien échaudé par la surmédiatisation d'artistes comme Grand Corps Malade ou Abd Al Malik. Plutôt que de se laisser porter par les mots de Furieux Ferdinand, beaucoup de spectateurs préfèreront se laisser emporter par leurs volutes de fumées cannabiques, à l'extérieur. Concert de Reggae oblige.

Avec la montée sur scène de la tête d'affiche, la température, naturellement, monte d'un cran. Surtout qu'à ses côtés, on retrouve le toujours très chaud (mais au sens coquin du terme) Camille Bazbaz, aux claviers et aux choeurs, et ses musiciens habituels, le guitariste Jérôme Perez et la batteuse Christiane Prince. Ainsi que, pour le plus grand bonheur des fans nostalgiques de l'immense groupe de Funk français F.F.F., Yarol Poupaud à la basse ou à la guitare.

Si les émanations épicées de quelques courageux contrevenants faisant fi de la triste interdiction de fumer dans un lieu de spectacles mettent parfaitement dans l'ambiance d'un concert Reggae, Winston McAnuff et ses acolytes prennent un malin plaisir à sortir des clichés rastafariens. A détourner et pervertir le Roots originel.

En maîtres d'oeuvre de la soirée, le charismatique chanteur jamaïcain et l'organiste français Camille Bazbaz font se percuter leurs univers respectifs. En résulte un Big Bang aux multiples échos: Rock, Dub, Funk, Soul, Electro-Pop, Folk, World… Les étiquettes musicales sont déchirées et volent en de joyeux confettis.

Un feu d'artifices étourdissant. Même lorsque le taux de THC dans le sang respecte la loi. Winston McAnuff, vocalement, est impressionnant de maîtrise. Son chant est vibrant, sensible, chaud, suave, riche de diverses nuances... Alliant la grâce des débuts et la gravité gagnée au fil d'une vie en dents de scie. La voix d'une belle âme. Naviguant avec classe entre rage Rock ('Jacob's Ladder') et spiritualité ('I Pray'). Prouvant ainsi que les chanteurs Reggae n'ont rien à envier aux grands chanteurs Soul.

La complicité qui le lie à ses compagnons de scène est évidente. Saute aux yeux. Derrière la collaboration artistique issue du fruit du hasard (un concert de Winston au New Morning en 2003 où Bazbaz a pu faire sa rencontre et lui proposer de travailler avec lui), on sent une réelle amitié, teintée d'admiration. Et de fierté de pouvoir jouer avec une telle figure. Tout le monde s'en donne à coeur joie. Camille fait, comme d'habitude, l'amour à ses claviers, tombe la chemise, s'allume un gros cône... Yarol, lui, n'a rien perdu de ses qualités de showman, haranguant le public, prenant la pose, montant sur les amplis. Chacun y va de son petit solo. On est face à une véritable dynamique de groupe. Où les individualités se complètent pour former un tout.

Un concert en tous points parfait. Bien roulé. Bien tassé. Et faisant encore effet bien après la fin de la combustion.

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