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Le Next Festival – édition 2022

Du 10 novembre au 02 décembre 2022, le NEXT festival revient pour sa quinzième édition riche en danse, en performance et en théâtre. Au programme de ce festival transfrontalier, douze villes des Hauts-de-France et de Belgique accueilleront quarante spectacles d’artistes internationaux. LillelaNuit est allé voir quelques unes des pièces présentées.

Partir du singulier pour évoquer la grande histoire

Le Grand Sud accueillait le 11 et le 12 novembre la pièce C A R C A S S de l’artiste portugais Marco da Silva Ferreira. La chorégraphie puise ses racines dans les danses folkloriques et traditionnelles angolaises et portugaises mais aussi dans des danses plus urbaines. Les dix danseurs évolueront sur un carré de linoléum blanc composant l’espace de tous les possibles. Comment faire valoir son authenticité au sein d’un groupe et en quoi peut-elle être constitutive de celui-ci ? la pièce promeut l’éclectisme, défend les minorités (communautés LGBTQIA+ ou issues d’anciennes colonies) et la liberté individuelle de chacun qui ne peut être que bénéfique pour le groupe. Comme un slogan l’un des danseurs écrit « Tous les murs tomberont », un message d’espoir vers un monde plus tolérant et inclusif. Même si les interprètes, tous très singuliers, arrivent à nous transmettre leur énergie débordante sur des musiques variées allant de percussions à des sons plus électro, le spectacle sonne comme un air de déjà vu autant sur le fond que sur la forme parmi le paysage de la danse contemporaine.

Fanny de Chaillé présentait Une autre histoire du théâtre au Phénix de Valenciennes le 15 et le 16 novembre. Dans l’histoire du théâtre, la place du metteur en scène, celui de l’auteur et de son texte ont suscité de longues réflexions mais qu’en est-il de celle de l’acteur ? Comment peut-on définir son travail et en quoi consiste-t-il exactement ? Il existe autant de façon d’apprendre le métier de comédien que de manière de jouer différente. Les points de vue divergent quant à l’appréhension de la pratique du jeu. Faut-il incarner ou se tenir à distance du personnage que l’on joue ? Doit-on vivre et essayer de ressentir ce que traverse le personnage ou bien s’agit-il uniquement de faire entendre la langue de l’auteur ? Les arguments sont inspirés de grands penseurs du théâtre qui ont contribué à apporter un souffle nouveau tant sur la façon de réfléchir sur leur art que dans la manière de l’exécuter. Les comédiens imiteront avec beaucoup d’humour et de précision certains d’entre eux tels que Giorgio Strelher, Jeanne Moreau ou Jerzy Grotowsky et bien d’autres. Fanny de Chaillé choisit quatre jeunes comédiens. Elle part de leur parcours individuel et de leur propre rapport à l’acting pour étendre le sujet vers la grande histoire du théâtre. Les passionnés reconnaitront certaines références mais le spectacle s’adresse aussi aux néophytes. À travers Une autre histoire du théâtre, Fanny de Chaillé met en avant avec beaucoup d’humour et de légèreté la pluralité des visions concernant le métier d’acteur et soutient qu’il n’existe pas un théâtre mais bien des théâtres. Il est le spectacle coup de cœur de Lillelanuit parmi le festival.

Dans la salle du Grand Bleu le 17 et le 18 novembre les acteurs dans Do the Calimero ne sont rien d’autre qu’eux-même. Le jeu est presque antithéâtral et l’énonciation s’approche le plus possible du quotidien. La metteuse en scène Lies Pauwels montre des individualités assumées et complexes dans un spectacle carnavalesque. Fini d’être policé et bien comme il faut. On en termine avec cette mascarade absurde où il faudrait étaler son bonheur et sa réussite. Par le biais du travestissement, ne serait-ce pas enfin la possibilité d’être soi-même ? La pièce dénonce les masques que nous portons afin de faire croire aux autres que nous sommes heureux. Nous nous trahissons nous-même. Comment trouver sa place dans la société contemporaine ? L’artificialité se situe dans le kitsch revendiqué de certains éléments de décor et des costumes dans lesquels les acteurs sont engoncés. Les récits des comédiens, tous monologués, s’enrichissent, se questionnent et se répondent. Leur succession crée une force nouvelle et élève l’histoire et les interrogations de chacun à la construction d’une histoire commune.
Dans un spectacle original, Lies Pauwels flirte entre le comique et le tragique à travers un texte puissant. Seulement, la linéarité dans la façon d’énoncer le texte —qui reste un choix clair et assumé — pourrait ennuyer…

Le spectacle A Kiss Without Lips s’ouvre sur un récit qui, sans doute, donnera les clefs de ce qui se déroulera par la suite. Malheureusement le comédien est inaudible et le manque de force de conviction chez tous les interprètes fera très vite décrocher le spectateur. La pièce mélange à la fois danse, performance, musique et texte. Elle s’appuie sur le quotidien qu’a partagé Anna Gaïotti auprès des tribus Hamar et Nyangatom dans la basse vallée de l’Omo, en Éthiopie. L’artiste protéiforme propose une découverte « ethnomusicale » composée par vierge noir e. Le spectacle est abscons, peu accessible et reçoit un accueil plus que sceptique dans la salle de l’Oiseau Mouche.

Quand l’Opéra adapte un classique de la littérature

Le samedi 26 et dimanche 27 novembre 2022, le Théâtre Raymond Devos de Tourcoing accueillait l’opéra de Philip Glass Les Enfants terribles sous le regard musical d’Emmanuel Olivier dans une mise en scène de Phia Ménard. Le compositeur américain Philip Glas s’empare en 1996 du livre de Jean Cocteau publié en 1929 pour créer un opéra de chambre dansé avec tous les protagonistes du livre et trois pianistes.

Paul et Elisabeth sont des jumeaux qui livrés à eux-mêmes s’enferment dans leur chambre pour jouer à des jeux d’enfants. Paul admire Dargelos, le cancre de l’école mais ce-dernier lui lance une pierre enveloppée de neige à la figure. Paul l’innocente mais Gérard, ami de Paul, le dénonce. Paul et Agathe, le double féminin troublant de Dargelos, tombent éperdument amoureux. Gérard aime lui aussi Agathe tandis qu’Elisabeth aime son frère Paul. Dans ce dédale passionnel, tous les protagonistes évolueront sur des plateformes rotatives. L’infinité du cercle souligne la fatalité de l’intrigue. Ce huis clos amoureux et obsessionnel ne peut conduire qu’à une issue fatale.

Alors que dans le livre de Cocteau les personnages sont des adolescents, Phia Ménard décide d’en faire des personnes âgées qui n’ont rien perdu de l’émerveillement, de la curiosité, de l’imagination et des sentiments liés à l’enfance. Souvent considérées comme un poids et un fardeau aux yeux de la société, les personnes âgées sont alors déchues de celle-ci. Après le Covid-19 et les scandales liés aux EPHAD, adapter Les Enfants terribles dans une maison de repos met en lumière certains aspects de notre époque. Phia Ménard y ajoute un narrateur qui interprètera, sans chanter, le rôle d’un aide-soignant.

Les personnages sont cloitrés dans une maison de retraite mais l’imagination, le rêve et la fantaisie leur permettent de se soustraire de leur maladie, de leur infirmité et de s’évader d’une réalité trop étouffante. Malgré le fatalisme de la vieillesse et, par là même de la mort, les personnages gardent leur âme d’enfant pour s’échapper de la violence du monde réel et rester dans une forme d’éternité.

LE NEXT FESTIVAL 2022 - L'AFTERMOVIE

Le festival a accueilli 13 685 spectacles, pour un remplissage de salle de 82,8% (pour 8 633 spectateurs et 60% remplissage en 2021).

NEXT 2022, C'EST :
- 40 productions internationales de chorégraphes, metteurs en scène et performeurs de 14 nationalités.
- 14 premières et premières nationales.
- 73 représentations dans 23 théâtres et une quinzaine de villes flamandes, wallonnes et françaises.
- 31 navettes du festival.
- 16 adolescents européens pour TeeNEXTers.
- 130 professionnels pour It's a match.

La 16ème édition se déroulera du jeudi 9 novembre au samedi 2 décembre 2023.

Photo : Une autre histoire du théâtre

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